En ce jour, il est de coutume de consommer les fruits qui font la réputation de la terre d’Israël : olives, dattes, raisins, figues et grenades. Ainsi, le 15 chevat on procède, comme à Pessa’h ou à Roch Hachana, à un Séder ou « Ordre » de consommation de fruits, accompagné de la récitation de versets bibliques, de passages du Talmud et du Zohar liés à cette circonstance. Le séder le plus connu est celui tiré du livre Péri ‘Ets Hadar, imprimé pour la première fois à Salonique en 1753 qui fut diffusé dans le monde entier. Il fut réimprimé à Pise en 1763, à Amsterdam en1859, à Izmir-Smyrne en 1876, à Livourne en 1885 et à Bagdad en 1936, là où se trouvaient de grandes communautés juives.
Règles générales du Seder :
• On lira tout d’abord les textes suivants en hébreu et en français, si l’entourage ne comprend pas la langue de la Bible :
- Gn 1,9-13: récit de la création des végétaux.
- Lv 26, 3-13: les bénédictions.
- Dt 8,1-10: L’éloge des sept fruits de la terre d’Israël : blé, orge, raisin, grenade, figue, olive, datte.
- Ez 17; 34; 36; 47.
- Jl 2.
- Ps 72; 147; 148; 65; 126.
• Le seder consiste à manger essentiellement des fruits, précédés de la berakha adéquate.
• Le chef de famille pourra dire, seul, les berakhot, et les participants répondre « Amen ».
•Si l’on mange un fruit pour la première fois cette année on récite :
« Baroukhattah Adonaï-Elohénou, mélekh aolam, chéhé’eyanou vekiyyémanou, veigianou lazemân azé.
Loué sois-Tu Éternel, notre Dieu, Roi de l ‘univers, qui nous as fait vivre et atteindre cette époque-ci.«
•Mais on ne répète pas la bénédiction pour un deuxième fruit nouveau au même repas.
•On doit veiller à ce qu’aucun fruit consommé ne soit véreux.
Le Blé
On commence la dégustation d’un gâteau à base de blé ou d’orge.
C’est en effet le blé qui inaugure l’éloge des fruits de la terre d’Israël: « Une terre qui produit le blé et l’orge » (Dt 8, 8).
Le blé, cité 30 fois dans la Bible, est l’aliment de base de l’homme.
Avant la consommation, on récite :
« Baroukhattah Adonaï-Elohénou, mélekh aolam, boré miné mézenot.
Loué sois-Tu Éternel, notre Dieu, Roi de l ‘univers,qui crées toutes sortes d’aliments. »
L’Olive
Ensuite on prend une olive.
L’olivier qui devient très vieux, millénaire dit-on, symbolise l’ancienneté, et ses feuilles persistantes, l’opiniâtreté.
De son fruit, on tire par pression l’huile d’olive, qui porte la lumière (de la ménorah du Temple) ou qui sert à la consécration du roi ou du Grand Prêtre (le Messie, le Mashiah est littéralement « l’Oint »).
Le fruit vert, confit dans la saumure et consommé comme olive de table, nous enseigne que l’amer s’adoucit par le travail et le temps…
L’olive est citée 38 fois dans la Bible : « Tes fils seront comme des plants d’olivier autour de la table » (Ps 128,3).
Avant la consommation, on récite :
« Baroukhattah Adonaï-Elohénou, mélekh aolam, boré peri aets.
Loué sois-Tu Éternel, notre Dieu, Roi de l ‘univers,qui crées le fruit de l’arbre. »
La Datte
On enchaîne avec la datte : symbole de la douceur.
Quand la Torah fait référence au miel, il s’agit du sucre de la datte.
Ses graines, pourvues d’un albumen oléagineux donnent l’huile de palmiste.
« Le juste fleurit comme le palmier dattier » (Ps 92,13) est l’une des 12 citations de la datte dans la Bible.
Le Raisin
Ensuite, on mange le raisin, si souvent mentionné dans la tradition juive. Le raisin donne le vin qui occupe une place de choix dans le culte. D’où l’obligation de ne consommer que du vin ou du jus de raisin casher.
