L’objectif des mesures prises par la BCE est de relancer la croissance en Europe; les retombées économiques pour Israël seront importantes. La Banque Centrale Européenne a lancé un programme d’assouplissement quantitatif calqué sur le modèle anglo-saxon : la BCE injectera massivement des liquidités dans les marchés en achetant de grandes quantités de titres, notamment des emprunts d’État. Le plan atteindra 60 milliards d’euros par mois jusqu’en septembre 2016, soit une enveloppe globale de 1.140 milliards d’euros en un an et demi...Analyse...
L’EURO AU PLUS BAS FACE AU SHEKEL DEPUIS 2002
Le but recherché par la BCE est double : relancer l’économie européenne qui connaît une croissance anémique, et vaincre la déflation qui menace l’activité. En injectant des liquidités, les banques vont pouvoir accroître la distribution de crédits aux entreprises et aux ménages ; sans compter que la création de monnaie fera baisser le cours de l’euro, ce qui favorisera les exportations européennes.
L’un des objectifs des mesures annoncées par la BCE est bien de faire baisser l’euro. Pour Israël, la baisse de l’euro face au shekel n’est pas une bonne nouvelle : les exportations israéliennes vers l’Europe sont moins compétitives et les entreprises exportatrices y perdent au change. L’effet d’annonce de la BCE ne s’est pas fait attendre : vendredi à Tel Aviv, l’euro s’est échangé contre 4,48 shekels, soit le taux de change le plus bas de la devise européenne depuis 2002.
L’EUROPE, PRINCIPAL PARTENAIRE COMMERCIAL D’ISRAËL
Pour l’économie d’Israël, l’intervention de la BCE aura des retombées économiques importantes puisque l’Europe est le principal partenaire commercial d’Israël. La situation économique dans les principaux pays d’Europe, tout comme le taux de change de l’euro face au shekel, sont des facteurs qui ont un impact direct sur les entreprises israéliennes et les consommateurs.
En 2014 déjà, le commerce de marchandises entre Israël et l’Europe a été handicapé par un shekel trop fort. Sur toute l’année 2014, les exportations israéliennes vers l’Europe ont augmenté de 2,1% seulement ; dans la même période, les exportations israéliennes ont augmenté de 5,1% vers les Etats-Unis et de 3,5% vers l’Asie, sans doute en raison d’un dollar qui s’est renforcé face au shekel.
ISRAËL VA-T-IL EN PROFITER ?
Résultat : si l’Europe reste le principal partenaire commercial d’Israël, sa part dans les échanges va en se rétrécissant. En 2014, l’Europe absorbait 27,3% des exportations israéliennes et fournissaient 33,4% des importations israéliennes, soit en retrait par rapport à 2013. En revanche, c’est la tendance inverse qui est observée dans le commerce avec les Etats-Unis et les pays d’Asie dont les échanges sont libellés en dollar.
Pour bien mesurer les retombées économiques pour Israël, il reste à savoir ce que la nouvelle politique de la BCE va changer pour l’Europe. Un retour de la croissance des économies européennes sera favorable à l’économie d’Israël ; les entreprises israéliennes pourront y élargir leurs débouchés pour répondre à la demande privée, qu’il s’agisse des ménages comme des investisseurs.
DES INTÉRÊTS CONTRADICTOIRES
La relance de l’investissement est donc la clé de réussite du plan de la BCE. Encore faudra-t-il que les États endettés se réforment en veillant à freiner la hausse de leurs dépenses publiques. Dans le cas contraire, l’assouplissement quantitatif annoncé par la BCE ne suffira pas à relancer la croissance.
Les scénarios du programme de la BCE sont donc incertains : l’efficacité des mesures monétaires dépendra aussi de l’environnement international et de la bonne volonté des politiciens. Reste qu’Israël et l’Europe ont aussi des intérêts contradictoires : le recul de l’euro favorise les exportateurs européens mais handicape les entreprises israéliennes. En revanche, la faillite du système monétaire européen serait un scénario noir pour l’économie israélienne.
Jacques Bendelac (Jérusalem)Source Israel Valley