Pour comprendre l’escalade du conflit à Gaza, nous avons besoin de revenir à la nuit du 23 octobre à Khartoum. Vers 11 h ce soir là, l’usine d’armes de Yarmouk, dans la capitale soudanaise, a été attaquée sans doute par l’armée de l’air israélienne. Il y a des preuves que cette usine appartenant à l’Iran fabrique des armes à destination de Bachar el Assad, du Hezbollah et de Gaza. Et pas n’importe quelles armes: des Fajr5 (ceux qui visent Tel-Aviv aujourd’hui) ou encore des missiles antichars.
L’un des principaux moteurs de cette dernière aérienne israélienne est la croyance, côté israélien, que le Hamas est en possession d’un gros stock de missiles Fajr3 et Fajr5. L’intention première d’Israël dans cette campagne militaire, c’est d’empêcher le Hamas d’utiliser ces roquettes ou de les garder pour menacer es centres urbains d’Israël. Cela explique probablement pourquoi au début Octobre, quand les tirs de roquettes à courte portée de Gaza étaient encore à un bas niveau, les responsables israéliens ont commencé à conditionner le public à l’idée d’une «inévitable» intervention israélienne à Gaza. Israël savait que le Hamas avait ces armes en sa possession et que cela pourrait exiger une guerre pour éliminer la menace des roquettes Fajr. Elle a commencé avec la frappe de la facilité au Soudan, et cela s’est étendu avec l’assassinat du commandant militaire du Hamas, Ahmad Jabari (l’architecte du programme des fusées Fajr), et cela devrait aujourd’hui se transformer en une incursion terrestre.
Le 23 octobre n’était en fait pas la première fois qu’Israël aurait attaqué des caches d’armes dans le territoire soudanais. Des armes destins à la bande de Gaza. En janvier 2009, Israël aurait procédé à une frappe aérienne contre un convoi d’armes au nord-ouest de Port-Soudan en direction de Gaza. Le convoi comprenait des missiles Fajr-3 et était exceptionnellement important, avec plus de 20 camions circulant en direction du nord vers l’enclave terroriste. L’expédition était organisée par l’Iran afin de renforcer le Hamas lors de l’Opération Plomb Durci. L’Iran a également tenté d’introduire des armes à Gaza par la mer Rouge.
Bien que des efforts ont été fait pour cacher l’usine de Yarmouk, il n’est pas évident de se protéger du regard d’Israël. Le Hamas a donc pris un risque majeur en organisant sa contrebande des armes depuis Yarmouk vers Gaza; pensant ne jamais pouvoir être repéré si loin des radars israéliens. Avant l’assassinat ciblé de Jabari, il y a eu deux salves d’attaques palestiniennes le mois passé. La première entre le 8 et le 10 octobre. La seconde entre le 22 et le 24 octobre. Lorsque la décision a été prise de procéder à ces attaques, le Hamas ignorait qu’Israël savait à propos de ses Fajr. Le lancement unique des Qassam, des mortiers et des Grad avaient pour but d’induire en erreur Israël… Et permettant de la sorte au Hamas de continuer à lancer ses attaques sans la moindre réactions Israël (Israël ne semble plus réagir qu’en cas de « gros danger, » plus pour les « petites roquettes », même si elles empoisonnent la vie d’un million d’israéliens).
Au moment où Israël a attaqué le centre de Yarmouk, le Hamas devait assumer qu’Israël connaissait les transferts d’armes vers Gaza. Le Hamas, a alors rapidement accepté une médiation égyptienne pour un cessez-le-feu le 25 octobre. Lorsque les attaques contre Israël ont reprises de plus belles, le 10 novembre – y compris une attaque à l’anti-char sur une jeep revendiquée par le FPLP et plusieurs dizaines d’autres attaques à la roquettes par le Jihad Islamique et les salafistes – le Hamas est apparu plus prudent, appelant les principaux groupes terroristes à chercher une autre trêve. Mais il était trop tard. Ils avaient déjà fourni par inadvertance les Israéliens la justification dont ils avaient besoin pour leurs relations publiques afin de couvrir une campagne visant à détruire le programme d’armement du Hamas.
Le 14 novembre, Jabari a été assassiné, et le Hamas a dû se préparer dans l’hypothèse où Israël ferait tout ce qu’il fallait pour lancer une vaste campagne militaire afin d’éliminer la menace Fajr. C’est à ce point que le Hamas s’est résigné en adoptant la stratégie: « c’est à prendre ou à laisser », en envoyant des missiles vers Tel-aviv et Jérusalem, tout en sachant que, de toute façon, les missiles seraient visés et détruits par Tsahal lors d’une frappe ciblée. Le Hamas a essentiellement essayé de tirer le meilleur parti d’une situation déjà difficile et tente à présent de jouer son va-tout, avec la médiation de l’Egypte, pour tenter de parvenir à une énième trêve afin d’éviter une campagne militaire terrestre d’Israël.
A Téhéran, les autorités iraniennes sont probablement très contentes de ces développements. L’Iran besoin d’une distraction du conflit en Syrie. Il en a maintenant une, du moins temporairement. L’Iran a également l’intention de réviser ses relations avec le Hamas et de démontrer qu’il garde en main des leviers parmi les autres groupes terroristes, dans le cadre de sa stratégie de dissuasion contre une frappe militaire anti-nucléaire.
Le Hamas a décidé l’année dernière que c’était mieux de s’aligner avec son organisation mère, les Frères musulmans, que de rester attaché à un rival idéologique comme l’Iran.
Le résultat est une campagne militaire israélienne à Gaza qui met la crédibilité du Hamas en cause et pourrait créer plus d’espace pour un groupe comme le Jihad islamique palestinien, qui a des liens étroits avec l’Iran. Le conflit sera également susceptible de créer des tensions dans les relations du Hamas avec les Frères musulmans en Egypte, en Jordanie et en Syrie, depuis que la Fraternité, en particulier en Egypte, n’est pas préparé à affronter Israël au-delà de la rhétorique et ne veut pas faire face à la réaction du public pour « ne pas en avoir fait assez afin de défendre les palestiniens. » L’Egypte n’est pas encore moralement prête non-plus pour une raclée militaire. Dans l’ensemble, ce qu’il se passe aujourd’hui, peut avoir un coût relativement faible… Mais c’est une manœuvre au profit élevé pour l’Iran.
Sourcce Jss News