En Une, Lorànt Deustch qui nous guide sur les pas de la Wehrmacht, des "collabos" ou d'une évocation suspecte de Céline ou des Juifs. Au fil des pages, des anecdotes qui semblent tout mettre sur le même plan et racontent la rafle du Vél' d'hiv un peu comme un Guide du Routard. On a lu pour vous.......Détails.........
Un nouveau Hors-série du Parisien est sorti le 13 mai, Le Paris de l’Occupation. Huitième numéro d’une collection pour “tout connaître de l’histoire de Paris” qui comptait déjà, en vrac, Le Paris d’Haussmann (N°4), Le Paris du Moyen-Âge (N°1), Le Paris des Années folles (N°7) ou Le Paris des grands rois (N°2), cet opus intriguait dès la Une : sous le sous-titre “Collaboration, Résistance, vie quotidienne”, la silhouette de Lorànt Deustch, mains sur les hanches.
Dissipons d’emblée un malentendu : le Parisien n’a pas confié les rênes à Lorànt Deutsch, comme France 2 l’avait missionné, le 2 mai, dans un tandem ouvertement monarchiste avec Stéphane Bern, pour une émission de prime time sur... la Révolution française.
Ici, le comédien et auteur du best seller Métronome semble n’avoir signé aucun des textes sur les 103 pages que compte le hors-série.
L’éditorial n’est pas de lui, mais de Charles Saint-Sauveur, journaliste au Parisien.
Finalement, la présence de Lorànt Deutsch apparaît plus visuelle qu’historiographique : c’est lui qui pose devant l’objectif d’un photographe à travers ce qui se présente comme une série de “balades” dans “le Paris des Allemands”, “le Paris des résistants”, ou… “le Paris des plaisirs” et “le Paris de la mémoire”.
On découvre par exemple au fil des pages :
Lorànt Deutsch d’un air pénétré, en lunettes de soleil, devant le Mémorial des enfants du Vel’d’Hiv.
Ces photos qui finissent par évoquer un roman-photo ne sont qu’une fraction de l’ensemble des visuels du hors-série, qui est richement illustré.
Dans “l’ours” (la colonne qu’on trouve dans tous les journaux, qui mentionne qui fait quoi), Lorànt Deustch figure discrètement parmi les “collaborateurs” du numéro, au milieu de journalistes (membres des services politique et culture du Parisien ou pigistes) et d’historiens.
Mais ce casting interpelle au-delà de la présence de Lorànt Deutsch, qu’on pourrait à la limite réduire à du marketing.
Car le Parisien ne semble pas avoir sollicité des historiens spécialistes de l’Occupation, ou même de la Seconde guerre mondiale et du nazisme.
On trouve par exemple parmi les signatures des historiens comme Guillaume Picon, qui est plutôt… spécialiste des têtes couronnées (et aussi de l’histoire expliquée par la peinture).
C’est lui qui signe par exemple depuis dix ans L’ABCdaire des rois de France (chez Flammarion), Le petit livre des rois de France (au Chêne), des livres sur Versailles ou très récemment The Queen - Elisabeth II, un destin d’exception, qui vient de sortir chez Glénat.
Qu’on soit historien ou journaliste, participer à un tel hors-série n’a rien d’indigne en soi.
Et il y a évidemment quantité de choses à raconter sur l’Occupation dans la capitale, dont certaines mériteraient justement d’être plus connues.
Mais ce qui semble plus étonnant, c’est qu’en contactant le rédacteur en chef du numéro spécial (le journaliste Rafael Pic), on n’ait aucune retour : quelles sources ont été mobilisées (sachant qu’aucune n’est citée explicitement à l’exception d’un ouvrage de 1967 signé d’un journaliste et d’un résistant) ? Quels historiens ont été consultés ? L’équipe éditoriale disposait-elle d’une sorte de conseil scientifique dès lors que les auteurs des textes ne semblent pas spécialistes de cette période ?
Or cette lecture d'une centaine de pages interpelle.
Pas tant parce que l’histoire qui s’y raconte se révélerait maladivement révisionniste, intensément pro-allemande, ou encore fondamentalement antisémite (même à bas bruit).
Techniquement, ce hors-série du Parisien n’est pas un brûlot vichyssois. Et personne aux manettes de cette édition spéciale n’a par exemple oublié la Rafle du Vel’ d’hiv comme on gomme un épisode traumatique ou trop gênant (deux pages y sont consacrées).
Pourtant, à mesure qu’on progresse dans la lecture, s’installe une impression diffuse.
Au point qu’on finit par se demander à quelle (re)lecture de l’histoire on peut bien avoir affaire.
Souvent, c’est le vocabulaire qui fait tiquer. Tandis que le lexique défile, on commence par se dire qu’on n’a pas l’habitude d’entendre évoquer tout cela dans cette tessiture. Pour terminer, page 105 en pensant qu’il y a quand même un souci.
Le terme “épurateur”, par exemple, revient plusieurs fois dans la partie titrée ‘Les lendemains qui (dé)chantent” (curieux titre quand on y pense).
Rien d’aberrant à évoquer l’épuration : c’est un épisode important de l’immédiat après-guerre, même s’il est souvent raconté avec moult lieux communs, à commencer par l’idée d’une épuration sauvage, incontrôlable et arbitraire, dont nous défient les travaux les plus récents.
Source France Culture
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