mardi 2 juillet 2013

Julien Clerc chantera en Israël malgré les pressions

 
 
Le chanteur, qui doit donner un concert à Tel-Aviv le 7 juillet, explique au "Nouvel Observateur" pourquoi il se produira. Julien Clerc donnera bien, comme prévu, un concert Symphonique à Tel-Aviv le 7 juillet prochain. Et ce, malgré les pressions que l’artiste subit de la part du BDS (Boycott Desinvestissement Sanctions), cette association créée par la société civile palestinienne au début des années 2000, visant à faire peser sur Israël toutes sortes de pressions, qu’elles soient économiques ou culturelles.

Des membres de cette organisation, qui se présente donc comme la "réponse citoyenne et non violente à l’impunité d’Israël ", ont manifesté devant le Shepherds Bush Empire de Londres où le chanteur se produisait le 8 mai dernier. D’autres sont intervenus dans le même but à Paris devant le Châtelet les 13, 14 et 15 mai.
Sur Internet, Julien Clerc qui est par ailleurs ambassadeur de bonne Volonté au HCR (Haut Commissariat des Nations unies chargées des réfugiés) depuis octobre 2003, est à ce titre pris à parti au nom des 4 millions de réfugiés palestiniens : "Le rôle que vous assumez comme ambassadeur n’est-il pas aussi celui de porte-parole pour les droits de ces millions de personnes déracinées par la force ? "
Nombre de personnalités internationales (Paul Mc Cartney, Madonna, Leonard Cohen et bien d’autres) ont chanté en Israël malgré les pressions. Seule Vanessa Paradis avait suscité la polémique en annulant son concert prévu à Tel-Aviv en février 2011.
Julien Clerc, lui, compte bien honorer ce contrat. Il sera accueilli à bras ouvert à son arrivée en Terre Promise comme le lui a précisé la ministre de la Culture et des Sports, Limor Livnat, dans sa lettre du 8 mai 2013 : "Les Israéliens sont connus pour leur amour des arts et de toutes expressions culturelles, nombreux sont ceux parmi eux qui vous connaissent, vous aiment et vous admirent, et suivent votre longue et exceptionnelle carrière depuis 45 ans ".
 
Les explications de Julien Clerc
Julien Clerc ira donc à Tel-Aviv, il a accepté de nous dire pourquoi : "Quelques membres du BDS étaient présents devant la salle où je me produisais à Londres puis devant le Châtelet pour m’inciter à ne pas aller chanter le 7 juillet prochain à l’Opéra National de Tel-Aviv. J’ai aussitôt contacté Philippe Leclerc qui dirige le bureau français du HCR pour lui demander conseil et il m’a répondu qu’il n’y avait pas d’obstacle institutionnel pour moi à aller chanter à Tel-Aviv. Le HCR a d’ailleurs une antenne en Israël. Ce sera pour moi l’occasion de leur rendre visite et de connaître leur travail en faveur des réfugiés.
Pas question d’annuler ce concert même si j’ai en effet subi des pressions. Ces membres du BDS essayent de m’en dissuader mais pourquoi demander à un chanteur français de prendre partie dans un conflit que les chefs d’Etat des plus grandes nations n’ont pas réussi à régler ?
De ma fenêtre, je ne peux que prêcher la tolérance mutuelle et souhaiter qu’Israéliens et Palestiniens arrivent un jour à vivre ensemble.
Mais je le répète : ce n’est certainement pas un artiste français qui peut régler ce problème."
 
