Comme la chanteuse Maria Callas (1923-1977), le chef d’orchestre Herbert von Karajan (1908-1989) reste un mythe fascinant, réexaminé à chaque anniversaire (de sa naissance comme de sa mort), alimentant toujours des ventes de disques consistantes dans la mesure où chaque commémoration s’accompagne de nouvelles intégrales et anthologies de la vaste discographie du chef, nommé « à vie », en 1955, à la tête de l’Orchestre philharmonique de Berlin.
Pour qui ne connaîtrait rien de la carrière du musicien, de ses rapports ambigus et fluctuants avec le pouvoir nazi (sous lequel Karajan fit ses débuts), de son charisme extraordinaire, de ses manies (il détestait les chauves et imposait que les membres dégarnis de son orchestre portent des perruques lors des concerts filmés en studio), de son goût pour les automobiles, les avions, le ski, la technologie, les jolies femmes, ce documentaire de Sigrid Faltin sera une bonne source d’information.
Lire à propos de la mort d’Herbert von Karajan : L'image et le son d'une star internationale
Pour les autres, il ne constituera qu’une redite de la vie et de la carrière bien connues du chef, avec des témoignages et extraits d’archives vus ailleurs. Avec, cependant, une information intéressante : l’historien Oliver Rathkolb montre la fiche d’inscription de Karajan à l’université de Vienne, en 1927, qui mentionne le terme « aryen ».
Favorisé par les nazis, détesté par Hitler
Le détail semble corroborer d’autres informations, mises au jour par l’historien depuis 2012, quant aux opinions politiques et antisémites du jeune Karajan et constituer une preuve de « conscience nationale particulièrement marquée », voire de « racisme », cinq ans avant son inscription au parti nazi.
Ce sujet est complexe puisque le musicien a profité des faveurs nazies tout en étant détesté par Hitler…
Il s’est marié, en 1942, avec Anita Güterman, « quart de juive » au yeux des nazis – mais dont le père industriel collaborait de près avec le pouvoir.
Quoi qu’il en soit, Karajan sera banni des podiums pendant deux ans après la fin de la guerre avant de retrouver le chemin des salles de concert et d’opéra, parfois accueilli avec hostilité (par l’importante communauté juive de New York par exemple).
Il s’y installera durablement, en dieu hautain au regard bleu glacial qui avait cette capacité de subjuguer les orchestres et le public de ses concerts.
Karajan. Portrait du maestro, documentaire de Sigrid Faltin (All., 2019, 53 min.).
Source Le Monde
Vous nous aimez, prouvez-le....