À 87 ans et quasi-aveugle, Armand Atlan n'a pas le « profil » du narcotrafiquant endurci. Et pourtant.
Décrit comme une « figure » du banditisme à l'ancienne, cet octogénaire a été condamné, ce vendredi 4 octobre, à 8 ans de prison assortis d'une amende de 500 000 € par le tribunal correctionnel de Paris.
La justice a estimé que cet « Algérois », - nom donné aux juifs pieds-noirs rapatriés d'Algérie -, né à Batna, était l'un des principaux commanditaires d'un trafic international de cocaïne opéré, entre 2009 et 2010, via plusieurs pays sud-américains à destination de la France.
Absent lors de son procès, il se serait réfugié du côté de Netanya en Israël, un mandat d'arrêt a également été décerné à son encontre. Son fils cadet, Franck, 44 ans, également jugé dans la même affaire, a écopé de 4 ans de prison, dont 2 ans avec sursis.
Gérard H., 55 ans, neveu d'Armand Atlan, a, lui, été condamné à 4 ans, dont un an assorti du sursis.
Deux amis de Franck, David A., en fuite à l'étranger, et Olivier S., tous deux âgés de 37 ans, suspectés d'avoir investi dans ce trafic de cocaïne, ont été condamnés à 4 ans de prison.
Sept autres prévenus ont également été condamnés dans ce dossier, principalement pour des faits de blanchiment.
Un frère tué, un fils enlevé et exécuté
Dans leur délibéré, les magistrats de la 16e chambre correctionnelle, présidée par Isabelle Prévost-Desprez, ont souligné qu'Armand Atlan, « malgré son grand âge », n'avait pas « changé de vie ».
Au détour des années 1990, il avait déjà écopé de 18 ans de prison en Angleterre pour trafic de drogue…
La tumultueuse vie de ce père de trois enfants se raconte au fil de 50 ans de banditisme.
Dans le Paris des années 1960, Armand a vu l'un de ses frères, prénommé Sion, tomber sous les balles de la concurrence, dans le quartier du Faubourg-Montmartre.
Trente ans plus tard, l'un de ses fils est enlevé puis exécuté au Brésil pour un mobile resté mystérieux.
Au début de l'année 2009, les enquêteurs de l'office central pour la répression du trafic illicite de stupéfiants (OCRTIS) le voient apparaître dans leurs radars après l'exploitation d'un renseignement venu du Brésil.
Armand, via plusieurs intermédiaires sud-américains, notamment en Argentine et au Pérou, est soupçonné d'organiser d'importantes importations de cocaïne. Le patriarche fait alors l'objet d'intenses surveillances : ses échanges téléphoniques et ses déplacements sont décortiqués.
Alors qu'il est déjà âgé de 77 ans, il effectue plusieurs voyages à destination de l'Équateur et du Pérou, mais également en Europe et en Israël.
Au mois de juin 2009, les policiers anti-stups ont la certitude qu'Armand Atlan. est sur le point de réceptionner 65 kg de coke, dissimulés dans un chargement de marbre, et acheminés par bateau jusqu'au port d'Algésiras en Espagne.
Au fil de leurs surveillances, les enquêteurs identifient également plusieurs complices du patriarche.
À commencer par son fils cadet, Franck, ainsi que son neveu, Gérard H. Deux amis de son fils, David A. et Olivier S., sont, eux, suspectés de prendre une part active à ce trafic. Ces derniers sont d'ailleurs présents en Espagne au moment de la livraison de la cocaïne, arrivée par bateau et négociée 6000 € le kg en Amérique du Sud.
Épaulés par leurs collègues de l'office central pour la répression de la grande délinquance financière (OCRGDF), les enquêteurs de l'OCRTIS mettent au jour les circuits financiers utilisés par Armand Atlan pour blanchir ses profits.
Le trafiquant a notamment recours aux services d'un certain « David de Londres » pour ouvrir des comptes Outre-Manche, avant de rapatrier ses fonds en Israël. Un système de décaisse, via deux sociétés fictives à Paris, utilisées pour effectuer des échanges d'espèces contre des chèques établis sur des fausses factures, a également été établi par les policiers de l'OCRGDF.
Opération « Tango Argentin »
Après avoir matérialisé un nouveau projet d'importation de cocaïne au printemps 2010, les policiers anti-stups ont mis fin à leur opération, surnommée « Tango argentin », au mois de septembre de la même année en interpellant Armand ainsi qu'une douzaine de suspects.
Au cours de sa garde à vue, le patriarche a nié s'être livré à un quelconque trafic de drogue avant de soutenir avoir organisé l'importation de « pierres précieuses » ainsi que d'« or » depuis l'Amérique du Sud.
Une version mise à mal par son propre fils ainsi que par les aveux de plusieurs autres complices.
Au fil de leurs investigations, les enquêteurs ont aussi mis au jour le train de vie particulièrement « important » d'Olivier S.
La perquisition du logement qu'il occupait avec une ancienne escort-girl et ex-participante à l'émission de téléréalité Loft Story a permis la saisie de 16 500 € en coupures de 500 € mais aussi d'un pistolet automatique Glock de calibre 9 mm et son chargeur, d'un important lot de munitions de différents calibres et d'un gilet pare-balles.
Entendue, sa compagne de l'époque a indiqué qu'elle avait bénéficié des largesses financières de son compagnon, sans revenu déclaré, qui lui versait une « rente » de 1000 € par mois et lui offrait des séjours dans des hôtels haut-de-gamme.
Dans son réquisitoire, le procureur de la République a souligné qu'Olivier S., qui compte douze condamnations à son casier judiciaire, était « actuellement détenu dans une autre affaire de trafic de drogue » instruite à Marseille.
Dans ce dossier, ce trafiquant présumé, surnommé Paulo, a été interpellé le 1er juillet dernier dans son appartement parisien par les enquêteurs de la police judiciaire de la cité phocéenne.
Au cours de la perquisition de son domicile, les policiers marseillais ont notamment mis la main sur un fusil-mitrailleur, un pistolet automatique, huit téléphones portables, un brouilleur d'ondes ainsi que 21 000 € en espèces.
Au moment de son interpellation, Olivier S. était aussi en possession d'une montre Richard Mille, modèle McLaren F1, d'une valeur de plus d'1 M€.
Source Le Parisien
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