Tel père, tels fils. Chez les Trump, le refus de voir la défaite en face est génétique, et les gesticulations pyromanes, une affaire de famille.
Alors que le président sortant, tel «une tortue obèse sur le dos sous le soleil brûlant» (dixit le présentateur star de CNN) multiplie les appels à stopper le dépouillement et accuse sans l’ombre d’une preuve les démocrates de lui «voler» l’élection à coups de «bulletins frauduleux», ses deux fils déversent sur les réseaux sociaux des litres d’huile sur le feu, heure après heure. Quitte à faire encore pire - c’est possible - que leur président de père.
Prenons Donald Trump Junior, l’aîné barbu aux 6 millions d’abonnés, qui implore son patriarche peroxydé de lancer «une guerre totale contre cette élection», ajoutant, sans une once d’ironie, qu’il est «temps de faire le ménage et d’arrêter de ressembler à une république bananière».
De quoi se gondoler, d’autant plus que le bonhomme, aux penchants conspirationnistes prononcés, s’y connaît en diplomatie : le jour du vote, «Don Jr» avait posté un planisphère («ma carte de prédiction !») où le monde entier était rouge républicain, à l’exception de la Chine, du Mexique et… de l’Inde, vraisemblablement confondue avec l’Iran.
Quant à Eric Trump, le cadet blondinet aux 4,5 millions de followers, il débite de la manip à un rythme industriel, peu importent les avertissements de Twitter et le surnom de «super contaminateur de bobards» que lui a trouvé Buzzfeed : d’une très prématurée «victoire» en Pennsylvanie à diverses théories complotistes liées au dépouillement.
Citons ces histoires de bulletins trumpistes prétendument invalidés car remplis au feutre, ou carrément brûlés en douce, ces «valises et glacières» de suffrages livrées en pleine nuit dans les centres de comptage… Mensonges aussitôt démontés, aussitôt republiés.
Logique de surenchère et du mégaphone.
Pendant ce temps, Ivanka Trump, la fille chérie, la joue fine. Depuis quarante-huit heures, elle se contente de saluer la réélection d’une poignée de sénateurs et représentants en grâce à la Maison Blanche.
Division des rôles classiques chez les Trump, façon Sopranos : les garçons en charge du business familial (le milliardaire leur a confié les clés de la Trump Organization le temps de son mandat) distribuent les baffes, pointant du doigt les républicains trop tièdes accusés de «lâcher» le daron, pendant qu’Ivanka donne les bons points et se charge de maintenir une vague façade respectable avec son image et ses messages immaculés.
Hobby coûteux
Les éructations des rejetons Trump s’inscrivent dans une tendance chez les autocrates refoulés : celle du fiston chargé de hurler tout haut ce que le père marmonne tout bas. En Israël, Yaïr Netanyahu, l’aîné du Premier ministre nationaliste, en a fait un job à plein temps.
Appelons ça le «troll du trône», un rôle qu’il aurait justement calqué sur… Donald Trump Junior. Tanguy de 29 ans squattant toujours la résidence officielle de ses parents, le «mini Bibi» poste et relaie chaque jour des dizaines de messages à ses 100 000 followers, pour la plupart en hébreu, parfois en anglais.
Il s’agit quasi exclusivement d’un tout-à-l’égout d’attaques haineuses et de théories complotistes délirantes, décriant «les gauchistes» israéliens et américains, les médias dans leur ensemble et les Arabes d’où qu’ils viennent.
Un hobby coûteux, qui lui a valu une poignée de condamnations pour diffamation en Israël.
Et qui, parfois, l’oblige à des excuses sur ordre de papa et ses avocats, comme lorsqu’il insinua lourdement que la présentatrice star de la chaîne 2 ne devait sa carrière qu’à une série de «promotions canapés».
Très proche de la fine fleur de l’alt-right qui a porté Trump au pouvoir et se rêvant conférencier, Yaïr se plaît à «choquer et provoquer» («trigger», en VO) les fameux «mondialistes», jusqu'à relayer des mèmes antisémites ciblant George Soros ou accuser le mouvement de contestation visant son père d’être financé par un fonds secret laissé par le défunt pédocriminel Jeffrey Epstein…
Paratonnerre et ballons d’essai
En 2018, Yaïr Netanyahu, qui estime que les Palestiniens sont une invention et dont on dit l’influence sur son père envahissante, avait même vu son compte Facebook suspendu, pour avoir exhorté ses ouailles à la vengeance aveugle après la mort d’un soldat israélien dans une attaque.
Selon plusieurs intimes du Premier ministre, le fils permettrait ainsi au père de tester ses messages, façon ballons d’essai démagos. Et de servir de paratonnerre en cas de fausse note, s’abritant derrière l’excuse «il ne s’agit que d’un citoyen lambda, sans rôle officiel».
Signe que cette coterie de fils sans filtres s’agrandit sur la planète populiste, Yaïr Netanyahu vient tout juste de lancer un podcast où laisser libre cours à ses délires xénophobes et sa peur des Illuminati. Avec, comme premier invité, Eduardo Bolsonaro. Autre sulfureux fils de…
Source MSN (Libération)
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