jeudi 4 juin 2020

L’Israélienne Esther Meisels contrainte de quitter son équipe (Health Mate-Cyclelive Team) en raison d'abus sexuels répétés !


L’affaire d’abus sexuels et psychologiques autour de l’équipe belge Health Mate-Cyclelive Team, disparue en 2019, a pris une nouvelle tournure fin avril : la commission d’Éthique de l’Union Cycliste Internationale (UCI) a déclaré le manager de la formation Patrick Van Gansen coupable de violations de son code éthique après une longue enquête autour des nombreuses accusations à son encontre concernant de multiples abus sexuels.........Détails........


Des sanctions sont désormais attendues de la part de la commission disciplinaire de l’UCI, tandis que les cyclistes qui avaient alerté sur leur situation se disent « heureuse » ou « soulagée » que leur histoire ne reste pas lettre morte.
En juin 2019, trois cyclistes, toutes enregistrées au sein de l’équipe Health Mate-Cyclelive Team au début de la saison, annoncent sur les réseaux sociaux ainsi que sur le site Cyclingnews qu’elles ont déposé plainte auprès de la commission d’Éthique de l’UCI pour des traitements abusifs et des comportements inappropriés de la part du manager belge de la formation, Patrick Van Gansen. 
La Française Chloë Turblin, la Suédoise Sara Mustonen et l’Israélienne Esther Meisels ont toutes les trois décidé de quitter l’équipe avant la fin de la saison, face à ces comportements qu’elles jugent abusifs, au bas mot.
Dans un article publié par Cyclingnews en juin 2019, Esther Meisels a notamment expliqué avoir été surprise de découvrir que le quartier général de l’équipe, situé à Ekeren, et logement proposé par la formation était également le domicile privé de Patrick Van Gansen. 
« J’ai fait l’expérience de deux choses : des traitements abusifs et un comportement inapproprié qui m’était spécifique. Même s’il pouvait être inapproprié avec tout le monde, j’étais bien plus sévèrement touchée », confie la cycliste israélienne qui était passée pro en 2017 avant de rejoindre Health Mate-Cyclelive Team en 2019. 
« (Patrick Van Gansen) ne me payait pas de salaire, donc je n’avais pas les moyens de vivre autre part. Je n’ai pas de maison en Europe, donc j’étais contrainte de rester là. Cela allait bien quand il y avait d’autres coureuses là-bas. 
Certaines cyclistes qui venaient d’Europe pouvaient rester quelques jours entre les courses puis rentrer à la maison, donc je finissais par rester à la maison plus que toutes les autres ». 
Esther Meisels évoque des remarques sexuelles sur son corps de la part de Patrick Van Gansen, affirmant notamment qu’il demandait souvent de l’embrasser ou de lui « faire des câlins ». 
« C’était pire quand j’étais seule à la maison. Il semblait très confortable à l’idée de commenter mon corps. Il me disait que j’avais un beau cul, que j’étais sexy, et me rendait vraiment très gênée », ajoute la cycliste israélienne, qui a confronté le manager en mai 2019, avant de quitter l’équipe de son propre gré en juin.
La Française Chloë Turblin, restée pour sa part une saison et trois mois chez Health Mate-Cyclelive Team, a rapporté au quotidien Le Monde en février 2020 qu’elle a « toujours repoussé les tentatives de Patrick (Van Gansen) de (l)’embrasser » et que ce dernier avait tenté de l’éloigner de ses proches, « en disant qu’ils étaient toxiques pour (sa) réussite sportive ». 
Patrick Van Gansen affirme pour sa part qu’il avait eu une relation amoureuse avec la cycliste française, et qu’il avait été dragué par Chloë Turblin. Cette dernière a finalement porté plainte auprès de la gendarmerie française pour harcèlement psychologique et physique, abus de faiblesse, intimidation et diffamation à l’encontre du manager de Health Mate-Cyclelive Team. 
Le père de Chloë Turblin a pour sa part porté plainte auprès de la commission d’Éthique de l’UCI, accompagnant ainsi celles d’Esther Meisels et de Sara Mustonen. 
« Je me sens mieux car je ne suis pas seule. Quand vous êtes la première à porter plainte, vous vous sentez coupable ou honteuse. Je pense que beaucoup de coureuses ont peur de parler.Je ne veux pas que cela arrive à d’autres personnes », ajoute Chloë Turblin, aujourd’hui active au sein de l’équipe Massi-Tactic.
« Beaucoup de choses sont inquiétantes dans cette équipe mais des commentaires qualifiés de harcèlement sexuels et de harcèlement psychologique ont fait que j’ai souhaité quitter cet environnement. 
J’ai déposé plainte en espérant que quelque chose puisse être fait pour l’arrêter« , a pour sa part expliqué Sara Mustonen en juin 2019 à l’encontre de Patrick Van Gansen, sur le site de Cyclingnews. 
La Suédoise, âgée de 38 ans et professionnelle depuis 14 saisons, pointe certains commentaires du manager, comme « C’est ce que je voulais voir, ton contrat est désormais assuré pour la saison prochaine » alors que Sara Mustonen était sans maillot, en train de se changer avant la présentation de l’équipe. 
