Le général Ghassem Soleimani, commandant de l’ombre de la Force Qods de l'Iran, s'est envolé pour l'Irak cette semaine avec des dizaines d’officiers pour conseiller la direction assiégée du pays sur la façon de freiner l'avancée des forces militantes sur Bagdad, ont déclaré vendredi des responsables américains. En rencontrant le général Soleimani, les Irakiens accueillent le cerveau de la stratégie de l'Iran en Irak quand les milices chiites irakiennes formées par l'Iran combattaient les troupes américaines. Le général est également l'architecte actuel du soutien militaire iranien en Syrie du président Bachar al-Assad...
Le contact suggère que les Irakiens envisagent la possibilité d'une aide importante de l'Iran comme un moyen de pression sur les Etats-Unis pour venir défendre eux-mêmes l'Irak. Et il met en évidence le réseau complexe des alliances mises en avant dans la crise actuelle ; les Etats-Unis et l'Iran, antagonistes traditionnels, voient comme leur intérêt de venir en aide à un partenaire assiégé pour repousser l'avancée de l'Etat islamique en Irak et au Levant, ou EIIL.
« De toute évidence, toute arrivée et activation de militaires iraniens sur le terrain en Irak seraient extrêmement important, symboliquement mais aussi concrètement » a déclaré Charles Lister, chercheur invité au Brookings Doha Center au Qatar. « La menace du terrorisme en Irak est perçue fortement à la fois par l'Iran et les Etats-Unis. »
Les responsables américains qui ont parlé de la visite du général Soleimani en Irak se sont exprimés sous condition d'anonymat parce qu'ils discutaient d’informations tirées de rapports de renseignement secrets. Mais les responsables ont rejeté vendredi l'idée que les Etats-Unis et l'Iran cordonnaient officiellement leurs efforts pour contrer la menace de l’EIIL.
« Nous ne parlons pas aux Iraniens à propos de l'Irak », a déclaré Marie Harf, porte-parole du département d'Etat, aux journalistes. « Ce que nous avons dit, c'est que tous les voisins de l'Irak, y compris les Iraniens, ont besoin de ne rien faire pour déstabiliser encore plus la situation, de ne pas essayer de promouvoir les tensions confessionnelles».
M. Lister a déclaré qu'il était peu probable que l'Iran et les Etats-Unis puissent jouer un rôle actif en même temps pour contrer les militants en Irak, mais le drôle d’assemblage de la situation a même conduit l'Iran et Israël – durs ennemis historiques - à trouver une cause commune (...)
Aux Etats-Unis des responsables du renseignement et de l’armée ont dit que l'Iran avait envoyé des armes et du matériel à l'Irak, mais écarté les nouvelles de vendredi comme quoi Qods avait envoyé des centaines de soldats pour renforcer l'armée irakienne, dont les divisions du nord avaient plié face à des militants sunnites. Mais les responsables américains ont dit qu'ils surveillaient de près les informations, inquiets de ce que l'envoi de milices chiites en Irak ne ferait que déstabiliser davantage une situation de sécurité qui se détériore rapidement dans le pays. «Nous encourageons tous les voisins de l'Irak, y compris l'Iran, à jouer un rôle constructif », a déclaré aux journalistes le contre-amiral John F. Kirby, secrétaire de presse du Pentagone.
Interrogé sur ce que pourrait entraîner ce rôle, l'amiral Kirby a dit : « Ils pourraient cesser de soutenir les réseaux extrémistes, non? C'est déjà une chose » (...)
Il y a plus d'un an, le général Suleimani avait assuré à M. Maliki lors d'une réunion à Bagdad que si l'Irak était en danger, M. Maliki pourrait mobiliser les milices chiites irakiennes pour se battre au nom du gouvernement, a rapporté un responsable américain. Ils seraient similaires aux groupes dits spéciaux – des chiites irakiens formés par la force Qods iranienne en Iran - qui ont affrontés les Américains pendant la guerre en Irak.
Après l'invasion américaine de 2003 de l'Irak, le général Soleimani a été chargé de la mission d'étendre l'influence de l'Iran dans le pays, de paralyser l'armée américaine et, à terme, d'encourager son départ ; objectifs primordiaux pour un gouvernement iranien déterminé à être une grande puissance dans la région et qui se sentait menacé par le développement de la présence militaire américaine sur ses flancs ouest et est.
Le général David H. Petraeus, qui a appris à connaître l'influence du commandant de la Force Qods quand il servait en Irak, a qualifié le général Soleimani de «personnage véritablement diabolique » dans une lettre à Robert M. Gates, secrétaire à la Défense. Dans une autre lettre, il a reconnu l'influence que le général Soleimani exerçait en Irak. « La surprise la plus sombre de la semaine a probablement été le degré de l'implication iranienne directe dans l'intrigue politique en Irak », écrivait le général Petraeus dans une lettre en avril 2008 à M. Gates.
Même quand la Force Qods du général Soleimani armait et entrainait des milices chiites en Irak, elle accueillait certains des plus hauts dirigeants politiques de l'Irak. En attisant la violence puis en jouant la médiation du conflit, disent d’anciens responsables américains, il s’est rendu indispensable pour déconcerter les Irakiens.
En 2011, le Département du Trésor des Etats-Unis a mis le général Soleimani sur sa liste de sanctions parce que les responsables américains ont dit qu'il avait été impliqué dans un complot pour tuer l'ambassadeur saoudien à Washington.
Source Iran Manif