A l’occasion de la fête de Pourim, célébrée à Jérusalem le 25 février prochain, zoom sur l’arak et ses petites soeurs, la Mahia et la Boukha. Les Juifs n’ont jamais été de grands buveurs. Mais, paradoxalement, ils ont toujours été impliqués dans les productions et commerces d’alcool au fil des siècles. En Europe de l’Est, beaucoup sont distillateurs, une des rares professions qui leur est autorisée. En émigrant aux Etats-Unis, ils importent leur savoir-faire pour produire, illégalement, du whisky pendant la période de la Prohibition.
Aujourd’hui en Terre Sainte, les Israéliens, et essentiellement les jeunes, boivent principalement de la vodka. C’est, de loin, la boisson alcoolisée la plus consommée dans le pays. Mais, de son côté, l’arak a toujours tenu une place de choix au Proche-Orient. Le nectar fait l’objet d’une vraie renaissance aujourd’hui. Chez les Juifs de diaspora, le Scotch whisky est très apprécié, en particulier le whisky de malt. Cet alcool, qui semble fasciner les communautés du monde entier, est profondément ancré dans la culture juive.
Une longue tradition
Cependant, aucune de ces boissons n’est vraiment celle des Juifs. Le whisky appartient aux Irlandais, aux Ecossais, aux Américains ou encore aux Canadiens, en fonction du lieu de sa fabrication. L’arak est avant tout originaire du Liban.
Quant à la vodka, elle vient de Pologne et de Russie.
Il existe néanmoins deux spiritueux, assez méconnus, produits par des Juifs et pour des Juifs : la Mahia marocaine et la Boukha tunisienne. Deux alcools considérés comme des eaux-de-vie (mahia signifie littéralement « eau-devie » en arabe). Ce sont en réalité des brandies fabriqués à base de fruits qui passent ensuite par les étapes de la fermentation et de la distillation. L’idée est de conserver et de révéler l’arôme principal. La plupart des eaux-de-vie viennent de France – en particulier d’Alsace –, d’Allemagne ou de Suisse, tandis que la Mahia et la Boukha sont toutes deux originaires d’Afrique du Nord. Traditionnellement, elles sont fabriquées à base de figues.
Un fruit qui possède une place de choix dans le folklore et la littérature juive… C’est notamment une des sept espèces d’Eretz Israël. En réalité, il est assez difficile de consommer des figues fraîches : beaucoup en font des confitures, mais celles-ci demeurent assez sèches et ne supportent pas bien les voyages. Ce fruit délicat commence également à se détériorer dès sa cueillette. La distillation s’avère donc une solution pratique pour profiter malgré tout de ses saveurs.
Claudia Roden, doyenne de la cuisine moyen-orientale et méditerranéenne, explique dans son ouvrage Le livre de la cuisine juive que la Mahia peut être fabriquée à partir de dattes, de raisins et surtout de figues, parfumés à l’anis.
Et de décrire le processus : « Les figues, ou n’importe quel autre fruit, sont recouvertes d’eau, mélangées avec du sucre et de l’anis et fermentent ainsi pendant 3 semaines.
La préparation doit bouillir et la vapeur refroidie est distillée dans un alambic ».
Il s’agit bien sûr d’une production maison : « Autrefois, la bouteille de Mahia était sur la table du dîner, en compagnie du whisky et du coca-cola », relève Roden.
Anis et figues
Un nouveau micro-distillateur à New York a récemment relancé la tradition. Il s’agit de la société Nahmias et Fils, située dans le quartier artistique de Yonkers YoHo, fondée par Dorit et David Nahmias. La famille de David fabriquait de la Mahia au Maroc, à Taznakht. Aujourd’hui, soucieux d’honorer la mémoire familiale, il a choisi de retourner à la tradition. Le couple produit des lots faits main, au look luxueux.
Par ailleurs, voilà des années que Bokobsa est l’adresse phare pour la Boukha. La famille, originaire de Tunisie, a été la première à produire cet alcool, à Soukra, près de Tunis en 1880. Toujours aussi poétique, le nom Boukha signifie « la part des anges ». Un terme qui s’explique par la grande évaporation d’alcool lors de la fabrication du produit.
Les anges, près des distilleries, seraient donc plus heureux, respirant allégrement les vapeurs d’alcool.
Alors qu’elle s’installe en France, la famille poursuit la tradition. A présent, Bokobsa, demeurée familiale, est devenue une société internationale de producteurs et de distributeurs de vins et d’alcool casher.
La Mahia et la Boukha sont toutes les deux majoritairement utilisées comme des apéritifs. Certains les consomment toutefois en digestifs.
La Mahia Nahmias contient 40 % d’alcool. Elle est présentée dans une jolie bouteille givrée comprenant un motif mauresque à l’avant. Un cadeau à offrir en soirée. L’arôme de la boisson est délicat, et l’alcool n’est pas spécialement agressif. Le parfum d’anis n’est pas reconnaissable à l’odeur, mais s’invite sur les papilles en arrière-goût, après les premières gorgées. Le produit est casher : son prix varie entre 40 et 50 dollars.
La Boukha Bokobsa contient 37,5 % d’alcool. On retrouve des notes fraîches et fruitées et la saveur est un peu huileuse sur le fond. Il vaut peut-être mieux mélanger cet alcool avec de la glace ou l’utiliser en cocktail. La Boukha est également casher. Son prix : 149 shekels.
Enfin, la Boukha Bokobsa Prestige présente un arôme de figue plus prononcé. Elle est meilleure que la Boukha Bokobsa si l’on veut la boire seule. A servir dans un petit verre, à température ambiante. Produit casher. Coût de la bouteille : 183 shekels.
Source JerusalemPost