mardi 24 novembre 2020

Une espionne si discrète....


« Agent Sonya », la biographie d’une des plus redoutables espionnes soviétique. S’il est un domaine où la réalité n’a rien à envier à la fiction, c’est bien l’espionnage, tout au moins tel qu’il s’est pratiqué au siècle précédent. Si le moindre doute vous effleure, à cet égard, la lecture de l’ouvrage que l’historien anglais Ben Macintyre consacre à l’Agent Sonya devrait suffire à forger votre opinion.......Détails.......

Ursula Kuckzinski, alias Agent Sonya, était issue d’une prospère famille berlinoise et juive, grand-père banquier, père statisticien et démographe reconnu. Une famille notoirement engagée à gauche. 
En 1923, Ursula, déjà peu portée à la modération, n’a que seize ans lorsqu’elle rejoint les manifestations qui émaillent le quotidien d’une Allemagne peinant à se relever des dégâts provoqués par la Première Guerre Mondiale. Trois ans plus tard, elle adhère au KPD qui est alors le plus puissant parti communiste d’Europe, directement en lien avec Moscou.
Mariée à un jeune architecte, elle accepte de le suivre à Shanghai, où l’attend un contrat prometteur. 
C’est là que l’occasion lui est donnée de rejoindre un réseau œuvrant pour le compte de l’Union soviétique, avec d’autant plus de détermination que la menace nazie progresse dans son pays. 
Une implication progressive qui prend un tour beaucoup plus sérieux après sa rencontre coup de foudre avec Richard Sorge, un maître espion qui servira loyalement le régime stalinien, jusqu’à ce que celui-ci l’abandonne. 
De son côté, l’Agent Agnès, tout en agissant par pure conviction, joue un rôle en plus important, après avoir suivi des formations très professionnelles et jusqu’à monter ses propres réseaux. 
Agissant d’abord pour les services de renseignement de l’Armée rouge, elle passe ensuite sous la coupe du tout-puissant KGB, sans en être vraiment informée, au point qu’elle ignorera longtemps avoir gagné le grade de colonel, en reconnaissance de ses mérites. 
Qu’importe ! Sa force, c’est justement la manière dont elle dissimule ses activités, évidemment clandestines, derrière une vie de mère de famille bourgeoise, ce qui la rend longtemps insoupçonnable.
C’est ainsi, sur commande, qu’elle quitte la Chine pour la Pologne, puis la Suisse, l’Angleterre, le plus souvent accompagnée de ses trois enfants, nés de trois pères différents, trois agents placés sous ses ordres, mais des hommes qu’elle aimera aussi, chacun de manière différente.
Ce qui est passionnant dans cette saga d’une femme assurément hors du commun, c’est qu’elle permet à l’auteur de nous faire vivre une époque riche en évènements avec une focale bien particulière : celle du secret et, à bien des égards, de la manipulation. 
Elle nous démontre aussi à quel point l’espionnage commence par la collecte méthodique d’informations que l’on peut croire banales, avant d’en arriver à des données beaucoup plus stratégiques. 
C’est ainsi que l’Agent Sonya a permis à l’Union soviétique de ne rien ignorer des progrès accomplis par la Grande-Bretagne et les États-Unis dans la mise au point de l’arme nucléaire.
Notons que Ben Macintyre est un raconteur fort avisé qui nous plonge, avec force de détails, dans ce palpitant récit d’espionnage grandeur nature et aux multiples rebondissements. 
Au passage, il ne se prive pas d’ironiser sur le comportement des services de contre-espionnage occidentaux qui, à l’en croire, ont fait preuve d’une bien inquiétante naïveté, à moins que ce soit de l’incompétence pure et simple, au point de devenir de véritables passoires. 
On se souvient du retentissement qu’ont eu les révélations sur les dégâts provoqués par des agents doubles s’étant glissés au plus haut niveau des services britanniques.
Toujours est-il que ce récit constitue une passionnante plongée dans une période importante de notre histoire, mais vue depuis sa face cachée, tout en nous faisant découvrir des personnalités exceptionnelles.

« Agent Sonya. La plus grande espionne de la Russie soviétique ». De Ben Macintyre. Traduit de l’anglais par Henri Bernard. Éditions de Fallois. 23,40 €.

Source Le Telegramme
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