L'événement de voit monté en épingle par la presse, parce qu'il n'en s'agit en fait pas d'un. Un portrait de femme de Thomas Couture (1815-1879) a été rendu aux héritiers de Georges Mandel, un important politicien français d'origine juive assassiné en 1944 (1).......Détails........
Couture est un beau peintre. Mais l’œuvre en question paraît faible. Rien à voir hélas entre cette dame placidement assise et «Les Romains de la décadence» (1848). qui domine la grande nef du Musée d'Orsay.
S'il est question en Suisse comme en France de cette restitution, c'est parce qu'il s'agit d'un tableau Gurlitt.
Je ne vais pas vous raconter l'histoire pour la centième fois. Je vous rappellerai juste qu'il a été trouvé à Munich puis à Salzbourg, chez Cornelius Gurlitt, le fils du grand marchand Hildebrand Gurlitt, quelque 1500 œuvres modernes.
La presse les a aussitôt qualifiées de «trésor nazi», avec tous les fantasmes que cela suppose.
Je ne voudrais pas être grossier, mais il me semble que chaque journaliste mâle doit entrer en érection et chaque journaliste femelle mouiller sa petite culotte quand il y a simultanément les mots «spoliation», «nazi», «trésor» et une valeur estimée à la louche d'un milliard d'euros.
Matisse, Liebermann et Pissarro
L'héritier du falot Cornelius Gurlitt, mort à 81 ans en 2013, était on ne sait trop pourquoi le Kunstmuseum de Berne. Mon opinion tout personnelle, est qu'il pensait la Suisse peu culpabilisée, et donc moins prête à restituer que l'Allemagne ou l'Autriche.
Berne a fini par accepter une patate qui s'est révélée moins chaude que prévue. Le Couture n'est que la cinquième œuvre restituée sur 1500 après un Matisse de provenance Rosenberg, un Max Liebermann un Adolf Menzel et un Camille Pissarro. C'est peu en cinq ans.
La chose n'empêche pas le «Figaro» de dire que les experts allemands pensent à 500 œuvres spoliées à des familles juives sans citer le nom du moindre spécialiste.
Les deux expositions du Kunstmuseum de Berne en 2017 et 2018 semblaient pourtant claires. L'une montrait les œuvres blanchies. L'autre celles dont l'historique restait incomplet.
Mais il faut du sensationnel, avec un peu d'approximation au besoin. La chose m'a frappé en relisant en anglais l'article très documenté du «New York Times», publié après une visite au Kunstmusuem de Berne le 20 novembre 2017. Tout s'y voit très bien formulé, avec une histoire des Gurlitt, cette famille de peintres, d'historiens de l'art et de galeristes depuis le XIXe siècle.
Le récit commence avec l'histoire d'un superbe dessin de Kirchner. Il a été acheté par Hildebrand Gurlitt en 1928 pour le musée qu'il conservait alors, et dont il a été renvoyé en 1932.
Devenu marchand, Hildebrand l'a racheté dans une vente suisse en 1940. Il fricotait alors avec le régime hitlérien, qui lui pardonnait du coup sa grand-mère juive. Il avait encore cette superbe feuille à sa mort.
Entre-temps, Kirchner s'était suicidé. En Suisse aussi. Comment faire la part des choses?
(1) Une grande avenue rappelle sa mémoire dans le XVIe arrondissement parisien.
Source Bilan
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