jeudi 11 avril 2019

Avril 1968 : Quand Hassan II se rendit en Turquie et en Iran pour la cause palestinienne...


Bien que certains l’accusent d’avoir aidé Israël à défaire les armées arabes lors de la Guerre des Six jours de 1967, le Maroc mènera une large mobilisation pour la cause palestinienne entre mars et avril 1968. Une action qui sera sanctionnée par la tenue, au Maroc, du premier Sommet islamique sur la question palestinienne organisé à Rabat.......Détails........



Accusé pourtant d’avoir «contribuer à la défaite des pays arabes contre Israël pendant la guerre des Six jours» (5 au 10 juin 1967), le Maroc pourtant s’était mobilisé, tout au long de l’année 1968, pour la cause palestinienne. 
Ainsi, le 10 avril 1968, le roi Hassan II entreprend un long voyage dans des pays arabes et musulmans, qui le mènera d’abord en Turquie, en Iran, en Arabie saoudite et en Tunisie. 
Cette tournée sera suivie par le premier Sommet islamique sur la question palestinienne organisé à Rabat entre le 22 et le 25 septembre 1969.
Nous sommes le 10 juin 1967. 
Les armées arabes, dirigées par l'Égypte, la Jordanie, la Syrie et le Liban viennent d’essuyer une défaite sans précédent contre l’entité sioniste. L’ensemble des pays arabes sont sous le choc. 
La volonté de venger la Palestine et l'honneur des pays arabes grandit chaque jour. Bien des années plus tard, des ex-fonctionnaires du Mossad révéleront que le royaume du Maroc aurait permis à Israël de suivre «minute par minute», le sommet de la Ligue arabe, tenu du 13 au 18 septembre 1965 à Casablanca. 
Une rencontre consacrée exclusivement à l’examen des conditions de préparation des armées arabes dans la perspective d’une nouvelle confrontation avec Israël qui tournera à l'avantage de ce dernier.
Moins d’un an plus tard après la défaite arabe, soit en mars 1968, le Maroc prend les choses en main. 
Une délégation marocaine sillonne alors des pays africains, interpellant leurs communautés musulmanes, en préparation à un sommet au Maroc. 
Selon le numéro 113 de la revue mensuelle «Daaouat Al Haq» éditée par le ministère des Habous et des Affaires islamiques, la délégation marocaine arrivera au Sénégal, le 15 mars pour y passer dix jours, avant de se rendre dans d’autres pays, comme la Gambie, la Côte d’Ivoire et le Niger pour renforcer les liens entre ces pays et le Maroc et informer sur les derniers développements de la cause palestinienne entre autres.

Le déplacement de Hassan II au Proche et Moyen Orient

Quant aux autres pays arabes, c’est le roi Hassan II en personne qui s’y rend pour mobiliser en prévision du sommet marocain. 
Ainsi, selon un document d’Aix-Marseille Université retraçant les activités du roi Hassan II, le souverain se rend en Turquie, dans le cadre d’une visite officielle. Le 11 avril, il tiendra des «entretiens politiques» avec le président turque Cevdet Sunay. Le 12 avril, Hassan II se rend en Iran chez son ami, le Shah Mohammad Reza Pahlavi. Le lendemain, il déclare :
«Dans une période particulièrement troublée comme la nôtre, nous devons tirer une leçon de l'histoire du monde musulman, en recréant les conditions qui ont permis l'unité de la communauté musulmane lorsque cette civilisation était parvenue à son apogée.»
Après la signature, le 17 avril à Téhéran, de sept accords de coopération dans le domaine de la pétrochimie entre le Maroc et l'Iran puis la publication, le 20 avril d’un communiqué commun irano-marocain, Hassan II se rend le même jour en Arabie saoudite, troisième étape de son voyage. 
A Ryad, Hassan II s’entretient avec le roi Hussein Ben Talal de Jordanie et Fayçal Ben Abdelaziz Al Saoud d’Arabie saoudite.
Mais alors qu’il prévoyait aussi de se rendre en Egypte, le 25 avril, Hassan II reporte son voyage. 
Il y envoie son diplomate Baddreddine Snoussi pour remettre un message personnel au président égyptien Gamal Abdel Nasser.
Trois jours plus tard et toujours à l'issue de son voyage au Proche et Moyen Orient, le roi Hassan Il fait escale à Tunis où il s'entretient avec le président Habib Bourguiba. Le 29 avril, un communiqué conjoint est publié où les deux chefs d’Etat condamnent l’agression sioniste.
«Le Maroc et la Tunisie condamnent l'obstination d'Israël à garder les territoires arabes occupés par la force et affirment la nécessité du retrait des forces israéliennes afin de rendre possible un règlement équitable permettant au peuple palestinien de récupérer les droits dont il a été frustré. Les deux pays expriment leur appui à la lutte du peuple palestinien combattant.»

Le Sommet de Rabat, les bourdes de Kadhafi et la chute du Shah d’Iran

Des retours au Maroc, Hassan II prépare un sommet des pays islamiques. Une rencontre qui aura lieu à Rabat entre le 22 et le 25 septembre 1969, accélérée par l’incendie de la mosquée Al Aqsa du 21 août 1969 provoqué par l’Australien Denis Michael Rohan. 
Ainsi, 27 pays représentés par leurs chefs d’Etats ou chefs du gouvernement se rendent à Rabat pour prendre part à ce premier sommet. L’Iran, la Turquie, la Tunisie, l’Algérie, la Jordanie, la Libye, l’Organisation de la libération de la Palestine et l’Arabie Saoudite sont parmi les pays présents. 
Mais cette rencontre ne se déroulera pas comme prévue. 
Selon un article du quotidien Al Itihad Al Ichtiraki, Mouammar Kadhafi ayant fraîchement réussi son coup d’Etat contre le roi Idriss de Libye, provoquera la colère de Hassan II et le roi Fayçal lorsqu’il les appellera par leurs prénoms. Le Sommet sera même suspendu avant de reprendre ses travaux suite au retrait du roi saoudien.
La rencontre prendra toutefois la décision historique, selon l'Organisation de la coopération islamique (OCI), de «refuser toute solution à la question palestinienne sans préserver la position initiale et le statut d’Al Qods avant les événements de juin 1967». 
Le sommet permettra aussi d’accepter l’OLP en tant qu’observateur et de réconcilier celle-ci avec l’Iran. Hassan II a aussi réussi à impliquer plusieurs pays africains dans la cause palestinienne. 
Il déclare, des années plus tard :
«Il y avait plusieurs Etats qui ne partageaient rien avec les Palestiniens. Certains se méfiaient même d’eux. J’ai donc demandé, en tant que président du congrès de les écouter et de les accepter en tant qu’observateurs. 
Tous le monde avait accepté, non pas en signe de respect aux Palestiniens mais en signe de respect pour le Maroc, leur pays hôte.»

Hassan II

Mais le soutien iranien à la Palestine ne durera pas longtemps. Le 11 février 1979, le Shah est déchu et Rouhollah Moussavi Khomeini devient guide de la révolution iranienne. 
Hassan II perd alors non seulement le soutien de l’Iran à la cause palestinienne mais même sa neutralité quant à la question du Sahara. Un an plus tard, l’Iran reconnait même la «RASD».

Source Yabiladi
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