Le vin peut à la fois servir pour les grandes cérémonies (kiddouch, mariage – pages en préparation, etc.) mais il peut également égarer l’homme (l’alcoolisme).
Le raisin est mentionné 19 fois dans la Bible, et le vin 141 fois, comme : « Et le vin réjouit le cœur de l’homme. » (Ps104,15).
La première coupe de Vin
Ici on boit la 1ère coupe de vin blanc, après avoir fait la bénédiction :
« Baroukh attah Adonaï-Elohénou, mélekh aolam, boré peri agfen.
Loué sois-Tu Éternel, notre Dieu, Roi de l ‘univers,qui crées le fruit de la vigne. »
La Figue
Selon le midrach, les feuilles de figue ont servi à couvrir la nudité d’Adam et Ève après leur faute.
On retrouve des figues, « après que Nabuchodonosor, roi de Babylone, eut exilé de Jérusalem et amené à Babylone Yekhonia roi de Juda [...] dans deux corbeilles [...] étaient placées devant le sanctuaire de Dieu. L’une contenait des figues excellentes et l’autre des figues extrêmement mauvaises » (Jr 24).
Même si pour les botanistes, elle est un « faux fruit », la figue n’en reste pas moins un végétal très prisé car elle n’a ni coquille, ni pépins, ni noyaux: elle devient « le fruit » par excellence!
Elle apparaît 39 fois dans la Bible. « Comme les premiers fruits mûrs sur le figuier, j’avais considéré vos ancêtres » (Os 9,10).
La Grenade
En hébreu, la grenade évoque l’élévation (rimôn <-> ram), mais aussi le prélèvement (térouma).
Le prophète Jérémie enseigne que cent grenades d’airain se trouvaient sur les colonnes du Temple de Jérusalem, et la Torah (Ex 28, 33) qu’elles se trouvaient autour de la bordure de la robe du Grand Prêtre (36 devant et 36 derrière). Ces grenades grelots annonçaient le passage du Cohen et permettaient aux gens impurs de s’écarter de lui.
La grenade est mentionnée 32 fois dans la Bible.
« Puissions-nous être remplis de mitsvot comme la grenade! » souhaite-t-on le soir de Roch Hachana; pourquoi pas à Tou BiChevat ?
Le Cédrat
Le cédrat ou étrog fut, selon un avis rabbinique, le fruit de la connaissance du bien et du mal. (Selon d’autres, il s’agissait du raisin ou du blé).
Attention, en général, on ne fait pas la bénédiction de chéhéh’eyanou sur le cédrat car on l’a déjà dite à Soukkot, en faisant la bénédiction sur le loulav.
L’étrog n’est pas mentionné nominativement dans la Bible, mais uniquement comme péri ‘ets hadar, « fruit du bel arbre ».
La Pomme
La pomme est mentionnée dans le Cantique des Cantiques.
Le « champ de pommes », le verger des secrets, se trouve abondamment cité dans la Kabbale.
A propos du doux parfum qui émane des vêtements de Jacob, venant recevoir la bénédiction de son père Isaac (Gn 27, 27), le midrach enseigne que ses vêtements provenaient du paradis, dont les pommes exhalaient un parfum enivrant.
La pomme est mentionnée 6 fois dans la Bible: « L’odeur de tes narines – par où Dieu insuffla l’âme à l’homme – est comme celle des pommiers ». (Ct 7, 9).
La deuxième coupe de Vin
On boit ensuite la 2ème coupe de vin blanc mélangé à un peu de vin rouge.
La Noix
La noix évoque la boîte crânienne, la coque de la noix protégeant un fruit ressemblant au cerveau (cerneau). La noix, egoz, a pour valeur numérique 17 qui est égale au mot tov, « bon ».
Comme elle est composées de quatre parties, les kabbalistes y décèlent les quatre lettres du Tétragramme divin (Zohar II 15 B).