« D’autres cyclistes ne sont pas encore prêtes à parler parce qu’elles dépendent toujours de lui. C’est ce qui rend cette situation problématique. Il se nourrit du rêve de ces filles d’être professionnelles. Elles ont peur de perdre leur contrat ».
Des accusations que Patrick Van Gansen nient en bloc, affirmant que ces trois cyclistes n’ont pas eu « un comportement professionnel », n’écoutant pas « les conseils du staff », et « pensant à elles seules et non à leurs équipières ». Le manager a même affirmé quelques jours après les témoignages d’Esther Meisels, de Chloë Turblin et de Sara Mustonen qu’il avait pris conseil auprès d’un avocat afin de lancer une action à l’encontre de ces femmes. 
« Dans tous les cas, je vais faire tout ce qui est en mon pouvoir pour prouver mon innocence et pour laver mon nom », expliquait-il par voie de communiqué. Pourtant, les accusations n’ont cessé depuis l’été dernier, et de nombreuses cyclistes ont confirmé le récit de trois premières sportives à avoir accusé Patrick Van Gansen d’abus psychologiques. 
En tout, ce sont 10 cyclistes qui ont décidé de dénoncer le comportement du manager.
L’ex-cycliste belge Tara Gins ainsi que quatre cyclistes qui préfèrent rester anonymes, ont publié en juin 2019 une lettre ouverte sur le site de Wielerflits, corroborant les principaux problèmes relatés par Meisels, Turblin et Mustonen : « Nous sommes toutes d’accord sur le fait que M. Van Gansen a fait beaucoup de remarques sexuelles et inappropriées durant la période où nous avons fait partie de l’équipe », explique cette lettre. 
« Il est vrai que vous ne pouvez pas discuter avec lui lorsqu’il n’est pas d’accord avec vous. 
Il s’est moqué du corps de plusieurs jeunes femmes et a la capacité d’abuser mentalement de femmes, au point qu’elles se retrouvent brisées et perdent la motivation de pratiquer leur sport. 
M. Van Gansen a deux visages. Celui dont nous venons de parler, mais aussi une personne qui semble être la personne la plus gentille du monde, qui vous motivera et vous aidera. 
Nous avons appris à connaître ces deux visages, mais en fin de compte, le mauvais côté est celui que vous gardez à l’esprit », racontent encore ces ex-pros de l’équipe Health Mate-Cyclelive Team. La formation n’existe plus aujourd’hui suite à la décision des deux principaux sponsors de ne pas reconduire leur contrat, fin 2019.
L’Américaine Liz Hatch, qui a couru sous le maillot de l’équipe CyclelivePLUS-Zannata Ladies Team en 2013, sous la direction de Patrick Van Gansen, a ajouté dans le quotidien Het Nieuwsblad que l’homme avait tenté de l’embrasser, voire plus. 
« Il n’avait qu’un seul but : me mettre au lit. (…) Patrick Van Gansen, un homme que je connaissais à peine, ne voulait rien d’autre que m’embrasser, me toucher ou m’étreindre », explique-t-elle. Et enfin, une dixième cycliste, anonyme, a confirmé au site Cyclingnews, toujours en juin 2019, les accusations de précédentes cyclistes, expliquant qu’elle a notamment vécu dans la fameuse maison d’Ekeren, où Patrick Van Gansen accueillait plusieurs coureuses. 
« Il vivait dans la même maison que nous, il se réveillait en sous-vêtements et il n’y avait aucune vie privée », explique-t-elle. 
« Je ne suis jamais en sous-vêtements ! Je suis toujours habillé et c’est le code que je demandais également aux filles si elles sortaient de leur chambre », a répondu Patrick Van Gansen. 
La cycliste ajoute que le manager ne la payait pas : « Il me disait que pour me payer, je devrais faire à manger pour lui, nettoyer ses voitures et la maison, parmi d’autres tâches ». 
Patrick Van Gansen ne nie pas, affirmant que seule Sara Mustonen recevait un salaire dans l’équipe, en raison d’un budget annuel de 120 000 euros seulement : « Je n’ai pas de sponsor qui peut mettre un million d’euros sur la table. Et cuisiner coûte de l’argent. 
Heureusement, je peux compter sur un staff qui travaille sur base volontaire. (…) Les cyclistes savent (qu’elles ne seront pas payées) quand elles signent leur contrat. 
Mais l’équipe leur donne la chance de prouver leur talent au plus haut niveau et de grandir. En plus, elles reçoivent un matériel gratuit et, qui le souhaite, tous les coûts inhérents et l’hébergement ».
Ces différents témoignages, sous la forme de quatre plaintes (celles du père de Chloë Turblin, d’Esther Meisels, de Sara Mustonen et d’une quatrième personne anonyme), ont été analysés durant de longs mois par l’agence indépendante Sport Resolutions, chargée de faire la lumière sur cette affaire pour la commission d’Éthique de l’UCI. 
Celle-ci a annoncé le 20 avril dernier que Patrick Van Gansen était bien reconnu coupable de violations du code d’éthique de l’UCI. 



