Question : "Depuis ma plus tendre enfance, j'ai toujours vu mes grands-parents manger cachère. Néanmoins, ayant évolué parmi les non-juifs dans un milieu essentiellement laïc, j'ai pris l'habitude de faire attention à mon alimentation mais sans me soucier de quelconques considérations religieuses. En fait, je me suis toujours demander: à quoi cela sert-il de manger cachère ? Aux yeux de D.ieu, est-il si important que nous, simples mortels, mangions de tel ou tel aliment ?".....
Réponse : Il est écrit dans la Torah (Vayikra 11, 43-45) : « Ne vous rendez point vous-mêmes abominables par toutes ces créatures rampantes, ne vous souillez point par elles, vous en contracteriez la souillure. Car Je suis l'Éternel, votre Dieu, vous devez donc vous sanctifier et rester saints, parce que Je suis saint, et ne point contaminer vos personnes par tous ces reptiles qui se meuvent sur la terre.Car je suis l'Éternel, qui vous ai tirés du pays d'Egypte pour être votre Dieu; et vous serez saints, parce que Je suis saint ».
1. Obstruction du cœur
Le Talmud (traité Yoma, 39a) affirme : « Il a été enseigné dans la Yéchiva de Rabbi Yishmaël : la faute obstrue le cœur de l’homme, comme il est écrit : "Vénitmétem Bam" ("vous serez impurs"). Ne lis pas "Vénitmétem Bam", mais "Vénitamtem", littéralement "vous serez bouchés". Nos Sages soulignent : si un homme décide de lui-même de devenir, ne serait-ce que légèrement impur, du ciel, on l’aidera à le devenir totalement. S’il entreprend d’être impur ici-bas, on finira de le rendre totalement impur du ciel, s’il se souille dans ce monde, on le souillera dans le monde futur. De même, ils affirment : « Vous vous sanctifierez et vous serez saints » : si un homme entreprend par lui-même de se sanctifier, on achèvera de le sanctifier du ciel. S’il se sanctifie dans ce monde-ci, on le sanctifiera dans le monde futur ».
2. S’habituer à l’impureté
Le 'Hafets 'Haïm (Commentaires sur la Torah, fin de la Paracha Chemini) donne l’image d’un parfumeur, contraint au fil du temps de vendre des peaux tannées dégageant une mauvaise odeur. Au début, cet homme s’en trouvait fortement indisposé. Toutefois, avec le temps, il s’accommoda peu à peu de ces odeurs nauséabondes, au point de ne plus y prêter la moindre attention, comme s’il avait toujours fait ce genre de commerce. De même en est-il de celui qui consomme des aliments interdits, au point de s’y habituer et d’obstruer son cœur et son âme du fait de l’impureté contractée par cette nourriture "impropre". Il lui sera alors très difficile de s’en extraire.
3. Devenir grossier
Il est écrit dans la Torah (Chémot 22, 30) : « Vous serez pour Moi, une Nation Sainte ».
Le Ramban (Na’hmanide) rapporte à ce propos qu’il est normal qu’un homme mange tout ce qui peut contribuer à le faire vivre. En fait, D.ieu n’a interdit certains aliments que pour préserver la pureté de l’âme, afin que l’homme ne consomme que des aliments sains, sans risque qu’ils lui fassent contracter orgueil ou vulgarité. C’est en ce sens qu’il est écrit : « Vous serez saints pour Moi », autrement dit : « Je désire que vous soyez saints, afin que vous soyez dignes de vous attacher à Moi. Puisque Je suis saint, vous ne devez pas souiller vos âmes par des aliments impurs ».
4. "Je vous ai distingué d’entre les peuples"
A propos du verset (Vayikra 11, 44) : « Vous vous sanctifierez et serez saints, car Je suis saint », Rabbénou Bé'hayé écrit que la sainteté dont il est fait mention, est spécifique au peuple juif. En effet,contrairement aux autres nations, son élévation résulte de la pratique de la Torah et des Mitsvot. C’est par leur accomplissement que le niveau intellectuel de ses membres croît et que les tentations qui les assaillent s’amenuisent. Il est clair que l’attirance que peut avoir l’homme pour les plaisirs de ce monde provient de sa nature, éminemment matérielle, et qu’elle guide, au premier chef son comportement général, reléguant la réflexion à un simple outil intellectuel.
