Sans jamais juger son personnage, le réalisateur israélien Guy Nattiv parvient à capturer une once d’humanité là où il est impossible d’en déceler.
Crâne rasé à blanc, fusil de chasse dessiné sur la joue, croix gammée et sigle du Ku Klux Klan gravés dans le cou : Bryon Widner arbore la parfaite panoplie du méchant skinhead.
Il balade son Rottweiler sans muselière, enchaîne les bières bon marché et scande des “sale nègre !” à tout va.
Dans Skin, Jamie Bell est un Bryon Widner convainquant. Les yeux presque toujours gorgés de sang, l’attitude timide que l’acteur arbore dans le récent biopic sur Elton John, Rocketman, se fait vite oublier pour laisser place à une rage virulente et à un goût excessif pour la bagarre.
On pense forcément à Edward Norton, qui, vingt ans plus tôt, a lui aussi interprété un nazi repenti dans le célèbre film de Tony Kaye, American History X. Mais l’évolution des personnages est différente.
Tandis que le Derek de Tony Kaye connaît l’absolution après un passage dans l’enfer carcéral, c’est presque naturellement que Bryon Widner (Jamie Bell) trouve lui-même la voie vers la rédemption. Dès l’introduction, le film est ponctué d’ellipses : le skinhead installé sur un lit d’hôpital, souffre le martyr, crie et gesticule. Tel est le prix à payer pour effacer son passé : des tatouages qui ont fini par remplacer sa peau.
On sentirait presque l’odeur de l’épiderme qui brûle. Avec ces projections dans le futur, Guy Nattiv installe directement l’enjeu de son film qui consiste à absoudre son personnage.
Bryon Widner a tout d’un antihéros, livrer tous les membres de sa famille nazie au FBI n’efface pas la croix gammée qu’il a gravée au couteau sur la joue d’un adolescent noir.
Détestable mais touchant, violent mais sensible, Bryon Widner est le skinhead le plus célèbre des États-Unis.
Skin est une brillante adaptation de son histoire.
Issu d’une famille de survivants de l’Holocauste, son réalisateur, Guy Nattiv, s’est inspiré du documentaire, Erasing Hate, sorti en 2011.
Dans son long-métrage brillant, le cinéaste israélien brouille les pistes, il met en scène le récit d’une quête de rédemption et y injectant une dose de romance. Bryon Widner croise d’emblée la route de Julie (Danielle Macdonald) et de ses trois filles, tombe amoureux, des pas de géant dans son pèlerinage vers la quiétude.
Au côtés de cette mère célibataire, le skinhead trouve enfin son salut : les tatouages cessent d’être un étendard et deviennent la cellule dans laquelle il s’est lui-même enfermé.
Skin, de Guy Nattiv, en salle prochainement.
Source Numero
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