mardi 22 octobre 2019

«Little Téhéran» à Tel Aviv


En Israël, pas une semaine ne passe sans qu’un gros titre n’envoie des frissons dans le bas du dos en évoquant l’hydre iranienne assiégeant l’Etat hébreu par tous les fronts et flancs, du Liban à Gaza, en passant par la Syrie et désormais l’Irak. Comme aime à le répéter Nétanyahu, Israël ferait face à trois menaces existentielles : «l’Iran, l’Iran et l’Iran»......Analyse.......



On ressent pourtant une forme de décalage, attablé chez Sabzi Gourmet, l’un des restaurants perses du marché aux épices de la rue Levinsky, dans le sud de Tel-Aviv. Face à une plâtrée de riz pilaf et brochettes de bœuf, on évolue dans une réalité parallèle, un monde englouti. 
Au mur est punaisé un drapeau du lion solaire, totem national jusqu’à la révolution islamique. 
En fond sonore, un flot de balades lacrymales chantant le paradis perdu en farsi. Et encore, ici, contrairement à un autre resto à 50 mètres de là, chez Sabzi, pas de portrait encadré du Shah, symbole de cet Iran qui fut l’un des premiers pays musulmans à reconnaître Israël et n’avait pas fait de sa destruction un pilier idéologique. 
La perception de l’Iran par les Israéliens est plus complexe que le croque-mitaine qu'en a fait  Nétanyahou. Vu de Tel-Aviv, l'Iran, c'est Mars –ou plutôt l'Etoile noire pour filer la métaphore – mentalement à des années-lumière,  mais avec l’idée générale que la population est victime du régime plutôt qu’ennemie . Et pour les 200 000 Israéliens d’origine perse, dont un quart est né là-bas avant la prise de pouvoir par les mollahs en 1979, c’est la maison.
Un jour qu’on y feuilletait une biographie de Nétanyahou, un voisin de table quinquagénaire, né à Téhéran, nous a demandé si le livre parlait d’Abou Jihad. Prétexte pour raconter, yeux brillants, ce qui était encore il y a quelques années un secret d’Etat : l’assassinat du chef militaire du Fatah à Tunis en 1988. Notre homme était dans le bateau pneumatique des forces spéciales envoyées dessouder le dirigeant palestinien dans sa villa de Sidi Bou Saïd. «J’ai pas tiré. Dommage. 
Mais mon poste, c’était de garder le canot.» On s’est habitué à ce genre d’anecdotes dans une région où chaque interlocuteur a un jour touché sang, tragédie et histoire. 
Religieux et patriotes, les Juifs perses d’Israël penchent sévèrement à droite, fantassins du Likoud. L’un des leurs, Moshe Katsav, fit leur fierté, qui s'eleva des bidonvilles qu’étaient les camps d’immigrés «orientaux» à la présidence de l’Etat, avant de tomber pour viols. 
Chez Sabzi, on a vu l’ex-cheffe du Meretz (le parti du «camp de la paix») et son assistant se voir refuser le service pour des motifs vaseux, avant que le patron n’éclate de rire une fois le duo de «gauchistes» découragés. La soupe à l’orge, ce jour-là, était plus amère que d’ordinaire.

Source Liberation
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