« Compte tenu des sanctions recommandées par la Commission d’éthique de l’UCI, l’affaire a été transmise à la Commission Disciplinaire de l’UCI, qui a engagé une procédure en vue de la prononciation d’éventuelles sanctions », annonce la fédération internationale par voie de communiqué, qui ne fait pas de plus amples commentaires, pas plus que Patrick Van Gansen. « Nous ne faisons pas de commentaire sur cela.
L’affaire est toujours en cours et reste confidentielle », a-t-il confié à Cyclingnews.
Cette annonce est notamment une délivrance pour le syndicat The Cyclists’ Alliance, qui avait apporté son soutien aux quatre plaintes déposées auprès de l’UCI. Iris Slappendel, ex-coureuse pro et fondatrice de l’association, explique que cette décision confirme que « la commission d’Éthique prend ce type de plaintes au sérieux et écoute les témoignages.
Cela devrait encourager d’autres cyclistes à parler si elles se trouvent dans une situation similaire ». Les cyclistes qui ont lancé l’alerte confirment également un sentiment de soulagement. 
« J’étais heureuse de lire l’annonce de l’UCI. Sur le plan personnel, elle nous permet, à mes équipières et moi-même, de tourner la page, et surtout elle nous rend optimistes pour l’avenir de notre sport. (…) Ce que j’espère désormais pour les autres cyclistes, c’est qu’elles comprennent que même dans un sport exigeant comme le nôtre, certains comportements ne sont jamais corrects et ne devraient pas être tolérés au nom de la « dureté mentale ». 
Et si vous vous trouvez dans cette situation, sachez que vous pouvez faire quelque chose pour y remédier », confie Esther Meisels sur Cyclingnews.
« Cette décision était attendue depuis longtemps, et désormais, nous pouvons espérer mettre tous ces problèmes derrière nous.
C’est un soulagement de savoir que Van Gansen sera tenu responsable de ses actes et que l’avenir du cyclisme féminin sera peut-être un environnement meilleur et plus professionnel », ajoute Sara Mustonen.
« Savez-vous ce que c’est quand personne ne vous écoute ? »
Chloë Turblin se veut encore prudente vu que la commission disciplinaire de l’UCI doit encore rendre son verdict, mais elle confirme que cette année a été compliquée. 
« En prenant simplement connaissance de l’annonce de l’UCI, j’ai eu le sentiment profond de ne plus me sentir comme une ‘salope’. (…) Culpabilité, gêne et honte. 
Ce sont les trois sentiments qui ont longtemps partagé mon quotidien depuis un an. Savez-vous ce que c’est quand personne ne vous écoute et ne fait attention à ce que vous dites ? 
Au point que vous commencez à vous convaincre que le problème est le vôtre ? Eh bien, c’est mon quotidien, et je souhaite sincèrement que personne d’autre n’ait à vivre cela », explique-t-elle sur Cyclingnews. 
« J’espère que le cas de l’équipe Health Mate contribuera à l’équilibre et au développement du cyclisme féminin. Je ne veux pas que la communauté du cyclisme féminin s’offense, ferme les yeux ou ait honte de ce genre de cas ». 
Et si elle montre sur les réseaux sociaux sa joie à l’idée de retrouver le vélo et de courir sous les couleurs de l’équipe Massi-Tactic, elle confirme que la saison 2020 sera sa dernière au plus haut niveau. 
« Pour l’instant, j’ai perdu toute illusion et toute envie d’évoluer dans mon sport. Je pensais que ça reviendrait, mais non, ça ne reviendra pas. Le cyclisme ne me fait plus rêver ni briller, et c’est un sentiment profond d’échec personnel que de ne pas avoir la motivation et le dynamisme que j’avais avant tout cela », ajoute-t-elle.
Le drame est celui-là. La destruction de ces carrières. La destruction de l’amour-propre de ces femmes qui espéraient rejoindre le monde professionnel pour assouvir leur passion. Malheureusement, les témoignages confirment que cet espoir était vain. 
L’équipe Health Mate-Cyclelive Team n’existe plus aujourd’hui et le manager Patrick Van Gansen n’a pas poursuivi d’autre projet d’équipe UCI. Il attend désormais la décision de la commission disciplinaire de la fédération internationale. 
Comme toutes ces femmes qui espèrent que le verdict annoncé poussera désormais plus de femmes à oser parler face à ces tentatives de les réduire au silence.

Source Cyclisme revue
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