Il était l’un des photographes les plus influents du XXe siècle. Son livre The Americans , composés de photographies en noir et blanc capturées pendant ses traversées du Far West dans les années 1950, reste dans l’histoire comme un chef-d’œuvre de la photographie.
Le vagabond de l’image Robert Frank s’est éteint lundi à Inverness, en Nouvelle-Écosse à l’âge de 94 ans annonce le New York Times .
Sa mort a été confirmée par Peter MacGill de la galerie new-yorkaise Pace-MacGill, qui lui avait consacré de nombreuses expositions depuis 2005.
Né en Suisse le 9 novembre 1924, Robert Frank s’est installé à New York à l’âge de 23 ans.
À tout juste 30 ans, il se lance dans un projet fou, inspiré par le mouvement beatnik: sillonner les routes des États-Unis pour prendre le pouls du Nouveau Monde, sa terre d’adoption.
Lors de son périple, effectué entre avril 1955 et juin de l’année suivante, «Mr. Frank» utilisa pas moins de 700 pellicules. En quatre ans, il prit près de 28.000 clichés.
Le Manet de la photographie
Admirateur et protégé du grand Walker Evans, il vient de photographier les ouvriers des usines Ford de Detroit lorsqu’en novembre 1955, il est arrêté sur la route US 65 par la police de l’État de l’Arkansas, trouvant suspect cet individu «vêtu de manière négligée, qui a besoin d’une bonne coupe de cheveux et de se raser, sans parler d’un bain».
Trois jours de prison sans autre forme de jugement pour ce «Juif» soupçonné d’être un «Rouge», raconta Magali Jauffret dans L’Humanité en 2004. Ailleurs, dans le Sud toujours d’un autre siècle, un shérif lui «donne une heure pour quitter la ville».
En 1958, sa collection de 83 tirages est publiée sous le titre The Americans, recueil des clichés capturés entre New York et San Francisco en passant par la Nouvelle Orléans et le Midwest.
Des images rentrées dans l’imaginaire américain qui a valu à Frank le surnom du «Manet de la nouvelle photographie». L’ouvrage fut préfacé par Jack Kerouac, le roi de la route en personne.
La parution du livre, en 1958, fut perçue comme une critique de l’«American Dream» désenchanté.
The Americans valu à Frank d’être taxé d’antiaméricanisme, dans un pays obsédé par la chasse aux sorcières.
«C’était la première fois que je traversais ainsi le pays, confiait-il au moment d’être honoré au Tate Modern de Londres, fin 2004.
Et je me suis vite aperçu, surtout dans le Sud, à quel point le racisme contre les Noirs était absurde.
Pas besoin d’être juif, pas besoin d’être émigré pour voir cette injustice. Je la ressentais.
Je ne travaille pas avec l’intellect, mais avec l’émotion.» L’année passée, pour les 60 ans de l’ouvrage, Frank était mis à l’honneur des Rencontres photographiques d’Arles.
Source Le Figaro
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