dimanche 27 octobre 2019

Ce que la République française doit aux juifs de l’Est


Beaucoup de ceux qui ont fait la France aux XIXe et XXe  siècles sont issus de familles juives d’Alsace et de Lorraine. Au-delà de ce constat, le colloque « L’éclat et l’écart », organisé mercredi et jeudi à la Région, s’est efforcé de lutter par la connaissance contre un antisémitisme qui ne cesse de renaître........Détails........



Léon Blum, Émile Durkheim, Claude Lévi-Strauss, Raymond Aron, Claude Vigée, Michel Debré, le mime Marceau, Pierre Dac, Tristan Bernard… Par la politique, l’humour, l’art et la science, ces personnalités ont fait la France des XIXe et XXe  siècles. 
Elles sont nombreuses, multiples, mais elles ont un point commun : leurs racines remontent aux communautés juives d’Alsace et de Lorraine. 
Leurs noms ont été cités, parmi bien d’autres, mercredi et jeudi, au fil des interventions, dans l’hémicycle de la Maison de la région, à Strasbourg ; s’y tenait un colloque mettant en exergue ce formidable vivier que fut pour la France, et à travers elle l’Europe, le judaïsme des marches de l’Est.
« Chaque fois que la France a dû reconstruire son modèle républicain, les juifs d’Alsace et de Lorraine ont joué un rôle », a relevé dans un propos introductif enregistré le président de la région Grand Est Jean Rottner, citant notamment l’influence d’Émile Durkheim sur les républicains du début XXe et la conception de la Ve  République par Michel Debré. 
« Mais cette rencontre n’est pas simplement un rendez-vous scientifique, a averti le président. Au moment où l’antisémitisme refait surface, c’est un colloque politique… »

Aller au-delà de la condamnation morale

Cette idée a été précisée par son président de la commission Culture, Pascal Mangin. 
Ce colloque, a expliqué ce dernier, est né « d’une discussion après la profanation du cimetière de Quatzenheim », en février, et d’une conviction : « Désormais, les responsables publics ne doivent plus se contenter d’une condamnation morale : il faut traiter le mal par la racine. » 
Comment ? En montrant tout ce que la République doit aux juifs. En prouvant que cette spécificité profite à tous. 
En martelant, comme le président de l’université de Strasbourg Michel Deneken, par ailleurs théologien et prêtre catholique, cette évidence dont il faut se réjouir : « Nous ne pouvons pas ne pas vivre ensemble ! »
Ce colloque a été imaginé avec Émile Malet, de la revue Passages , et le sociologue Freddy Raphaël, professeur émérite de l’université de Strasbourg. Il a attiré un auditoire conséquent, venu écouter des intervenants d’un excellent niveau, parmi lesquels on peut aussi citer la sociologue Dominique Schnapper (fille de Raymond Aron) et le grand rabbin du Bas-Rhin Harold Avraham Weill.

« Où en sommes-nous de cet idéal ? »

Le titre retenu pour ce colloque était beau et énigmatique : « L’éclat et l’écart ». Chacun de ces deux mots est ambivalent. 
L’éclat, c’est la brillance des personnalités citées plus haut, « mais, a fait remarquer Michel Deneken, ce mot fait aussi penser à la Nuit de cristal », donc aux persécutions nazies. 
L’écart évoque la tension créatrice, chez les juifs, entre la communauté et l’universel, la Torah et les lois nationales. Mais le mot suggère aussi la mise à l’écart… 
Comme l’a souvent démontré Freddy Raphaël, l’Alsace et la Lorraine furent, pour les juifs, un havre paradoxal : ils ont pu y passer de l’accueil à l’expulsion. « Dès 1937, il y avait des vitrines brisées et des tags antisémites dans la Grand-Rue, à Strasbourg… »
La folie nazie n’a pas tué l’antisémitisme. Aujourd’hui, constate Michel Deneken, il y a des endroits où, publiquement, « il devient difficile de parler d’Israël », et ce vieil antisémitisme prospère sous les mots « cache-sexes » d’antisionisme et d’antijudaïsme. 
Ainsi, ce colloque était aussi, a remarqué Pascal Mangin, une façon de s’interroger sur l’état de notre République en 2019 : « Où en sommes-nous de cet idéal si fragile, si précaire ? »
L’élu a dédié ce colloque à Freddy Raphaël. Mercredi, le sociologue n’a caché ni son plaisir, ni son émotion de présider un tel moment : « Ce qui a été mon cheminement trouve son sens…
Ce colloque démontre une volonté de connaître, de se rencontrer, de se retrouver. 
La statue de la Synagogue, à la cathédrale, est représentée avec les yeux bandés : en quelque sorte, ce voile, aujourd’hui, vous l’avez arraché ! »

Source L'Alsace
Vous nous aimez, prouvez-le....


Suivez-nous sur FaceBook ici:
Suivez nous sur Facebook... 
Sommaire
 Vous avez un business ?