La dénazification engagée par les Alliés au sortir de la Seconde Guerre mondiale semble déjà, à l'époque, un défi. Cet immense bataillon de convaincus ou, dans une moindre mesure, de sympathisants aux thèses nazies est-il convertissable ? Plus de 70 ans après, la question reste d'actualité......Détails & émission audio.......
Régulièrement l’Allemagne juge avec une couverture médiatique fidèle au rendez-vous d’anciens nazis.
A croire que l’Allemagne n’en finira jamais avec la dénazification engagée au lendemain de la deuxième guerre mondiale.
Mais aujourd’hui c’est une nouvelle génération qui est convoquée en relation avec ses convictions nazies devant les tribunaux : Franco A., officier allemand, nostalgique du nazisme, est jugé pour avoir projeter de tuer dans le but de déstabiliser la politique d’accueil des immigrés en Europe, avec dans son arsenal les armes attendues et un exemplaire de Mein Kampf.
Dénazifier, un pari irréaliste ?
Si les nazis du Troisième Reich n’ont pas grand-chose à voir avec la revitalisation récente de groupes ultra-nationalistes outre-Rhin, la dénazification était déjà une opération insurmontable au moment de sa mise en place, c’est le sujet d’un documentaire Mickaël Gamrasni diffusé sur Arte dans la collection Les coulisses de l’histoire.
Après leur victoire en 1945, les Alliés étaient résolus à désintoxiquer une population allemande nourrie de propagande nationale-socialiste, mais comment juger les coupables dans condamner toute l’Allemagne ?
Sous le Troisième Reich, le parti nazi comptait dans ses rangs le nombre astronomique de 8 millions d’adhérents sans même y inclure les organisations de jeunesse et les sympathisants.
Impossible de punir tout un peuple dont l’adhésion à la démocratie version libérale ou version soviétique devait garantir une paix durable.
Pour désengorger les tribunaux et reconstruire, à l’Ouest on efface les historiques individuels en distribuant généreusement les « certificats Persil », illustrés dans le documentaire par une archive animée grinçante montrant les anciens admirateurs d’Hitler incarnés par des moutons noirs passer à la machine de la dénazification pour en ressortir en troupeau de moutons blancs, lavés de leurs affinités indésirables par millions.
Une action symbolique
La dénazification totale est jugée inatteignable, les Alliés misent donc sur l’action symbolique. Le procès de Nuremberg juge les « visages publics du nazisme » qui « exonèrent le reste de l’Allemagne ».
Après cette démonstration, le chancelier Konrad Adenauer déclare la dénazification achevée en 1949 tandis qu’à l’Est des procès collectifs sont organisés pour condamner le nazisme, considéré comme l’ennemi essentiel du communisme aux côtés du capitalisme. A chaque purge des contestations naissantes, l’accusation de nazisme sera désormais utilisée pour disqualifier les ennemis du nouvel État socialiste allemand.
La dénazification devient un outil de gouvernement à l’Est tandis qu’à l’Ouest on tente d’oublier sans avoir même soulever la question du génocide des Juifs d’Europe qui apparait avec fracas aux yeux du monde en Israël avec le procès Eichmann.
Un procès lointain, mais médiatisé de manière inédite, qui sera le déclencheur de nombreuses vocations de « chasseurs de nazis », à commencer par Beate et Serge Klarsfeld, combattants d’une dénazification sans État, jusqu’à la réunification des deux Allemagnes qui n’ont alors pu que constater que la dénazification restait à faire.