Le Figaro a recueilli des confidences sur le rapport top secret de la Commission nationale de sécurité bulgare qui a conclu à la responsabilité du Hezbollah dans l'attentat de Bourgas contre un bus israélien en 2012.
Jacque Filipe Martin, Ralph William Rico et Brian Jameson. Deux jeunes Canadiens et un Australien sur les bords de la Mer Noire à l'été 2012. Des touristes en goguette? Non, pour les autorités bulgares, ces trois hommes sont les responsables de l'attentat anti-israélien du 18 juillet 2012 qui a fait six morts et une trentaine de blessés à l'aéroport de Bourgas, à l'est du pays.Le premier y a laissé sa peau, déchiqueté par la charge explosive de plus de 3 kg qu'il transportait dans son sac à dos; ses deux complices sont repartis, via un autre pays européen, vers le Liban dont ils sont tous originaires. Des binationaux, le «cauchemar» des services de sécurité.
«Toutes les pistes mènent à Beyrouth»«Toutes les pistes mènent à Beyrouth», résume un responsable policier au lendemain de la session extraordinaire du Conseil de sécurité, le 5 février, à l'issue duquel Sofia a officiellement mis en cause le Hezbollah dans cet acte sans précédent sur le sol bulgare. «Il y a des informations concernant des financements et une appartenance au Hezbollah de deux personnes», a affirmé le ministre de l'Intérieur Tsvetan Tsvetanov, après six heures de débats à huis clos pendant lesquels les membres du Conseil ont pris connaissance du rapport préliminaire établi par les services de sécurité bulgares et leurs partenaires occidentaux sur cette affaire - un texte classé «secret défense».
Grâce aux confidences de certains des membres du Conseil, on peut néanmoins établir les éléments qui ont permis cette mise en cause tant attendue par Washington et Tel Aviv qui se sont empressés de remettre la pression sur l'Union européenne pour qu'elle reconnaisse le Hezbollah comme «organisation terroriste».
Les terroristes voulaient faire un maximum de victimesLes transferts d'argent en provenance du Liban tout d'abord. Ils avaient pour destinataire le porteur du passeport australien du trio, que les enquêteurs considèrent comme l'artificier du groupe. Les faux permis de conduire américains retrouvés en Bulgarie étaient tous fabriqués dans le même atelier libanais - un lieu «connu» des services de renseignement occidentaux.
Les enquêteurs bulgares disposeraient également d'une photo sur laquelle figureraient des proches parents de l'un des présumés terroristes aux côtés de membres du Hezbollah. Enfin, les policiers ont également établi avec exactitude le timing des déplacement du trio. Ils sont arrivés par avion en Bulgarie munis de leurs véritables passeports, après avoir transité par trois autres pays européens. Mais leur point de départ était Beyrouth où, selon, le patron de l'antigang de Sofia, Stanimir Florov, les deux survivants se trouvent aujourd'hui.
Autre conclusion importante: l'explosion sur le parking de l'aéroport de Bourgas, présenté comme un attentat suicide au début, est aujourd'hui considérée comme «accidentelle». «Les terroristes voulaient faire exploser la bombe à distance dans le bus en mouvement, faisant ainsi le maximum de victimes tout en effaçant leurs traces. Mais soit le porteur de la bombe a fait une mauvaise manip, soit il s'est fait avoir par ses coéquipiers», affirme une source policière.
Ayant reconstitué le parcours des trois hommes en Bulgarie, les enquêteurs sont également persuadés qu'ils n'avaient pas un comportement de fanatiques islamiques mais plutôt de «James Bond en herbe». Et ils n'ont boudé les plaisirs de la vie. «Ils ont fréquenté des hôtels de charme et des restaurants fins, souvent joliment accompagnés», disent-ils.
Ottawa a confirmé que l'un de ses ressortissants est bien impliqué dans cet attentat, précisant qu'il a quitté le sol canadien à l'âge de 12 ans. Les autorités australiennes sont également à la recherche de «Brian», alors que le gouvernement libanais s'est engagé à «coopérer» avec les enquêteurs bulgares. La véritable identité du troisième terroriste, mort dans l'attentat, reste en revanche un mystère. «Force est de constater que les organisateurs de cet attentat ont trouvé un homme que personne ne pleure, ni ne regrette», conclut un policier occidental spécialisé dans la lutte antiterroriste.
Source Lefigaro.fr