Alors que samedi soir des roquettes ont à nouveau été tirées depuis le Liban sur Israël, il va être intéressant d'observer l'état des affaires politiques du pays. Il manque aujourd'hui plus de quinze mille employés dans les institutions publiques au Liban. C'est ce qui été annoncé ces derniers jours par une organisation qui œuvre pour l'expansion de la présence chrétienne dans le pays (LABORA)...
Selon les rapports, dont le but est d'accroître l'intégration des communautés chrétiennes au Liban dans les institutions publiques officielles, il manque 5.000 soldats à l'armée; 1.000 recrues dans les services de sécurité, et plusieurs autres centaines dans les départements de sécurité de l'Etat et aux frontières. Mais ce ne sont pas seulement les forces de sécurité et les organismes gouvernementaux qui sont dépourvus de Chrétiens. Il manque aussi un citoyen chrétien libanais, à un poste de niveau: celui de président.
Depuis trois mois, il n'y a pas de président à Baabda, le palais présidentiel à Beyrouth. Les parties adverses au parlement libanais ne sont pas parvenues à un accord sur l'identité du prochain président, qui doit être un Chrétien maronite, selon la coutume du pays depuis sa création, et selon les accords qui permettent aux différentes communautés de soutenir l'existence de l'État.
La migration massive des Chrétiens libanais en quête d'un avenir, et le faible taux de natalité a affaibli leur présence dans l'espace public et dans les institutions du pays.
Ils ont besoin d'autres minorités pour élire un président: le bloc dirigé par le Hezbollah soutient la candidature du député Michel Aoun, alors que leurs adversaires soutiennent d'autres candidats, tels que Samir Geagea.
Un seul tour a eu lieu il y a quelques semaines. La majorité requise des deux tiers n'a pas été atteinte. Le parlement ne s'est pas à nouveau réuni pour élire le président, bien que la loi prévoie qu'une simple majorité soit suffisante pour un second tour. Et le Liban est entré dans une paralysie politique interminable des dernières décennies. Cela ne signifie pas que les consultations se sont arrêtées. Chaque jour, des réunions ont lieu entre différents dirigeants de communautés diverses, il y a des initiatives ici et là, on écrit des mots, des ébauches, mais il n'y a pas d'accord. Une des questions posées ces jours-ci est de savoir s'il faut dissoudre le Parlement actuel, et organiser de nouvelles élections générales.
Mais la vérité est que l'énergie dépensée sur le sujet a largement été gaspillée. Tout d'abord, les pouvoirs du président libanais sont très limités et sont surtout symboliques. Deuxièmement, en l'absence d'un président au palais de Baabda, ses fonctions sont assumées par le Premier ministre. Troisièmement, et c'est le point le plus important, les principales décisions du pays sont prises en dehors des centres des pouvoirs habituels.
Pendant de nombreuses années dans le monde arabe, on a fait l'éloge de la gouvernance libanaise. Mise à part les années de guerre civile, on peut en effet dire que la vie politique au Liban est tout à fait libre. La liberté d'expression est large, chaque mouvement politique a ses propres médias, et la liberté et la sécurité sont assez élevées. Au Liban, la vie culturelle est peut-être l'une des plus riches et des plus sophistiquées dans le monde arabe. Mais une chose empêche le Liban d'être une démocratie florissante, c'est le fait que le gouvernement du Liban n'a pas le monopole du pouvoir.
Pendant de longues années, des zones de son territoire ont été sous le contrôle des armées de ses voisins : Israël et en particulier la Syrie. Au cours des dernières années, à plusieurs reprises, des factions politiques et religieuses se sont battues les unes contre les autres.
Le Hezbollah est le seul organisme libanais qui a agi de façon planifié et organisé contre des personnes en dehors du territoire libanais : contre Israël et contre la Syrie, contre les opposants syriens et les responsables violents et armés de l'opposition syrienne sunnite. Ces derniers jours, il a également aidé l'armée libanaise à lutter contre ces mêmes extrémistes islamiques sunnites qui ont fait irruption sur le territoire national dans la ville de Arsal.
En l'absence d'un monopole sur le pouvoir, le gouvernement libanais est faible et limité. Les questions véritablement importantes, et les questions de politique étrangère et de défense, ne se règlent ni dans les couloirs du gouvernement, ni au Parlement, ni dans le palais de Baabda. Aucune loi ou responsable n'a perturbé l'organisation du Hezbollah, la plus importante dans le pays, qui a mis en place au cours de la dernière décennie un système économique global parallèle qui comprend des projets immobiliers, des moyens de communication et bien-sûr une présence militaire sans précédent, au cœur de zones peuplées du pays, violant ainsi la souveraineté de l'Etat.
Sous son autorité, diverses organisations palestiniennes tirent de façon sporadique sur Israël depuis le sud du Liban, comme ils l'ont fait hier soir
Le Hezbollah continue de se préparer à une confrontation avec Israël, son principal ennemi. Pour cette raison, ce qui se passe aujourd'hui à Gaza et la façon dont Israël agit contre les forces de la guérilla qui opèrent au cœur des populations civiles est beaucoup plus importante pour l'avenir de Beyrouth, que de savoir qui sera le prochain président. Aucun président ou Premier ministre libanais n'a interféré ou n'interférera sur le fonctionnement de l'organisation, et c'est pour cette raison que vous pouvez relâcher votre souffle : l'identité du prochain président et l'annonce de la date de son élection ne changeront pas vraiment la situation dans ce pays.
Source I24News