mercredi 3 juin 2015

Un islamiste tué par le Hamas à Gaza...


Les forces de sécurité du Hamas ont tué hier un chef salafiste dans la bande de Gaza, pour la première fois depuis l'escalade des tensions que suscite la montée en puissance des radicaux dans l'enclave palestinienne en plein marasme politique et économique. La bande de Gaza est en butte depuis la fin de la guerre avec Israël (juillet-août 2014) à la confrontation de plus en plus tendue entre le Hamas, au pouvoir dans ce territoire, et les radicaux de plus en plus actifs et visibles. La détérioration de la situation fait redouter à certains experts une implosion, après trois conflits avec Israël en six ans...Analyse...


Youssef al-Hanar, âgé de 27 ans, a été tué chez lui à Cheikh Redouane, dans le nord de la ville de Gaza, dans un échange de tirs avec les forces de sécurité. Des sources locales l'ont décrit comme une figure salafiste relativement connue. D'autres disent qu'il appartenait à un groupe affilié à l'organisation État islamique (EI). Les forces de sécurité étaient venues l'arrêter pour activités illégales, a dit sans plus de précision le porte-parole du ministère de l'Intérieur, Iyad al-Bozoum. Il a refusé de se rendre, a tenté de piéger sa maison pour la faire sauter et d'actionner une ceinture d'explosifs, a-t-il dit. Auprès de la maison aux murs éclaboussés de sang, l'un de ses frères a raconté que Hanar avait « ouvert le feu quand ils ont ouvert le feu sur lui ».

Armes et munitions saisies


Marié et père de trois enfants, il n'avait jamais fait de mal à personne, a assuré sa mère Bassima. « Ils l'ont tué à cause de ses opinions », a-t-elle dit. Environ 200 personnes ont assisté aux funérailles du défunt, mis en terre dans un drapeau noir dans un cimetière voisin.
Les forces de sécurité ont saisi chez lui des munitions et des armes, selon les photos publiées sur le site du ministère.
Le mouvement islamiste Hamas est confronté à une série d'actions, jusqu'alors limitées, contre ses structures ou ses responsables ou des intérêts internationaux, ainsi qu'à l'apparition d'un groupe se nommant Les Partisans de l'État islamique à Jérusalem.

Aucun groupe n'aurait obtenu l'adoubement de l'EI, et les Partisans de l'État islamique pourrait n'être qu'un « minuscule groupe clandestin parmi un mouvement salafiste jihadiste favorable à l'EI et très fragmenté, mais qui n'est pas complètement aligné sur l'EI », écrivait récemment Aymen Jawad al-Tamimi, expert au Middle East Forum basé aux États-Unis. 

« Baril de poudre »

Le Hamas, qui mène une vigoureuse répression, continue à ce stade à contrôler la situation, estiment les experts.
Mais ils s'inquiètent du cocktail explosif que constitueraient le désespoir économique, l'absence de reconstruction après les dévastations de la guerre, l'enfermement dû aux blocus israélien et égyptien, les querelles intestines palestiniennes, les attentats dans le Sinaï égyptien voisin et l'attrait du jihadisme sur la jeunesse, dans un territoire exigu sur lequel s'entassent 1,8 million de personnes.
La bande de Gaza est un « baril de poudre », résumait lundi le ministre allemand des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier en visite dans l'enclave.
Les Partisans de l'État islamique à Jérusalem viennent de revendiquer des tirs de mortier contre une base de la branche armée du Hamas le 8 mai, un tir de roquette près de la ville israélienne d'Ashdod le 26 mai, et un attentat à la bombe dimanche contre la voiture d'un homme exerçant, selon eux, de hautes responsabilités dans les forces de sécurité du Hamas. De son côté, le Hamas a procédé à des dizaines d'arrestations dans la mouvance salafiste, ce qui a notamment ajouté aux crispations.
Les experts invoquent l'extrême opacité à Gaza et au Hamas pour mettre en garde contre la difficulté d'analyse et contre le risque de manipulation de toutes parts. Ils soulignent que le Hamas est divisé et que certains en son sein pourraient instrumentaliser la menace radicale, tout en restant dans l'organisation.

En revanche, d'autres au Hamas, notamment dans sa branche armée, pourraient avoir choisi la rupture parce qu'ils refusent la trêve avec Israël ou ne touchent plus assez d'argent. Ce danger s'ajouterait à celui des jihadistes revenus de Syrie, de Libye ou du Sinaï.
Source L'Orient le jour