mardi 15 mars 2016

Le Hezbollah tire à boulets rouges sur Riyad, « un poignard dans le dos de la nation arabe »

 

Les cadres supérieurs du Hezbollah se sont à nouveau déchaînés hier contre l'Arabie saoudite, dans un climat de montée progressive aux extrêmes entre Riyad et les pays arabes d'une part, et Téhéran et ses alliés régionaux, notamment le Hezbollah, de l'autre. Ce sont en effet des diatribes enflammées contre le régime saoudien que les ministres, députés et autres responsables du parti ont prononcées, plaçant désormais l'équation armée-peuple-résistance non plus comme une garantie face à Israël ou aux jihadistes, mais face à l'Arabie...



La thématique du retour à « l'équation en or » du Hezbollah était particulièrement saillante dans les propos du président du conseil chérié du parti chiite, le cheikh Mohammad Yazbeck, qui a affirmé hier, au cours d'une cérémonie à Boudaï : « Nous sommes avec toute main tendue pour le bien du Liban dans son ensemble et de tous les Libanais, et non en faveur d'un groupe, d'une partie, d'un courant ou d'un parti, afin que le Liban soit uni et fort par le biais de son armée, de son peuple et de sa résistance. Une telle main, nous la reconnaissons et l'appuyons.
Mais qu'une main vise à porter atteinte à cette force et l'effriter, pour empêcher l'unité entre l'armée, le peuple et la résistance de n'importe quelle manière, eh bien, nous la briserons. »
« L'armée libanaise a prouvé qu'elle se battra même si c'est à mains nues et sans don saoudien. Tel est le vrai patriotisme, au lieu de s'appuyer sur les épaules des Saoud », a-t-il ajouté.


Hajj Hassan
« La bande d'incapables de la Ligue arabe, qui a échoué dans tout ce qu'elle a entrepris au cours des dernières années, n'a innové en rien lorsqu'elle a placé le Hezbollah sur la liste du terrorisme élaborée par les pays arabes.
Les Américains et les Israéliens l'avaient précédée dans ce sens », a affirmé pour sa part le ministre de l'Industrie Hussein Hajj Hassan, au cours d'une cérémonie à caractère scolaire dans le Hermel.
« Les pressions contre le Liban (...) ainsi que leurs menaces d'adopter de nouvelles mesures visent à pousser les Libanais à s'entre-tuer pour le plaisir des rois et des émirs Saoud », a-t-il indiqué.
« L'Arabie et ses alliés n'ont pu, durant les dernières années, avaler le Liban. Ils sentent à présent que leur défaite approche. Ils n'ont pu faire chuter l'équation armée-peuple-résistance, ni encercler et vaincre la résistance et son public par le biais des intimidations, des explosifs, du terrorisme et des menaces. Ils ne le pourront pas plus, aujourd'hui, en plaçant la résistance sur la liste des organisations terroristes », a ajouté M. Hajj Hassan.


Fneich
Dans un réquisitoire contre les régimes arabes, le ministre Mohammad Fneich a pour sa part estimé, au cours d'une cérémonie à caractère scolaire à Nabatiyeh, que la résistance « représente un problème pour les régimes arriérés », dans la mesure où elle a montré, selon lui, qu'une bonne gestion des ressources et des énergies permet de triompher de l'ennemi.
« C'est pour cela que ces régimes veulent détruire le style et la ligne de la résistance, à travers des décisions sans valeur, qui sont une honte supplémentaire à leur actif », a-t-il indiqué.
M. Fneich a ensuite initié une attaque en règle contre « l'arabité qui s'est éloignée de la confrontation du projet sioniste, et qui s'est inféodée aux États-Unis et aux projets colonialistes ».

« Quelle arabité justifie que l'on bombarde le peuple du Yémen, que l'on réprime le peuple de Bahreïn, que l'on tue des gens en Syrie, que l'on tente de dépecer l'Irak (...)? » s'est-il interrogé.
« Nous ne nous sommes ingérés dans les affaires d'aucun pays arabe (...). Toutes ces menaces et ces pressions ne sont qu'une tentative visant à faire du Liban l'orbite de ces régimes et un satellite de leurs politiques. Il n'y a ni dons ni cadeaux, mais une tentative d'acheter la décision du Liban (...) », a-t-il ajouté.

Kassem et Safieddine

Pour le cheikh Hachem Safieddine, président du conseil exécutif du parti chiite, « toutes ces pressions et tout ce chantage ne mèneront le régime saoudien nulle part (...) ».
« Notre position au Yémen, en Irak, en Syrie et en Palestine, lorsqu'elle est fondée sur nos responsabilités religieuses, morales et politiques, aucune prise de position dans le monde ne peut l'ébranler ou la faire reculer », a-t-il indiqué, au cours d'une cérémonie funèbre à Baalbeck.
Pour le secrétaire général adjoint du Hezbollah, le cheikh Naïm Kassem, « la campagne saoudienne contre la résistance n'est que l'expression de la désillusion de Riyad face à l'échec de ses politiques et de ses projets dans la région ».
Cependant, en dépit de l'escalade avec les pays arabes, le cheikh Kassem, qui s'exprimait à l'issue d'un entretien avec l'ambassadeur du Pakistan, Aftab Kawkar, a mis l'accent sur la nécessité, au plan libanais, de « maintenir les espaces de dialogue avec toutes les forces politiques et de protéger la stabilité et la paix civile ».

N. Moussaoui

Cette distinction entre l'escalade régionale et la volonté d'apaisement local était en revanche moins nette dans l'allocution incendiaire du député Nawwaf Moussaoui, qui a d'abord estimé que « les Libanais, et particulièrement les chrétiens, sentent actuellement que le Liban est solide et protégé contre Daech grâce à l'équation armée-peuple-résistance ». « Ce n'est pas l'Arabie qui le protège, mais l'armée libanaise (...), et les combattants du Hezbollah (...) », a-t-il indiqué.
« Celui qui se met en position de confrontation avec le Hezbollah se place dans un camp hostile aux Arabes et allié des sionistes. L'Arabie n'a jamais été qu'un poignard dans le dos de la nation arabe », a-t-il ajouté, estimant que Riyad est « à l'origine de tous les complots contre le nationalisme arabe ».
Faisant par ailleurs l'amalgame entre « la décision saoudienne de placer le Hezbollah sur la liste des organisations terroristes » et « les menaces de Daech contre les Libanais et les chrétiens », M. Moussaoui a estimé que les jihadistes sont « l'agent direct ou indirect de l'Arabie ».
Et de conclure sur une mise en garde nette au courant du Futur : « Nous appelons les Libanais à ne pas prêter l'oreille aux provocations saoudiennes, dans la mesure où cela portera atteinte à la stabilité interne, et le premier à en pâtir sera celui qui aura prêté l'oreille à ces provocations.
À nos partenaires nationaux, nous disons : si vous voulez la stabilité, restez loin de la provocation saoudienne, car ce régime ne déplore même pas ceux qui meurent pour défendre ses rancœurs personnelles (...). »

Source L'Orient le Jour