Le procès de Benjamin Netanyahu a brièvement repris, dimanche 19 juillet alors que la gronde populaire contre le gouvernement s'intensifie un peu plus chaque jour en Israël.
L'audience s'est tenue dimanche en l'absence de l'intéressé. Commencé le 24 mai dernier, le procès du Premier ministre, inculpé pour corruption, fraude et abus de confiance dans trois affaires différentes, avait été rapidement ajourné à l'époque, à la demande des avocat de la défense.
Cette stratégie dilatoire semble toujours de vigueur. Dimanche, les avocats du Premier ministre ont obtenu le report des auditions des témoins qui seront entendus, à raison de trois fois par semaine, à partir de janvier 2021. Une victoire pour la défense car elle permet de reporter la fin de ce procès historique à une date indéterminée. Benjamin Netanyahu a quant à lui jusqu'au 18 octobre pour déposer un plaidoyer par écrit.
Pour le professeur de droit israélien Gad Barzilai, la procédure sera "longue et fastidieuse", les avocats de M. Netanyahu étant selon lui susceptibles de demander des délais supplémentaires pour étudier les éléments de preuve et solliciter une aide d'État pour couvrir les frais de justice.
"Le parquet souhaite mettre fin aux procédures dans environ deux à trois ans", a ajouté M. Barzilai.
Selon la loi israélienne, le Premier ministre n'est pas obligé de démissionner s'il est inculpé mais seulement s'il est reconnu coupable d'un délit après avoir épuisé toutes les procédures d'appel, ce qui pourrait prendre des années. C'est la première fois dans l'histoire d'Israël qu'un chef de gouvernement fait face à des accusations délictuelles au cours de sa mandature.
"Menteur" et "manipulateur : la défiance du peuple
Si le Premier ministre plaide son innocence depuis le début de l'affaire et dénonce un complot, le peuple, lui, le juge déjà coupable et ces derniers rebondissements judiciaires ne risquent pas d'améliorer la relation. "Cela fait plusieurs années qu'il y a des manifestations régulièrement contre Benjamin Netanyahu (...) mais il n'y en pas eu d'une telle ampleur depuis plus de 25 ans", rappelle Antoine Mariotti.
Des rassemblements ont eu lieu dans plus de 200 lieux en Israël samedi. À Jérusalem et Tel Aviv, plusieurs milliers de personnes étaient dans les rues jusque tard dans la nuit.
À Jérusalem, les manifestants se sont massés devant la résidence du Premier ministre pour exiger sa démission. "Démocratie", "menteur" et "manipulateur", pouvait-on lire sur les pancartes.
Dans la soirée, la manifestation a été le théâtre de heurts violents entre forces de l'ordre et manifestants.
Dans la ville côtière de Tel-Aviv, des milliers de manifestants ont également protesté contre la gestion de la crise sanitaire et économique, au lendemain de l'entrée en vigueur de nouvelles restrictions.
Les autorités ont annoncé vendredi que la plupart des commerces non essentiels et lieux publics seraient fermés le week-end jusqu'à nouvel ordre. Là aussi, les événements ont mal tourné avec la police et 13 personnes ont été arrêtées, indique Antoine Mariotti.
Covid-19 : Israël n'a pas tenu la distance
Erigé en modèle au début de la crise, Israël n'a pas su tenir la distance. Le pays qui compte environ neuf millions d'habitants, a rouvert rapidement ses plages, restaurants, salles de sport et commerces non essentiels. Mais le nombre de nouveaux malades est reparti à la hausse et le taux de chômage a bondi ces derniers mois, dépassant les 20 %.
Pour calmer la grogne sociale, le Premier ministre a annoncé récemment un plan de 90 milliards de shekels (environ 22,5 milliards d'euros), avec des aides pour "tous les citoyens".
Mais selon un sondage de la chaîne 13 publié cette semaine, 61 % des électeurs sont "mécontents" de sa gestion de l'épidémie.
D'où ce mouvement inédit de manifestations. Frédéric Encel, maître de conférence à Sciences Po rappelle que le Likoud, parti de Benjamin Netanyahu, a néanmoins remporté le plus grand nombre de suffrages aux dernière élections.
"Il n'y a pas d'opposition sérieuse en face de lui", explique ce spécialiste.
"Mais il y a encore une majorité relative d'Israéliens qui, pratiquement depuis 1996 - date de la première élection de cet insubmersible - soutiennent plutôt Benjamin Netanyahu".
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