vendredi 8 avril 2016

Paracha Tazria : Aucune plaie ne t’atteindra




Lorsque le peuple juif sortit d’Égypte, il reçut la promesse : « Si tu écoutes la voix de l’Éternel, si tu es fidèle à Ses préceptes et à toutes Ses lois, aucune des plaies dont J’ai frappé l’Égypte ne t’atteindra, car Moi l’Éternel Je te préserverai » (Chémot 15, 26). Déduction peut être faite de ce verset que si l’on ne se montre pas fidèle aux préceptes divins, on risque d’encourir de nombreux maux, destinés à réveiller notre conscience et à nous ramener sur le droit chemin dont nous nous sommes écartés...







Parmi les nombreuses maladies susceptibles de frapper le contrevenant à l’ordre divin, que D.ieu nous préserve, figurent les plaies de tsaraat. Ce mal était si implacable et violent que nos Sages disent à son sujet :
« Celui qui est frappé de tsaraat est considéré comme mort » (cf. Nédarim 64/b). Rav Chimchon Raphaël Hirsch (dans son commentaire sur Vayikra 13, 1) explique que le terme « néga » [plaie], que la Torah emploie dans le contexte de la tsaraat, indique qu’il ne s’agit pas là d’un mal ordinaire,
 semblable à toutes les autres maladies. La tsaraat est bien un mal émanant d’un ordre divin, exprimant la situation fâcheuse danslaquelle se trouve l’homme et où D.ieu doit
 intervenir pour le châtier de ses fautes. Certes, aucune vicissitude de notre vie n’arrive « par hasard », tout n’est que décret divin survenant en fonction du Jugement
 que Lui seul sait rendre de manière parfaite et sans le moindre défaut. Et malheureusement, il arrive souvent que l’on soit incapable de pointer du doigt la « cause » qui attire
 jusqu’à nous toutes ces douleurs. Mais la tsaraat fait exception à cette réalité, puisque l’on pouvait savoir très précisément pour quelles raisons elle survenait, comme
 l’indiquent nos Sages : « Rav Chmouel bar Na’hmani dit au nom de Rabbi Yo’hanan : Pour sept raisons la plaie de tsaraat pouvait survenir : à cause de la médisance, du
 meurtre, du faux serment (…) et de la mesquinerie
» (Erkhin 16/a).
 Tout porte à croire que ces indications laissées par nos Sages avaient deux objectifs : premièrement, nous mettre en garde face à ces fautes, pour nous éviter de devenir les victimes de la tsaraat. Et ensuite, pour apprendre à la personne déjà frappée par ce mal quelles sont les fautes dont elle s’est rendue coupable, et lui permettre de
 s’amender afin de trouver la voie de la guérison. Liés à la Source de vie Nos Sages enseignent dans ce contexte :
« Le Maître de la miséricorde ne frappe jamais les âmes en premier » (Vayikra Rabba 17, 4). Même lorsqu’un homme commet une faute justifiant un châtiment, le Saint béni soit-Il ne S’en prend pas d’abord à sa personne. C’est la raison pour laquelle la toute première plaie de tsaraat survenait, en premier lieu, sur les murs de la maison.
 Si l’homme ne comprenait pas le message que la plaie véhiculait, celle-ci se rapprochait de lui et s’attaquait alors à ses propres vêtements. Et c’est seulement à l’étape suivante,
 s’il s’entêtait dans sa rébellion, que des lésions apparaissaient sur son corps. Mais même à ce niveau-là, tout espoir n’était pas encore perdu et la personne incriminée peut trouver la voie de la rédemption, que ce soit par elle-même ou par son entourage. Le Talmud (Moed Katan 5/a) apporte en effet une interprétation sur le verset de notre paracha : « ‘Le lépreux chez qui l’affection est constatée doit avoir le vêtement déchiré (…) et devra crier : Impur ! Impur ! » Pourquoi ces cris ? Nos Sages
 en déduisent que « l’homme doit faire connaître ses souffrances publiquement, afin que la communauté implore la miséricorde en sa faveur ». Comme nous l’avons
 vu, la mise en quarantaine du lépreux était destinée à l’amener à une solide introspection, pour qu’il prenne conscience de ses écarts de conduite et qu’il prie le
 Saint béni soit-Il de le guérir. Mais ceci n’était pas forcément suffisant, compte tenu du principe : « Un prisonnier ne peut se libérer lui seul de sa cellule » - seule une personne intervenant de l’extérieur est capable d’ouvrir la porte du « cachot » et de la rédemption. À plus forte raison est-ce vrai s’agissant de l’homme frappé de tsaraat,
 confiné dans sa douleur et sa triste situation, qui aura certainement du mal à trouver lui seul la sérénité nécessaire pour prier convenablement. C’est la raison pour laquelle il devait annoncer son impureté publiquement, pour que ses proches et son entourage le prennent en pitié et invoquent
 la Miséricorde divine en sa faveur.
 Alors certes, bien que nous ayons vu que le lépreux est considéré comme un mort, il n’en reste pas moins que, comme l’annonce Kohélèt, « qui demeure dans la société des vivants peut avoir quelque espoir, car un chien vivant vaut mieux qu’un lion mort » (9, 4). Le fait que le lépreux soit encore en vie est bien la preuve que tout espoir n’est
 pas perdu, et en dépit des terribles difficultés qu’il traverse, il peut encore trouver le chemin de la réhabilitation et de la rédemption. Rabbi Ye’hezkiel de Kozmir illustrait ce
 propos à l’aide d’une parabole. Ceci est semblable à un oiseau qui s’est pris les pattes dans la fange et ne parvient pas à se dépêtrer. Tant que les ailes du volatile restent à l’extérieur de la boue, il peut encore les agiter vigoureusement et essayer de s’envoler.

Mais s’il continue à s’enfoncer davantage au point que même ses ailes sont désormais couvertes de boue, il n’aura plus aucune possibilité de s’extraire par ses propres moyens de l’étau qui l’emprisonne. Mais l’espoir ne sera pas pour autant perdu, tant que sa tête et son bec resteront à l’air libre, car il pourra encore faire entendre sa voix et appeler à l’aide, pour que ses congénères viennent le tirer de son mauvais pas…


Par Yonathan Bendennnoune


Source Chiourim