Il n’existe qu’une seule mention de la noix dans la Bible : « Vers le verger des noyers je suis descendue ». (Ct 6,11).
L’Amande
Dans tous les pays où il pousse, l’amandier est le premier arbre à fleurir. Réputée pour sa promptitude, l’amande arrive à maturation (après la chute de la fleur) en 21 jours. Cela n’est pas sans évoquer les trois semaines qui séparent le 17 tamouz du 9 Av (période de deuil).
La branche d’amandier fleurie confirma aux yeux de tout Israël l’élection d’Aaron (Nb 17,33) et inaugure la prophétie de Jérémie (Jr 1,11). Déjà dans la Torah, les amandes sont envoyées comme offrande par Jacob au vice-roi d’Égypte (qu’il ne sait pas être son fils Joseph) afin de l’amadouer. (Gn 43,11).
Le Caroube
Le caroubier, à l’opposé de l’amandier, est très long à donner des fruits (70 ans). Il symbolise les efforts des générations précédentes pour les suivantes:
« Un jour, alors que ‘Honi marchait sur la route, il vit un homme qui plantait un caroubier:
- Combien d’années faut-il pour qu’un caroubier porte des fruits ? lui demanda ‘Honi.
- Soixante-dix ans, répondit le paysan.
- Et tu ne te demandes pas si tu vas vivre soixante-dix ans, si tu vas pouvoir manger de ses fruits ? »
L’homme répondit: « Dès ma jeunesse, j’ai trouvé des caroubiers, car mes ancêtres en ont donc planté pour moi; de même j’en plante pour mes descendants… » (TB Taanit 23 a).
Le mot « carat », unité de mesure de masse du diamant et de l’or, vient de « caroube », et correspondait au poids d’une graine de caroube (entre 185 et 205 mg; 1 carat = 200 mg).
La Poire
Originaire du Proche-Orient et du nord de l’Asie centrale, la poire a plus de 4000 ans d’âge. Elle se consomme de nombreuses façons : crue et cuite sous forme de compotes, poires au four, tartes, pâtisseries, confitures… Elle est aussi transformée en fruits confits, sirop, alcools.
La troisième coupe de Vin
On boit ensuite la 3ème coupe de vin moitié rouge moitié blanc.
A partir de là, les fruits mentionnés dans le Péri ‘Ets Hadar ne sont pas facilement identifiables.
Ils correspondent sans doute à des fruits des régions où vécurent les communautés juives. Chacun complétera cette liste pour accomplir le verset : « De tous les arbres du jardin tu mangeras ».
Certains mangent 15 sortes de fruits, selon le nombre de cantiques des degrés (Chir HaMaalot) des Psaumes, d’autres en mangent 30 ou plus, chacun suivant ses coutumes, ses moyens et les disponibilités du marché.
La quatrième coupe de Vin
On terminera avec la 4ème coupe de vin rouge additionnée d’un peu de vin blanc.
La bénédiction pour les fruits poussant sur les arbres :Baroukh ata A-donaï Elo-heinou melekh haolam boré péri haets
[Béni sois-Tu, É-ternel notre D.ieu, Roi de l’univers, qui crée le fruit de l’arbre.]
Si on goûte un fruit pour la première fois de la saison, on récite la bénédiction de Chéhé’hyanou avant de dire celle sur le fruit :
Baroukh ata A-donaï Elo-heinou melekh haolam chéhé’hyanou vékiyémanou véhiguiyanou lizmane hazé
[Béni sois-Tu, Éternel notre D.ieu, Roi de l’univers, qui nous a accordé la vie, nous a sustentés et nous a permis d’atteindre cette occasion.]
- Cette journée n’est pas une des grandes fêtes (Yom Tov), toutes les formes de travail sont autorisées. Toutefois, en raison du caractère festif de la journée, nous ne récitons pas les supplications (Ta’hanoun) lors des trois prières.
- Certains ont la coutume de manger du caroube. Le maître de la Kabbale, le saint Arizal, mangeait quinze sortes de fruits en ce jour.
Source louyehi