C’était le moment de la prière des morts quand Mohamed Merah a surgi et tué un enseignant et trois enfants de l’école Ozar Hatorah de Toulouse: Jonathan, alors 17 ans, a raconté lundi la douleur «insoutenable» de ce 19 mars 2012, devant la cour d’assises spéciale de Paris.......Témoignage........
Il ne regarde pas Abdelkader Merah, le frère du tueur, rejugé après avoir été condamné à 20 ans de réclusion en première instance pour association de malfaiteurs terroriste mais acquitté du chef de «complicité».
Elève avocat, le jeune homme surmonte sa peine pour tâcher d’être précis, relater en détail ces 36 secondes d’horreur et les heures interminables où les élèves restèrent confinés au réfectoire, pendant que les médecins légistes travaillaient dans la cour.
Ce jour-là, il est dans la synagogue de l’école quand il entend les premiers coups de feu.
«Des pétards», pense-t-il. Mohamed Merah vient de tuer Jonathan Sandler, professeur de religion, 30 ans, et ses deux fils, Arié et Gabriel, 5 et 3 ans. Se penchant à la fenêtre, il voit «une personne casquée entrer dans l’école» qu’il imagine être «un coursier».
Les tirs reprennent. Dans la cour, le tueur a fait feu sur Myriam Monsonégo, 8 ans, la fille du directeur d’école, revenue chercher son cartable.
La conseillère pédagogique fait irruption dans la synagogue et crie «Il y a un tireur dans l’école !» Jonathan répète le message au directeur. «Ses yeux s’écarquillent, il court. Dehors, il tombe sur sa fille».
Dans cette «toute petite école», 200 élèves de la 6e à la terminale, tout le monde se connaît. Comme une «famille».
Jonathan a déjà gardé Myriam, une gamine discrète, qui se cachait sans sa chambre sauf quand il «se mettait au piano». Il a aussi gardé Arié et Gabriel, des petits joyeux.
Dans la panique qui croît, les élèves cherchent un réconfort. «J’ai 17 ans, les plus petits viennent vers moi, me prennent les mains, les bras.» Ils vont être conduits au réfectoire, où il seront confinés de 8H00 à 11H00.
«Il y a 50 ou 60 gamins qui hurlent, pleurent, tapent du poing contre les murs. Un gamin de 13 ans hurle à se griffer le visage, jusqu’à s’en arracher les vêtements.
Il crie +Myriam est morte, Myriam est morte !+. C’est quelque chose qu’on n’est pas censé vivre», dit le jeune homme.
«C’est tellement insoutenable que j’ai un moment de folie. C’est trop dur. Je sors, je cours vers la sortie. Je tombe. Il y avait du sang partout, je vois le cartable de Myriam plein de sang. Même les médecins avaient l’air choqués», poursuit-il.
Sept ans plus tard, «la vie reprend ses droits» mais il y pense «tout le temps». «Il n’y a rien ni personne qui pourrait réparer ça».
Il dit sobrement «la peur» des survivants, ceux qui ne vont plus jamais au cinéma ou en terrasse, ceux qui sont venus témoigner et ceux qui n’ont pas eu la force.
Futur avocat, il a «totalement conscience du droit de la défense à un procès équitable», et il espère que les preuves permettront de «retenir la complicité» d’Abdelkader Merah.
«J’ai du mal à vivre avec l’idée que peut-être il est complice et que peut-être il ne sera pas condamné pour ça.»
Le 19 mars clôt la déambulation sanglante de Mohamed Merah, qui a déjà tué trois militaires - Imad Ibn Ziaten, 30 ans, Abel Chennouf, 25 ans, et Mohamed Legouad, 23 ans - à Toulouse et Montauban les 11 et 15 mars.
Le matin de ce 19 mars, le jihadiste s’était caché dans une résidence pour tuer deux autres militaires, qu’il n’est pas parvenu à approcher.
Furieux, il avait alors tourné en scooter dans les rues et s’était retrouvé devant l’école juive, avait-il lui-même expliqué aux enquêteurs avant d’être abattu par la police.
Le verdict est attendu le 18 avril.
Source Liberation
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