Si le réacteur à eau lourde d'Arak en Iran devenait opérationnel, il sera impossible de le bombarder sans causer une catastrophe nucléaire majeure, a rapporté le site du magazine américain TIME mercredi. Alors que les projecteurs des négociations en cours sur le programme nucléaire iranien entre les pays occidentaux et l'Iran sont tournés vers les centrifugeuses et l'enrichissement d'uranium, l'Iran a également tracé une deuxième voie capable de produire une bombe non pas à partir d'uranium enrichi, mais à partir de plutonium.
Le composant chimique pourrait être produit à l'aide d'un réacteur à eau lourde dont la construction est en voie d'être achevée dans les collines de la ville d'Arak, à 300 km de Téhéran. L'eau lourde est de l'eau avec un neutron supplémentaire, utile pour modérer la réaction nucléaire.
C'est parce que sa construction n'est pas achevée que le réacteur d'Arak est resté en dehors de la controverse sur le nucléaire iranien. Pourtant, note le TIME, sa construction progresse de jour en jour et une fois prêt, il serait impossible de le bombarder. Selon les termes d'Amos Yadlin, qui a piloté l'un des F16A qui a bombardé le réacteur à eau lourde Osirak en Irak en 1981, "quiconque pense attaquer le réacteur [à eau lourde] actif est disposé à provoquer un nouveau Tchernobyl, et personne ne souhaite cela".
En réponse à un rapport déposé en mai par l'Agence internationale de l'Énergie atomique (AIEA) qui soulevait des interrogations sur l'usine d'Arak, l'Iran a déclaré à l'agence de l'ONU se préparer à utiliser le réacteur pour réaliser un test. Au lieu d'insérer des barres de combustible réels remplis avec de l'uranium dans le cœur du réacteur, où la fission nucléaire se produit, ils inséreraient un combustible factice. Ils ont également avancé qu'au lieu de pomper de l'eau lourde dans le réacteur pour modérer la réaction nucléaire, ils envisageaient d'utiliser de l'eau "normale".
Ces explications ne sont pas convaincantes pour beaucoup d'experts. Plusieurs y voient plutôt une ruse de la part de la république islamique.
C'est l'avis d'Ephraim Asculai, un scientifique à la retraite de la Commission de l'énergie atomique d'Israël. Il a averti que l'Iran n'a pas l'intention d'effectuer un "test" et qu'il s'agit selon lui d'une couverture pour camoufler d'autres intentions.
L'Iran serait plutôt en train de rendre le réacteur opérationnel avant que le reste du monde le sache, afin qu'il devienne ensuite impossible de le détruire. "A ce stade-ci, ils sont dans la "zone d'immunité", comme on appelle", a affirmé Asculai au TIME.
Mark Fitzpatrick, ancien chef du département d'Etat américain pour la non-prolifération et maintenant membre de l'Institut international d'études stratégiques de Londres, estime que l'usine d'Arak devrait également faire partie des discussions de Genève sur le nucléaire iranien. "Le réacteur d'Arak est de plus en plus pertinent (...) et c'est quelque chose qui devrait être sur la table à Genève".
L'Iran affirme que l'usine d'Arak est destinée à produire des isotopes pour une variété d'utilisations médicales. Mais le réacteur est beaucoup plus gros que nécessaire et s'il est devenait opérationnel, générerait suffisamment de plutonium pour alimenter deux armes nucléaires par an.
Extraire le plutonium nécessiterait cependant une autre étape, soit l'ajout d'une installation d'extraction, que l'Iran n'a pas encore construit, "mais il ne serait pas impossible de l'obtenir sur le marché noir ou plus probablement, de la Corée du Nord », selon Fitzpatrick.
Source I24News