mardi 7 juin 2016

Elle était l’agent de liaison de Jean Moulin...






L’inauguration de la résidence Alice-Rosenstiehl, samedi 4 juin, a été l’occasion de mettre en lumière la destinée exceptionnelle de Jeanne Boullen, qui entra elle aussi en résistance, on peut le dire, pour les beaux yeux de Jean Moulin, dont elle sera l’agent de liaison jusqu’à l’arrestation de celui-ci, le 21 juin 1943 à Caluire près de Lyon...







Dans son discours, André Sehet, président des Racines calcéennes, a retracé la vie de cette Picarde que la guerre a jetée dans la bataille contre le nazisme et qui, comme Alice Rosenstiehl, a fait son devoir avant de retomber dans l’anonymat une fois la guerre finie.
Chargée de la crèche et de la garderie d’enfant, Alice Rosenstiehl a gardé Samuel, l’enfant que Jeanne Bollen a eu avec un poète juif nommé Frantz Neumann. Ce qui lui vaudra la médaille de Juste parmi les nations.

Ses souvenirs dans un cahier d’écolier


En 1996, en Israël, Samuel retrouve une valise dans laquelle son frère, Léonard, range les papiers de sa mère décédée en 1971. «  Dans cette valise, il y a du courrier, jamais ouvert, et un cahier où Jeanne notait tous les jours ses souvenirs. C’est grâce à ce cahier que nous avons pu refaire le parcours de Jeanne, de sa famille, d’Alice et de Jean Moulin. Grâce à ces notes, Jacques Baynac a fait un livre  ».
Infirmière hospitalière, Jeanne Boullen assurait des visites à Saint-Léger-lès-Domart.
Avec le soutien du docteur Mans, elle fut responsable des infirmières à la préfecture.
En mai 1940, Jeanne et ses collègues foncent sur Abbeville au secours des populations. Peine perdue, les services de santé se replient vers Paris, puis sur la préfecture de Chartres où Jeanne retrouve Jean Moulin, qui avait été secrétaire général de la préfecture de la Somme.
Pendant trois ans, le destin de Jeanne Boullen suivra la trajectoire du grand patriote, qui l’appellera « petit Bollen ». Il en fera son agent de liaison. Elle revient à Ailly et rédige de faux papiers le soir dans les bureaux de la mairie. Elle organise des réseaux de passage, accompagne l’évasion de pilotes anglais, revient en France en sautant en parachute. Se blesse à l’atterrissage. Elle est faite prisonnière à la citadelle de Doullens. S’en évade. Se cache chez des fermiers d’Hangest-sur-Somme…
Voila la vie que mènera Jeanne Boullen jusqu’à la naissance de son premier enfant et l’arrestation de Jean Moulin.
Après la guerre, Jeanne suit son mari en terre promise. Elle, protestante, s’est mariée en 1942, à Frantz, le Juif, au nez et à la barbe des Allemands, grâce à la complicité d’un greffe de Marseille.
Ne s’habituant pas au climat, elle revint en France en 1950, pour y reprendre son activité d’infirmière. De la vie de Jeanne Boullen, Jacques Baynac en a tiré un livre L’amie inconnue de Jean Moulin, une édition épuisée qui ne sera pas ré-imprimée, mais bientôt consultable sur le net.


De notre correspondant PIERRE PECQUET


Source Courrier Picard