La réponse que BDS France a fait parvenir au "Nouvel Observateur" :
Suite à des erreurs et approximations dans l'article du Nouvel Observateur titré "Julien Clerc chantera en Israël malgré les pressions" et publié en date du 3 juin dernier, la Campagne BDS France tient à préciser plusieurs choses.
D'une part, il ne s'agit pas d'une "association créée par la société civile palestinienne au début des années 2000", mais bien d'une campagne initiée en 2005 par une coalition de 173 associations de la société civile palestinienne et qui s'est développée depuis lors à l'échelle internationale. Cette campagne "Boycott, Désinvestissement, Sanctions" contre le régime d'apartheid israélien s'inspire de la campagne victorieuse contre l'apartheid en Afrique du Sud.
En effet, en juillet 2005, soit un an exactement après l’avis de la Cour Internationale de Justice demandant le démantèlement du mur de l'apartheid construit par la puissance occupante israélienne, 173 organisations, forces syndicales et associations palestiniennes ont lancé l’appel au BDS, dont voici un extrait :
"Nous, représentants de la Société Civile Palestinienne, invitons les organisations des sociétés civiles internationales et les gens de conscience du monde entier à imposer de larges boycotts et à mettre en application des initiatives de retrait d’investissement contre Israël tels que ceux appliqués à l’Afrique du Sud à l’époque de l’Apartheid. Ces mesures de sanction non-violentes devraient être maintenues jusqu’à ce qu’Israël honore son obligation de reconnaître le droit inaliénable des Palestiniens à l’autodétermination et respecte entièrement les préceptes du droit international".
Loin de "menaces" que jamais aucun membre de la Campagne BDS n'a exercé à l'encontre d'artistes, notre démarche vise à informer et sensibiliser les artistes et intellectuels qui sont invités à participer à la vie culturelle israélienne, les incitant à la réflexion sur le sens de cette participation qui est aujourd'hui un acte politique.
Il aurait été ensuite juste au niveau factuel de préciser que Vanessa Paradis est très loin d'être la seule artiste à avoir annulé son concert à Tel Aviv.
De nombreuses artistes de premier plan ont refusé de jouer en Israël, dont Elvis Costello, Carlos Santana, Eric Clapton, U2, Coldplay, Bruce Springsteen, Cat Power, Roger Waters, Cassandra Wilson, Stanley Jordan, Devendra Banhart, Annie Lennox, Natacha Atlas, Brian Eno, Massive Attack, Gorillaz Sound System, The Pixies, Tuba Skinny, Pete Seeger, feu Gil Scott-Heron, Jello Biafra…
Dernièrement, c'est le célèbre physicien Stephen Hawking qui a refusé de participer à une conférence en Israël.
Cette liste de personnalités soutenant la campagne BDS est très loin d’être exhaustive, nombreux étant ceux qui ont choisi d'être du côté de la justice et du droit.
 
La réponse de la Campagne BDS France aux explications de Julien Clerc :
Cher Julien Clerc,

Vous dites que vous irez chanter en Israël car le HCR à qui vous avez demandé conseil a indiqué "qu'il n’y avait pas d’obstacle institutionnel à aller chanter à Tel-Aviv".
S'il n'y a pas "d'obstacle institutionnel", vous, le chanteur engagé, ne pouvez ignorer ce que signifiera votre concert à Tel Aviv en termes de caution donnée à la politique israélienne et de déni de la réalité de l'occupation, de la colonisation et du système de discriminations mis en place par cet État.
Israël se sert -et le revendique- des artistes étrangers pour tenter de blanchir ses crimes de guerre contre la population palestinienne sous sa domination.
Cher Julien Clerc, vous ne souhaitez probablement pas ségrégué votre audience et vos fans, mais Israël le fait. Nous ne pouvons imaginer que vous puissiez accepter cette situation… "A quoi sert une chanson si elle est désarmée ?
Vous dites aussi :
"Pourquoi demander à un chanteur français de prendre partie dans un conflit que les chefs d’État des plus grandes nations n’ont pas réussi à régler ?"
Cher Julien Clerc, n'est-ce pourtant pas l'insuffisance de ces mêmes chefs d’État que votre rôle d'ambassadeur de bonne volonté au HCR vient suppléer ?
Les chefs d’État ne font pas tout et c'est précisément parce que dans ce conflit en particulier, la communauté internationale ne joue pas son rôle que la campagne citoyenne BDS a été initiée. Elle repose sur l'idée que chaque citoyen du monde peut, et doit agir, pour la justice et la paix sans attendre son chef d’État. C'est cette idée et la désillusion face à leurs dirigeants qui conduit aujourd'hui en Israël même, les anti-colonialistes à appeler à boycotter leur propre Etat et à vous écrire pour vous demander de ne pas venir jouer en Israël :
"Tel Aviv est la nouvelle Sun City, et nous demandons à des artistes comme vous de ne pas jouer dans cette ville. Comme l'Afrique du Sud de l'apartheid, le gouvernement israélien essaie d'exploiter les représentations et concerts internationaux en Israël, comme le vôtre, pour faire passer le pays pour un 'lieu cool, amical et démocratique'. Au vu de ce qui précède, nous voudrions vous demander de ne pas vous produire en Israël pour l'instant.
Nous avons tous un rôle à jouer et surtout vous, qui en tant qu'ambassadeur au HCR ne pouvez ainsi dire :
"De ma fenêtre, je ne peux que prêcher la tolérance mutuelle et souhaiter qu’israéliens et Palestiniens arrivent un jour à vivre ensemble."
Desmond Tutu, prix nobel de la Paix, fervent soutien de la Campagne citoyenne BDS déclarait :
"Rester neutre face à l'injustice, c'est avoir choisi son camp."
Resterez vous neutre face à l'injustice cher Julien Clerc ? Nous espérons sincèrement que non, et nous vous réitérons notre demande de rencontre.

Source Tempsreel.Nouvelobs