Ses désirs sont ainsi inscrits dans son programme génétique depuis les premières années de sa vie, et vont croissant à mesure qu’il évolue jusqu’à prendre le dessus sur son intellect. A mesure que cette proéminence du désir s’attache viscéralement à l’homme, elle trouve notamment dans les délices du palais des "alliés fidèles" qui contribueront à finir de conquérir la volonté de l’homme.
A l’inverse, l’intellect est par essence de nature spirituelle, d’émanation céleste. De fait, il se trouve ici-bas tel un corps étranger, évoluant dans un monde physique, de naturegrossière et vulgaire. Dès lors, se trouvant isolé et dépourvu du moindre appui, il est abandonné.
En fait, peu à peu l’intellect s’affaiblit et le désir grandit, et ce pour deux raisons :
1. Parce que le désir se trouvait ancré en l’homme avant l’éclosion de son intellect.
2. Parce que le désir trouve des leviers à son développement, contrairement à l’intellect.
C’est pour cette raison que l’homme a besoin de la Torah et des Mitsvot, seules garanties du renforcement de son intellect au détriment de l’assouvissement de ses désirs. C’est dans cette perspective que D.ieu a émis les lois concernant les aliments interdits, les relations proscrites, l’astreinte à la prière, au jeûne, à la Tsédaka, aux actes de bienfaisance, destinées à lutter contre ces forces négatives.
C’est à ce propos que nos Sages disent dans le Midrach (Sifré) : « Vous vous sanctifierez ». Il s’agit de la Kédoucha (sainteté) dans l’accomplissement des Mitsvot, puis « Et vous serez saints », c’est-à-dire que par l’accomplissement des Mitsvot, l’homme affaiblit la force de la tentation et renforce sa faculté de réflexion.
Qui est appelé "Kadoch" ?
Par ailleurs, le commandement : « Vous vous sanctifierez » doit être interprété dans le sens de créer une "séparation", à savoir d’installer les conditions qui permettront de se séparer des plaisirs de ce monde afin d’être appelé "Kadoch" (saint).
Nos Sages expliquent ainsi les termes du verset (Vayikra 19, 2) : « Soyez saints, au même titre que Je suis saint », par l’aphorisme : « De même que Je suis "séparé" (de la matérialité), vous aussi devrez en être extirpés ». En d’autres termes, il faut que l’homme se sépare des plaisirs de ce monde et n’en fasse usage que par stricte nécessité. Car si l’homme donne libre cours à ses pulsions concernant la consommation de nourriture, de boisson ou de plaisirs charnels, il détruit ainsi son âme comme son corps, et est alors appelé selon les termes de la Torah, un "sot".
De fait, tous ceux qui s’efforcent de maîtriser leurs instincts au point de ne profiter que des éléments nécessaires à leur développement, allant jusqu’à se séparer de choses permises au sens strict de la loi sont appelés"Kadoch".
En revanche, s’ils s’emplissent à outrance de nourriture, même permise, s’abreuvent de vin et se gavent de viande, ils introduisent en eux les germes de la vulgarité qui les conduiront finalementà transgresser les préceptes saints de la Torah.
C’est pour cela que l’on nous enjoint d’être "saints", de veiller à créer une "séparation" entre notre personne et la matérialité qui nous entoure, à maîtriser nos penchants, à nous garder de trop manger ou boire, y compris ce qui est autorisé. De même, nous devons nous préserver de prononcer des paroles inconvenantes, comme il est écrit (Michlé 21, 23) : « Qui préserve sa bouche et sa langue préserve son âme de bien des tourments ». (D’après le Ramban [Na'hmanide])
Extrait du livre « Lois & Récits de CACHEROUTE » - Editions Torah-Box
Source Torah Box