Le Conseil national des évangéliques de France (Cnef) a tenu vendredi 5 octobre un colloque inédit sur l’antisémitisme, s’inscrivant dans la tradition du philo-sémitisme chrétien, apanage de longue date des communautés protestantes françaises.......Détails........
Pour Étienne Lhermenault, président du Conseil national des évangéliques de France (Cnef), il y avait « urgence » à s’emparer de la question de l’antisémitisme, « malheureusement passée sous les radars médiatiques, en dépit d’une aggravation de la situation ».
C’est pour manifester la « préoccupation » des évangéliques français ainsi que leur « solidarité » envers les juifs que le Cnef a organisé, vendredi 5 octobre à Paris, une journée consacrée à ce sujet, répondant ainsi à une idée lancée par les juifs messianiques français, membres de cet organe représentatif du protestantisme évangélique.
Ce colloque théologique sur l’antisémitisme a été l’occasion de réunir théologiens, historiens et religieux, juifs ou évangéliques, autour de problématiques judéo-chrétiennes telles que la « chrétienté philo-sémite », « les racines juives et le sionisme chrétien » ou encore « la judaïté de Jésus ».
Philo-sémitisme et philo-sionisme
« Pour une partie des évangéliques français, le peuple juif n’a pas d’importance particulière dans leur vie de foi, décrit Étienne Lhermenault. Mais pour une frange considérable d’entre eux, le philo-sémitisme est très prononcé, d’où cet engagement sur ces questions délicates. »
Cette attitude favorable envers les juifs n’est pas sans rappeler celle des évangéliques américains.
« Globalement, ce sont les mêmes ressorts en France et aux États-Unis, avance le président du Cnef. Ce sentiment s’appuie notamment sur une lecture biblique dispensationaliste, qui accorde au peuple d’Israël une place fondamentale et toujours en vigueur dans le plan de Dieu. »
La théologie dispensationnaliste divise l’histoire du Salut en plusieurs périodes au cours desquelles Dieu se révèle progressivement, opérant une distinction nette dans ce dessein entre Israël et l’Église.
Si les évangéliques américains joignent généralement philo-sémitisme et philo-sionisme, cette association est moins « systématique » chez les Français, estime Étienne Lhermenault.
« Les avis sont moins homogènes par rapport à l’État d’Israël, notamment car les relations de la France avec ce pays sont différentes. »
Le « philo-sémitisme évangélique est sensible à tout ce qui menace les juifs, même si, en France, il n’est pas aussi intense et unanime que de l’autre côté de l’Atlantique », confirme Sébastien Fath, sociologue spécialiste du protestantisme.
Aux États-Unis, les chrétiens sionistes, nombreux, souscrivent au millénarisme qui appelle de ses vœux le règne du Messie sur la terre et voient dans la création de l’État d’Israël un signe de son prochain avènement.
« Affinités électives »
Cette démarche du Cnef s’inscrit aussi dans les « affinités électives » qui existent entre protestants et juifs en France, assure le chercheur.
Ainsi, le réformateur Jean Calvin, dont s’inspire le protestantisme français, fut le premier à parler différemment des juifs, à une époque où ils subissaient encore un antijudaïsme pluriséculaire.
Nourris par l’Ancien Testament, touchés par les tribulations et poussés à la clandestinité et à l’exil en tant que minorité, les protestants français se sentirent sans doute proches de la communauté juive par les similitudes de leurs situations.
Ce colloque est-il le symptôme d’une progression du philo-sémitisme chez les évangéliques français ? Ce n’est pas l’avis de Sébastien Fath, pour qui l’organisation d’un tel événement correspond à la situation « objective » des juifs de France.
« Le problème est largement sous-évalué dans une grande partie des médias, et les responsables politiques sont nombreux à rechigner à en parler pour ne pas devoir affronter la question de l’antisémitisme musulman », souligne le sociologue.
En organisant cette journée, le Cnef entend aussi, sans doute, « se positionner comme un acteur important du jeu religieux », analyse-t-il encore.
Pourtant, à la grande déception d’Étienne Lhermenault, ni les responsables catholiques, ni la Fédération protestante de France, pas plus que les responsables politiques contactés pour le colloque, n’ont fait acte de présence.
Source La Croix
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