Dans une tribune au « Monde « sept signataires, parmi lesquels l’écrivaine Michelle Perrot et le cinéaste Jean-Louis Comolli, exhortent le ministre de la culture à ne plus se faire le « complice » de la réhabilitation de l’architecte Le Corbusier (1887-1965), compromis en son temps avec le fascisme et Vichy........Détails........
Nous savons le ministre de la culture et de la communication, Franck Riester, particulièrement engagé dans la lutte contre toute forme de discrimination. Ainsi, le 21 février dernier, il déclarait : « À l’antisémitisme, nous opposerons la plus totale fermeté et le temps long de l’éducation et de la culture. »
Nous en sommes convaincus : si M. Riester apprenait que son propre ministère fait la promotion d’un antisémite, il en serait scandalisé.
C’est pourtant ce qui arrive : en soutenant le projet de musée Le Corbusier, prévu à Poissy par le Centre des monuments nationaux, qui est sous sa tutelle, ce ministère se fait le complice de l’entreprise de réhabilitation d’un homme qui s’est réjoui de la défaite française de juin 1940 avant de se faire recruter par le régime collaborationniste du maréchal Pétain.
Membre rémunéré d’une commission officielle, Le Corbusier a séjourné dix-sept mois et demi à Vichy.
C’était l’aboutissement d’une longue trajectoire pour cet architecte, qui fréquentait les milieux fascistes depuis les années 1920 et, régulièrement, confiait en privé son antisémitisme.
Sans ambiguïté, Le Corbusier s’est rallié au vainqueur national-socialiste en publiant en 1941 un livre où il écrivait : « Une lueur de bien : Hitler. »
Nous tenons à disposition tous les documents nécessaires pour confirmer nos dires.
Certains nous répondraient peut-être que l’œuvre de Le Corbusier mérite d’être connue et soutenue, car il est l’un des plus grands architectes du vingtième siècle.
Nous ne contestons à personne le droit d’aimer son travail, mais nous soulignons qu’il s’agit là d’une appréciation subjective : chacun est libre de le juger comme il l’entend.
Le Corbusier n’a d’ailleurs jamais fait l’unanimité.
Le philosophe Ernst Bloch voyait dans ses théories urbaines une volonté de réduire les hommes de chair et d’os « à l’état de termites standardisés », l’historien de l’art Pierre Francastel voyait dans le projet de Le Corbusier un lieu de « dressage » et de « servitude ».
En face des jugements individuels sur la valeur artistique de son œuvre, il y a les faits : les propos antisémites de Le Corbusier, sa participation au comité directeur de revues fascisantes, son approbation des émeutes antiparlementaristes de février 1934, qualifiées par lui de « réveil de la propreté », son apologie de l’autorité, sa théorie du « plan dictateur ».
Sympathisant d’extrême droite dans les années 1920 et 1930, il rencontre le Maréchal Pétain le 27 mars 1941 avant de rejoindre Paris en juillet 1942, frustré que son plan d’urbanisme pour Alger ait été rejeté.
Dans la capitale, il sera jusqu’en avril 1944 conseiller technique à la fondation du docteur Alexis Carrel, théoricien de l’eugénisme et membre du Parti populaire français de Jacques Doriot.
Source Le Monde
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