dimanche 27 mars 2016

Antisémitisme: le grand tournoi universitaire américain du mois de mars





Une Semaine de l’Apartheid israélien, une grande messe antisémite en réalité, est organisée en Mars dans des universités américaines de plus en plus nombreuses. Les administrations et les enseignants des campus n’apportent pas une réponse adéquate à ce défi éthique, même quand ils ne sont pas complices...







La Semaine de l’Apartheid israélien va peut-être s’inviter dans un campus près de chez vous. Ce qu’il faut, c’est un antidote contre cette maladie et surtout ne pas en être complice.
La folie du mois de mars ne se limite pas aux terrains de basket-ball. Ce mois-ci, les campus américains sont envahis par la dernière forme de brimades universitaires: la Semaine de l’Apartheid israélien. Les étudiants juifs devront passer devant des affiches et des spectacles qui déforment leur histoire, diffament leur foyer national, et déshonorent leur héritage religieux. Pendant ce temps les gens du campus qui ne sont pas complices de ce rituel feront semblant de ne pas voir l’humiliation qu’ils subissent.
Au cours de la dernière décennie, cette campagne annuelle peut se vanter d’une croissance remarquable dans le monde entier. Elle revendique à présent la participation de 150 villes et universités. Cette année, la campagne a déjà frappé le Royaume-Uni (du 22 au 28 février) et l’Europe (du 29 février au 7 mars).
Dans la première semaine de mars, la Semaine de l’Apartheid israélien s’est installée à l’Université Columbia. Des étudiants pour la Justice en Palestine ont érigé un « mur de l’apartheid » dans l’enceinte du campus. (« Notre revanche se lira dans les rires de nos enfants » disait un slogan). Le site Internet de la Semaine de l’Apartheid israélien dresse la liste des universités de tout le pays où des événements seront organisés. Le mois s’achèvera par un cérémonial à l’Université Rutgers.
Ces événements qui dénoncent la soi-disant répression des Arabes palestiniens par Israël sont une facette d’un front antijuif beaucoup plus large, dont le fer de lance universitaire est le mouvement Boycott, Désinvestissement, Sanctions (BDS). Ce courant s’inscrit dans le boycott initié par la Ligue Arabe en 1945. Il appelait toutes les personnes et institutions du monde arabe à « refuser toute transaction, distribution, ou consommation d’un produit ou d’un bien manufacturé sioniste quel qu’il soit. »
Si l’agit-prop des étudiants est sous la coupe de groupes associant des militants de gauche et des Arabes musulmans, comme le groupe pro palestinien de Columbia, le mouvement BDS est dans une grande mesure l’émanation d’enseignants de faculté, impliqués dans le champ des études moyen-orientales et le domaine des sciences humaines et sociales. Ces groupes ajustent leur discours agressif à l’encontre Israël aux références et aux tactiques des mouvements de protestation « progressistes ».
Ayant enduré de tels excès pendant des décennies, des Juifs américains se sont organisés récemment pour tenter d’endiguer cette marée. Le Conseil universitaire pour Israël et le Réseau d’Action universitaire ont rejoint des groupes existants dans les facultés comme l’Initiative Amcha ou le Centre Louis D. Brandeis pour les Droits de l’homme.
Ils apportent leur soutien dans les cas les plus flagrants de harcèlement des partisans d’Israël.
Un cas de ce genre a retenu l’attention du Centre Brandeis. Il met en cause l’Université du Connecticut où Andew Pessin, un professeur de philosophie a eu la témérité de critiquer les terroristes du Hamas en 2014. Une campagne de calomnie étendue à la totalité du campus s’en est suivie, où il a été taxé de racisme.
L’administration l’a critiqué aussi, au lieu de s’en prendre à ses détracteurs. Il n’a pas encore repris ses cours.
Au niveau des étudiants, Israel on Campus Coalition essaie de coordonner des groupes et des individus pour répondre aux activités anti-israéliennes par la diffusion d’informations et d’initiatives « pro-actives et pro-israéliennes ». Bien qu’elles soient bienvenues et nécessaires, ces actions ne peuvent pas à elles seules stopper la campagne de diffamation, d’autant que les Juifs n’ont jamais été capables d’empêcher la mise en œuvre de projets politiques hostiles.
Les agents de l’antisémitisme sont des antisémites.
S’ils ne sont pas soumis à un contrôle minutieux, ils atteignent leurs objectifs. Accuser Israël de la souffrance des Arabes palestiniens est fondamentalement une stratégie de contournement. Son but véritable est de détourner l’attention des dysfonctionnements des sociétés arabes et musulmanes. C’est ce qu’elle réussit à faire.
Où sont les manifestations des campus pour les droits des femmes en islam, où sont les aides aux réfugiés syriens, où est la vigilance en faveur des chrétiens victimes de l’État islamique? Où est l’indignation des historiens, des archéologues, et des anthropologues devant la destruction de monuments antiques et de sociétés indigènes par des musulmans radicaux, alors qu’il est de leur devoir, en principe, de les défendre?
Les administrations universitaires et les facultés ont été complices de cette plaie, permettant à des allégations antijuives de masquer les autres formes de racisme et de fleurir à leur place. Les responsables administratifs invoquent avec hypocrisie la liberté d’expression pour défendre les membres du corps enseignant qui expriment ostensiblement leur opposition à Israël dans un habillage « universitaire. »
À présent, des disciplines entières utilisent les séminaires de l’université pour attaquer l’État juif. Les cartels anti-israéliens des campus exploitent les libertés d’expression et de réunion pour s’en prendre au seul pays du Moyen-Orient qui garantit l’exercice de ces libertés.
Quand les enseignants accepteront-ils d’affronter cette corruption débile de leur métier et de l’institution professorale ?
Israël est à tout point de vue une « nation start-up » très exemplaire, mais faire l’éloge de ses qualités éminentes ne permet pas de l’emporter sur les manœuvres de la Semaine de l’Apartheid israélien et du mouvement BDS. La campagne actuelle pour les élections américaines a montré clairement le pouvoir supérieur des argumentations négatives sur les idées, même si elles sont positives et bien exprimées. L’antisémitisme est la forme suprême des discours négatifs.
Il fleurit parce que le public pense qu’il n’y a pas d’enjeu pour lui dans ce conflit. Il choisit donc de ne pas défier les militants, faute aussi de n’avoir pas sérieusement recherché un antidote. Si les sociétés occidentales avaient consacré aussi peu d’attention aux maladies infectieuses que celle qu’elles accordent à la pandémie de l’antisémitisme, des dizaines de millions de gens seraient en train de mourir du choléra ou de la peste bubonique.


Titre original : March Madness, the Anti-Semite Bracket
Auteur : Ruth R. Wisse Ancien professeur de Yiddish et de littérature comparée à Harvard, elle est l’auteur de “Les Juifs et le pouvoir” (Schocken, 2007) et “Sans blague : comment faire de l’humour juif” (Princeton, 2013)
Première publication: le 23 mars 2016, Wall Street Journal
Traduction : Jean-Pierre Bensimon


Source fim13


Source Tribune Juive