Dans un village à cheval entre la Cisjordanie et Israël, un collège arabe emprunte tous les jours une voie étroite : enseigner l'islam à travers une nouvelle interprétation des textes à la lumière de la modernité et, ce faisant, changer la relation aux juifs et à Israël
Le collège Al-Qasemi, qui forme lui-même enseignants et imans, s'enorgueillit d'être pionnier en matière d'enseignement d'un islam modéré.
Son Président, Mohammad Essawi, fait un engagement personnel de la modernisation de ces études religieuses, mais aussi de la réduction de la "fracture" entre minorité arabe et majorité juive en Israël.
"Nous avons une approche unique des études islamiques, qui comprend l'enseignement de la philosophie, le développement de l'esprit critique et même l'enseignement comparé des religions", explique-t-il.
"Nous voulons promouvoir le développement des ressources humaines arabes en Israël, ce qui implique pour nous un enseignement du libre-arbitre, des droits de l'Homme, et notamment de l'égalité homme femme".
il ne faut cependant pas imaginer une situation idyllique : dans son collège, Essawi doit combattre les préjugés vis-à-vis des juifs, les réticences à l'égard du développement du droit des femmes, comme une relative bienveillance à l'égard du terrorisme.
D'autant que ses voisins juifs ne lui facilitent pas la tâche : méfiants, ils ne lui accordent même pas le bénéfice du doute. "C'est une cinquième colonne" commente l'un d'eux.
Al-Qasemi est situé à mi chemin entre Tel Aviv et Haïfa, dans le village de Baqa, à l'est de Hadera. L'Est du village est situé dans les territoires administrés par l'Autorité palestinienne.
Le collègue a été créé en 1989 par des musulmans soufistes (réputés modérés et apolitiques) pour enseigner "la Charia et les matières islamiques".
Leur influence demeure importante sur l'esprit du collège et deux fois par mois, l'administration israélienne laisse Abd Al-Rauf Al-Qawasmi, un dignitaire religieux respecté qui dirige le conseil du collège, venir de Hébron, où il vit, jusqu'à l'établissement dont il s'occupe.
Le collège a depuis longtemps dépassé sa mission originelle : ses 3500 étudiants apprennent aussi bien la littérature anglaise que les mathématiques et y passent baccalauréat comme diplômes universitaires. Mais les études islamiques restent l'étendard du directeur.
"Je pense que ce qui est important, ce n'est pas de changer les choses où elles sont le plus faciles à changer, mais là où elles sont importantes à changer", explique Margalit Ziv, une enseignante juive en charge des études universitaires mais aussi du centre de la petite enfance, "Bidayat" (les débutants en arabe).
"Nous enseignons deux types de valeurs", explique-t-elle, " les valeurs islamiques, et les valeurs universelles fondamentales d'égalité et de démocratie" en ajoutant que "ce n'est pas rien, dans un établissement comme celui là, qu'une femme, et une juive, dirige les programmes universitaires".
L'essentiel du financement de l'école vient du ministère israélien de l'éducation, convaincu par le projet, qui certifie aussi les diplômes universitaires, les études islamiques faisant partie de ce que l'on appelle en Israël, la matière du "secteur arabe".
Quand au centre Bidayat, comme il n'y a pas d'école maternelle publique en Israël, il est financé par un philanthrope juif californien, Robert Price.
Source Israel infos