vendredi 11 septembre 2015

Paracha Nitsavim : " Kol Israël arévim zé lazé "


La paracha de la semaine nous dit « Les choses cachées sont pour Hachem, notre D., mais les choses révélées sont pour nous, nos enfants, à jamais, afin de mettre en pratique toutes les paroles de cette Thora. » (Devarim, 29:28). Rachi explique sur les mots « Les choses cachées sont pour Hachem, notre D. » : Et si vous dites : « Que pouvons-nous faire ? Tu punis l’ensemble du peuple pour les mauvaises pensées du particulier… L’homme connaît-il les pensées de son prochain ? » Je ne vous punis pas pour les « choses cachées », parce qu’elles sont « pour Hachem, notre D. » qui sanctionnera cet individu...


Par contre les « choses révélées sont pour nous et pour nos enfants » [c’est-à-dire qu’il nous revient d’] éradiquer le mal qui nous entoure. Et si l’on ne les juge pas, c’est l’ensemble de la communauté qui est punie…
La Thora condamne chaque Juif pour les fautes de son prochain. Rachi nous dit cependant que nous ne sommes pas tenus responsables des fautes « cachées » et des pensées d’autrui, parce qu’il est impossible de les discerner.
Ce principe découle du concept de « kol Israël arévim zé lazé », c’est-à-dire que tous les Juifs sont garants les uns des autres. Cela ne signifie pas simplement que chaque Juif doit se soucier et s’occuper de l’autre. Le Midrach, sur ce verset, nous informe que lorsqu’un Juif commet une faute, toute la génération est lésée. [1]
‘Hazal affirment qu’au mont Guérizim, chaque Juif endossa, par quarante-huit engagements, la responsabilité de l’accomplissement des mitsvot, tant pour lui-même que pour l’ensemble du peuple juif. Par conséquent, nous sommes tous liés spirituellement, et chaque action, qu’elle soit positive ou négative, affecte directement le reste de la nation.
Ceci soulève une question : si quelqu’un est pénalisé par la faute de son prochain, quelle différence cela fait-il s’il est mis au courant ou non de son acte ? Il souffrira de toutes les façons à cause de cette inconduite ! Rav Aharon Kotler zatsal répond que bien que chaque faute commise affecte défavorablement tout le reste du peuple, si l’on ne pouvait pas empêcher que cette infraction soit commise, elle nous est comptée comme un oness (mitsva que quelqu’un transgresse contre son gré) et l’on n’est pas puni pour une telle action. [2]
Cet enseignement semble contredire les propos du Taz [3], une figure marquante de la halakha.
Il note que le texte du vidouï (confession) que l’on fait je jour de Kippour évoque plusieurs fautes, qui n’ont peut-être pas toutes été commises. Comment peut-on implorer le pardon sur quelque chose que nous n’avons pas fait ?! Le Taz répond grâce au principe de « arvout », la coresponsabilité. Il note que le vidouï n’est pas écrit au singulier, mais au pluriel – « nous avons fauté ». Il explique que « même si la personne [qui demande pardon] n’a pas commis cette transgression, quelqu’un d’autre l’a commise ; or, chaque Juif est le garant de son prochain. » [4]
Rav ‘Haïm Vital affirme que c’est pour cette raison que son rav, le Arizal, récitait tout le vidouï et mentionnait même les avérot qu’il n’avait jamais faites. « Un homme peut n’avoir jamais commis une certaine faute, mais il doit tout de même demander [à D. de lui pardonner] et la confesser. Car si un autre Juif l’a commise, c’est comme s’il l’avait lui-même faite. C’est entre autres pour cela que le vidouï est rédigé au pluriel », disait le Arizal. [5]
Nous avons compris, du verset de la paracha de Nitsavim, qu’une personne n’est responsable des failles d’autrui que si elle avait pu l’empêcher de mal agir. En ce cas, la question posée précédemment reste irrésolue — pourquoi devons-nous confesser les fautes que nous n’avons jamais commises ?
Nous n’avons certainement pas été en mesure d’éviter toutes les fautes mentionnées dans le texte du vidouï, nous ne sommes donc pas coupables d’irresponsabilité ! Devons-nous implorer le pardon alors que nous ne sommes pas fautifs ? Un Talmid 'Hakham donna la réponse suivante. Nous apprenons d’ici l’importance de notre responsabilité d’empêcher autrui de commettre une avéra. Si par exemple, un Juif pratiquant peut influencer un autre Juif à faire techouva, de nombreuses fautes peuvent être évitées.
Mais si ce Juif n’essaie même pas d’aider son prochain, il risque fortement d’être tenu responsable de toutes les mauvaises actions que l’autre fait. Nous avons sûrement déjà été dans une situation similaire, il nous faut donc réciter le texte intégral du vidouï, comme si nous avions nous-mêmes fauté.
À l’approche des Jours Redoutables, cet enseignement nous rappelle que de la même manière que nous devons travailler à nous perfectionner, nous devons également réfléchir au rôle que nous avons dans l’élévation spirituelle de notre prochain. Nous apprenons d’ailleurs du concept de arvout que notre responsabilité vis-à-vis des autres est une partie intrinsèque de notre propre élévation.
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[1] Midrach Tan’houma, Nitsavim.
[2] Michnat Rav Aharon, 1ère partie, Ch. 10, p. 243-244.
[3] David HaLévi, il vécut au XVIIe siècle. Il est l’auteur d’un commentaire colossal sur le Choul’han Aroukh.
[4] Taz, Ora’h ‘Haïm, 607:1
[5] Likouté Thora, Taamé Hamitsvot, Vayikra, 19:18.

Rav Yehonathan GEFEN

Source Torah Box