La trilogie "Chained"/" Beloved"/" Stripped" fut l’un des événements de l’année cinématographique 2020. L’Israélien Yaron Shani y raconte, sous trois angles différents, une histoire qui mêle plusieurs personnages, dans le même quartier, à Tel-Aviv. Un policier corpulent occupe l’espace de "Chained"........Détails........
Cet homme attachant est très amoureux de sa femme, qui a une fille d’un premier mariage et dont il attend un enfant. L’avenir semble leur appartenir et pourtant tout va dérailler.
Le fœtus ne survit pas et, dans le même temps, le policier est accusé d’attouchements lors d’une fouille au corps. Et c’est ainsi qu’un couple se délite et qu’une vie prend l’eau de toute part.
L’homme, intègre jusqu’à l’obsession, se désagrège sous nos yeux et c’est terrible. "Stripped" est une autre descente aux enfers, celle d’une dessinatrice et romancière victime de la drogue du violeur.
Elle ne se souvient de rien de précis et cette incertitude la plonge dans une profonde dépression.
En face de chez elle, un lycéen maladroit avec les filles voit lui aussi son avenir s’obscurcir : il n’aime que la musique mais doit abandonner sa passion pendant trois ans pour faire son service militaire.
Déconstruit comme les êtres qu’il décrit, "Stripped" est constamment original et surprenant. Le film nous prend à la gorge et ne nous lâche pas. "Beloved" est moins intense.
On y retrouve la femme du policier, bien aidée par un groupe de copines tendres et caressantes pour rebondir après sa fausse couche.
Mais cette "sororité" appuyée a un côté fade et lassant. Autre réserve, qui vaut pour les trois films : l’utilisation systématique du flou quand sont filmés la nudité et le sexe, pourtant au cœur de la trilogie, et particulièrement de "Stripped". Le metteur en scène joue avec la frustration du spectateur dans un dispositif qui dénonce évidemment le voyeurisme. Pourquoi, alors, ne pas cadrer différemment ?
Pourquoi montrer des corps aussi frontalement pour en cacher l’intimité ? Yaron Shani dit vouloir ainsi se démarquer d’"une culture hypersexualisée et même pornographique" et protéger la part importante de réel qu’il a mis dans ses fictions.
La répétition de ce gommage pudibond finit par retirer aux personnages une partie de cette chair violente qui les anime – pour le meilleur et pour le pire. L’ensemble n’en reste pas moins saisissant, entre Maurice Pialat pour l’hyperréalisme des tensions familiales et Krzysztof Kieslowski pour l’exploration glaciale d’un destin qui étouffe les individus.
Coffret "Chained", "Beloved" et "Stripped" (DVD Art House/Arte Edition et VOD).
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