mercredi 21 novembre 2012

Israël – Chine : les convergences

Israel Chine




Si l’on vous demande quel est le premier marché pour les exportations israéliennes, vous répondrez sans hésiter les Etats-Unis. Et le deuxième ? Depuis cette année, c’est la Chine !
En effet, sur les 3 premiers trimestres de 2012, les exportations (hors diamants) d’Israël vers la Chine + Hong-Kong sont de l’ordre de 2,5 milliards de dollars, supplantant ainsi l’Allemagne qui achète environ 2,1 milliards de dollars de produits israéliens. En ajoutant les diamants, le commerce bilatéral Israël – Chine devrait être de l’ordre de 10 milliards de dollars en 2012, tout en restant déficitaire pour Israël.
Il y a 20 ans, en 1992, furent établies les relations diplomatiques entre Israël et la Chine. Lors de son voyage à Beijing la même année, le Premier Ministre Itzhak Rabin saluait l’action de Saul Eisenberg, « l’homme qui avait ouvert les portes de la Chine à Israël ». Celui-ci, d’origine allemande, avait en effet trouvé refuge à Shangaï avec sa famille, avant la seconde guerre mondiale, et y avait conservé des liens importants, qui lui servirent à développer un courant d’affaires avec les Chinois, à partir des années 1970, y compris dans le domaine militaire.
De même, l’ancien premier ministre Ehud Olmert rappelle que sa famille s’est réfugié en Chine à Harbin pour échapper aux persécutions nazies. La Chine a accueilli de nombreux Juifs d’Europe centrale et orientale pendant la période noire du XXème siècle, leur offrant un abri sûr à l’heure où leurs anciens pays ne l’étaient plus.
Pour Israël, le changement de dirigeants en Chine est peut-être aussi important que la réélection de Barack Obama aux Etats-Unis.
En effet, sous la direction de l’équipe Xi Jinping – Li Kegiang, la Chine va amorcer un virage significatif pour les 10 prochaines années. En 30 ans, la Chine est devenue l’atelier du monde; son industrie représente le quart de la production mondiale. De plus, elle a investi très lourdement dans les infrastructures d’énergie, de transport, de la construction. Ce modèle est extrêmement consommateur en énergie et en matières premières, et n’est pas soutenable à terme. Pour chaque unité de PIB, la Chine consomme trois fois plus d’énergie que l’Europe !
Le grand défi de la nouvelle équipe dirigeante chinoise va être de transformer le modèle économique, de plus miser sur la consommation et les services et moins sur l’industrie et l’investissement, de mettre l’accent sur la productivité du capital plutôt que sur la productivité du travail, de développer les services financiers, de rendre l’économie moins gourmande en énergie, d’optimiser l’utilisation des matières premières. Dans de nombreux domaines, le savoir-faire israélien va donc être utile à la transformation chinoise : les technologies de gestion de l’eau, de l’agriculture productive, les énergies propres, les outils informatiques de productivité, d’aide à la vie quotidienne, d’amélioration de la santé, etc …
Par ailleurs, sur le plan des cultures, les convergences existent : il s’agit de peuples anciens, qui ont une culture et une histoire multi-millénaires; l’éducation, le développement des connaissances y sont des valeurs fondatrices, de même que le sens de la famille, le respect de la tradition, la notion de solidarité. Historiquement, les deux pays se sont recréés dans leur forme actuelle au milieu du XXème siècle, après être passés par des épreuves terribles. De plus, la Chine est imperméable au lourd passé antisémite des pays occidentaux, et est plutôt admirative des capacités du peuple juif à renaître de ses cendres.
Si l’on veut pointer des différences, elles sont évidentes sur les notions de consensus et de confrontation des idées. En Israël, on n’est pas d’accord : 2000 ans de discussions talmudiques passionnées se cristallisent dans une confrontation permanente, mais fertile, des opinions; des désaccords et de la capacité à penser « out of the box » naissent les innovations disruptives qui sont le marqueur de la high tech israélienne. En Chine, au contraire, c’est le consensus harmonieux qui est recherché et valorisé; il n’est pas question de s’opposer et d’exprimer son désaccord, mais plutôt d’influencer son interlocuteur à venir vers son opinion, sans qu’il ne perde la face.
Mais pour faire évoluer son économie vers un modèle plus innovateur, la Chine va avoir besoin d’accepter un peu plus de confrontation des idées et de contradictions, sur le modèle israélien. Le développement des échanges universitaires, des instituts de recherche conjoints et des coopérations industrielles pourrait en être un catalyseur.


Source siliconwadi.fr