En visitant dimanche 17 janvier la Synagogue de Rome, le pape François a rappelé combien depuis l'Argentine, les relations avec le monde juif lui «tiennent à cœur» car «un lien spirituel s'est alors créé» favorisant «un authentique rapport d'amitié» et «un engagement commun»...
Comme ses deux prédécesseurs - Jean-Paul II est venu en ce lieu en 1986, Benoît XVI en 2010 - François voit donc les chrétiens et les juifs «comme frères et sœurs devant notre créateur», il fut très applaudi à ce moment du discours et a pu se féliciter de voir «l'indifférence et les oppositions» d'hier transformées en «collaborations et bienveillance» et les anciens «ennemis et étrangers» devenus «amis et frères».
D'où ce premier appel du pape: «dire ‘non' à toute forme d'antisémitisme, à toutes injures, discriminations et persécutions qui en découlent». En mémoire notamment des «six millions» de morts» de la Shoah «parce qu'ils appartenaient au peuple juif». François a redit au passage «sa proximité avec tous les survivants» de ce drame. Il a particulièrement honorés certains rescapés juifs italiens, présent dans la Synagogue en évoquant avec grande émotion la rafle romaine du «16 octobre 1943».
Mais l'évêque de Rome a également encouragé chrétiens et juifs à «persévérer» pour relever de nouveaux «défis» dont celui de l'Ecologie mais aussi celui de «la violence de homme sur l'homme qui est en contradiction avec toute religion digne de ce nom, en particulier dans les trois grandes religions monothéistes». Le pape qui a redit que «la vie, un don de Dieu, est sacrée. Le cinquième commandement du décalogue demande de ne pas tuer», n'a toutefois pas nommé l'islam radical tout comme il évita de le faire, lundi 11 janvier, devant le corps diplomatique accrédité près le Saint-Siège.
L'islam ne fut pas nommé non plus par Riccardo Di Segni, le grand rabbin de Rome - visiblement très ému par cette rencontre alors qu'il avait pris des distances avec ce pape au début du pontificat - qui a considéré cette visite comme un «message bénéfique pour le monde entier» afin de lutter contre «l'urgence des temps» en Europe et au Moyen-Orient, à savoir la «guerre et le terrorisme» qui sont motivés par une «vision fanatique inspirées de la religion» et qui conduisent à des «persécutions religieuses».
Pour sa part, Ruth Dureghello, la présidente de la communauté hébraïque de Rome qui fut la première à prendre la parole, a fortement insisté sur «la responsabilité» des «juifs et des catholiques» pour «combattre les maux de notre temps» mais elle a été beaucoup plus explicite.
Evoquant les violences subies contre les juifs en Israël elle a lancé: «nous réaffirmons avec force que l'antisionisme est la forme la plus moderne de l'antisémitisme». En effet, «la paix ne peut pas se conquérir en semant la terreur avec les couteaux à la main, elle ne peut pas se conquérir en versant le sang dans les rues de Jérusalem, de Tel-Aviv ou de Sderot.»
Et de poser cette question: «Pouvons-nous construire un processus de paix en comptant les morts du terrorisme? Non. Nous devons tous dire au terrorisme de s'arrêter. Non seulement au terrorisme de Londres, de Bruxelles, de Paris mais aussi celui qui blesse tous les jours Israël.»
Evoquant le «terrorisme islamique» elle a conclu: «nous ne pouvons être spectateurs» car «nous avons une grande responsabilité face au monde, face au sang versé par la terreur en Europe et au Moyen-Orient, face au sang des chrétiens persécutés, et face au sang des attentats perpétrés contre des civils innocents, y compris dans le monde arabe et face aux crimes commis contre les femmes» car la «foi ne génère pas la haine, le foi ne répand pas le sang, la foi réclame le dialogue».
Un travail à mener, selon cette femme juive, en «collaboration avec l'islam» qui a donc formé le vœu que «le message» que cette troisième visite d'un pape à la synagogue de Rome puisse aussi «atteindre les musulmans».
Source Le Figaro