dimanche 1 février 2015

Journal des élections israéliennes : Mme Netanyahu et le scandale du " Bottle-gate "

 
 
Pendant les six ans de leur résidence rue Balfour à Jérusalem, la famille Netanyahou a largement fait parler d'elle, détails intimes à l'appui et scandaleuses descriptions du comportement déplacé de Mme N. connues grâce à des fuites provenant d'anciens employés de maison et relayées par les médias...

Certains font l'objet d'enquêtes et de poursuites judiciaires, d'autres sont de purs ragots. Tous nuisent à l'image de Netanyahou et mettent en évidence l'environnement dans lequel il prend les décisions concernant l'avenir du pays. Il en va par exemple du "lit volant" que Mme Netanyahou voulait faire installer dans un avion pour un vol de 5 heures, et des "ice cream gate", qui illustrent les goûts de luxe du couple et sa préférence pour la glace à la pistache.
Mais cette semaine, la campagne électorale a été secouée par un nouveau scandale, celui de la "bottle-gate".
Pendant le second mandat de Netanyahou, sa femme aurait empoché des milliers de shekels en liquide provenant de bouteilles vides consignées, qu'elle aurait fait collecter par son personnel à la sortie des supermarchés et qu'elle se serait appropriée.
D'après le rapport initial paru dans le quotidien Haaretz, les Netanyahou ont fait un chèque à l'Etat de près de 900 euros (comme le reconnait le bureau du Premier ministre), soit la valeur estimée des bouteilles consignées, mais moins que l'argent effectivement perçu par Mme Netanyahu.
Etant donné que les bouteilles ont été achetées avec l'argent public, l'affaire a été portée devant le contrôleur de l'Etat et le procureur général qui se sont renvoyés la patate chaude ces derniers mois craignant une affaire pénale. Détournant l'attention des tensions aux frontières libanaise et syrienne, l'information s'est répandue comme un virus, avec des illustrations montrant Sarah Netanyahou entourée de bouteilles recyclées.
Netanyahou a rejeté ces allégations qu'il considère comme diffamatoires et destinées à compromettre sa réélection, dénonçant sur Facebook le dénigrement médiatique de sa femme. "Il y a de puissantes forces dans la presse israélienne qui croient dans le recyclage", a-t-il accusé les médias, son plus grand ennemi du jour. "Le public israélien est plus intelligent que ça", a-t-il ajouté.
Le Premier ministre a toujours dénoncé un traitement injuste par le quatrième pouvoir, malgré la très large diffusion dans le pays du quotidien Israel Hayom pro-Netanyahou, dont le propriétaire est le magnat des casinos Sheldon Adelson et malgré son contrôle sur la télévision et les radios publiques.
Par le passé, les accusations de Netanyahou à l'encontre des médias avaient du vrai; sa femme, fréquemment dépeinte comme une Imelda Marcos/Marie Antoinette vindicative, était la cible de plaisanteries et de mépris. Mais, cette fois, cela va au-delà d'une rumeur répandue par un employé insatisfait. Lorsqu'il est question de soupçons de faits criminels et de l'argent de l'Etat, le public israélien peut en effet être plus intelligent et demander des comptes.

2. L'affaire V-15

Les conseillers juridiques de Netanyahou étaient occupés sur un autre front cette semaine, en formant appel devant la Commission électorale centrale contre le V-15 (Victoire 15), un groupe supposé apolitique qui oeuvre à augmenter le taux de participation afin de faire tomber le "régime actuel". L'association, en partenariat avec l'association pour la paix "One voice" ("Une voix"), a embauché Jeremy Bird, l'ancien conseiller du président américain Barack Obama, faisant état d'accusations de financement étranger anonyme et de violations de la législation relative au financement des campagnes électorales.
AFP"Israeli Prime Minister Benjamin Netanyahu and US President Barack Obama"

Bien que Bird travaille sur la question des campagnes électorales à travers le monde, les spéculations vont bon train, selon lesquelles l'administration américaine serait derrière une tentative de faire tomber le gouvernement en place.
Une des plus grandes craintes de Netanyahou est une récupération par Obama. Presque aussi fréquents que les scandales de la maison Netanyahou, les clashs entre le Premier ministre israélien et le président américain ont ponctué ces six dernières années.
Mais la portée de l'invitation du Congrès républicain à l'attention de Netanyahou pour qu'il s'exprime le mois prochain est sans précédent. La semaine dernière, au lieu de résorber les tensions, celles-ci ont été exacerbées, laissant un espoir de réconciliation entre le Premier ministre et le président aux seuls optimistes. Les hauts responsables américains ont briefé les journalistes avec des mots sévères contre Netanyahou et son ambassadeur aux Etats-Unis Ron Dermer, perçu comme l'instigateur de cette invitation par le Congrès, effectuée à l'insu d'Obama.
Malgré les appels de dirigeants démocrates et juifs en faveur du report du discours, lui demandant instamment de reconsidérer sa décision, Netanyahou n'a pas accepté.
Au contraire, il continue de se confronter publiquement à Obama, en revenant sur le danger d'accéder aux demandes iraniennes d'assouplissement des sanctions, insistant sur l'importance du discours afin d'empêcher un accord sur le nucléaire iranien. Admettons qu'une erreur pourrait porter un coup fatal à sa réélection.
Quoiqu'il en soit, si Netanyahou est vraiment préoccupé par la récupération, il devrait penser aux 18 mois pendant lesquels il aura -plutôt plus que moins- besoin de la Maison Blanche. Il serait peut-être plus sage pour lui de rester chez lui.

3. Le retour de Begin

Un grand suspense et un drame de dernière minute ont accompagné la fin de la première phase des élections 2015, alors que tous les partis ont déposé leur liste définitive de candidats jeudi. Quelques heures avant la date-limite, le recrutement surprise par Naftali Bennett de l'ancien joueur de football Eli Ohana est un but contre son propre camp. Suite au tollé provoqué par sa nomination parmi les composantes religieuses du parti de Bennett, Ohana a annoncé qu'il se retirait.

Le changement d'Ohana constitue la première erreur stratégique dans une campagne jusque là réussie, et pourrait constituer un tournant important dans les aspirations politiques de Bennett. Alors que ce dernier cherche à élargir l'audience de Habayt Hayehudi en transformant ce clan traditionnaliste en un parti politique à base élargie dont il serait le candidat légitime à la fonction de Premier ministre, les rabbins sont bien moins enthousiastes à cet égard, et tiennent encore quelques leviers au sein du parti.
Un court moment après le retrait d'Ohana, Netanyahou aussi, a apporté une amélioration de dernière minute à la liste du Likoud, en plaçant l'ancien ministre Benny Begin en 11e position sur sa liste. Begin, fils de l'ancien Premier ministre Menahem Begin, homme populaire du Likoud, est une ancienne personnalité politique respectée, évincée lors des précédentes élections internes du Likoud. Son retour, à la demande de Netanyahou, pourrait bien plus ramener les électeurs traditionnels du Likoud que d'autres noms auxquels il avait pensé ces derniers jours.

Par Tal Shalev
Source I24News