lundi 24 août 2015

Analyse : les gagnants et les perdants des pourparlers entre le Hamas et Israël


Chief of the Islamist Hamas movement Khaled Meshaal holds a press conference in the Qatari capital Doha on July 23, 2014 ( Karim Jaafar (Al-Wwatam Doha/AFP) )

Malgré les démentis du bureau du Premier ministre, cela fait peu de doute déjà depuis plusieurs semaines que l’Etat hébreu et le Hamas négocient indirectement un cessez-le-feu à long terme. Des informations à ce sujet sont publiées presque quotidiennement dans la presse palestinienne...




Les médiateurs turcs ont aussi évoqué publiqument cette prise de contact, de même que Tony Blair qui, malgré sa démissionn du poste de représentant du Quartet au Moyen-Orient, poursuit ses visites dans la région, comme le prouve sa rencontre avec le chef du Hamas, Khaled Mechaal, à Doha au Qatar, où il vit actuellement.
Khaled Mechaal a affirmé en personne vendredi lors d’une interview accordée à la presse, que les pourparlers avec Israël sont "positifs", tandis que des sources du Hamas ont indiqué que Tony Blair avait invité Mechaal à le rencontrer à Londres. Le cadre général de l'accord en question est bien connu de tous: Israël lèvera le blocus à Gaza et en échange, le Hamas s’engagera sur une trêve à long terme.
Les dernières conditions publiées à ce sujet par le Hamas exigent l’accélération de la reconstruction de Gaza, la levée du blocus et l’ouverture d’un port maritime et aérien, ainsi qu’un aménagement approprié pour les 50.000 fonctionnaires du gouvernement du Hamas qui sont privés de salaire depuis plus d’un an.
Mahmoud al-Zahar, l’un des hauts responsables du Hamas à Gaza a envoyé un avertissement à Israël ce week-end, selon lequel la durée du cessez-le-feu (conclu il y un an au terme de l’opération Bordure protectrice) dépend de la levée du blocus.
En d’autres termes, si le blocus n’est pas levé, le Hamas peut renouveler le combat. Le haut responsable du Hamas en Cisjordanie, le Sheikh Hassan Youssef de Ramallah a également affirmé jeudi dernier qu’un accord de cessez-le-feu à Gaza doit aussi être valable pour la Cisjordanie. Khaled Mechaal a déclaré qu’un tel accord sera soumis au débat et devra être approuvé par toute la direction palestinienne.
Qu’un tel accord soit conclu ou non, l’existence de pourparlers de manière indirecte est d’une importance politique majeure. Qui seront les gagnants et les perdants de ces négociations ? Le principal bénéficiaire reste le mouvement du Hamas. Les pourparlers font de la direction du Hamas, dont le chef Khaled Mechaal, une figure politique de grande envergure.
Mechaal s'est rendu récemment en Arabie saoudite. Une visite dite "exceptionnelle" au vu des critiques incessantes des Saoudiens envers le Hamas. Il s’est aussi rendu plusiers fois en Turquie, pays considérée comme l’un des principaux protecteurs de son organisation.
Les négociations avec le Hamas renforcent également le mouvement en tant que partenaire de dialogue avec Israël. Ainsi l’Etat hébreu reconnait le Hamas en tant que représentant de Gaza (et de tous les Palestiniens?) aux dépens de l’AP qui siège à Ramallah.
Mahmoud Abbas et l’Autorité palestinienne, qu’il contrôle depuis Ramallah, sont les grands perdants. Le statut du Fatah et celui de son président Abbas sont de plus en plus affaiblis. Après avoir congédié Yasser Abd Rabbo des postes d’ancien membre du comité exécutif de l’OLP et Secrétaire général de l’organisation, six autres membres du comité ont menacé de donner leur démission.
Par ailleurs, Mahmoud Abbas a fermé les bureaux palestiniens de “l’initiative de Genève” (dont la filiale israélienne est dirigée par Yossi Beilin). Il s’agit d’un acte personnel à l’encontre de Yasser Abd Rabbo qui est à la tête de la délégation palestinienne. La raison de ce licenciement, qui a lieu juste après la fermeture des bureaux de l’ancien Premier ministre Salam Fayyad, découle des craintes grandissantes d’Abbas que des querelles explosent au sein du Fatah, le parti au pouvoir, comme cela a été le cas avec Mohammed Dahlan, qui s’est associé avec des partis adverses pour l'évincer.
D’après les rumeurs qui courent à Ramallah, Abbas est devenu paranoïaque et voit des ennemis partout. Il a récemment demandé à se rendre à Téhéran en vue des accords sur le nucléaire, et l’information est parue en première page du journal Al-Qods. Les Iraniens, pour leur part, se sont empressés de déclarer qu’aucune visite n’était prévue.
Le gouvernement israélien bénéficie aussi de la situation. Un an s’est écoulé depuis la guerre. Le sud d’Israël est plutôt calme. Pas de missiles, pas d’incidents à la frontière. Mais le blocus se poursuit. Les restrictions sur le passage des marchandises et des personnes à Gaza sont constamment assouplies (dont le premier passage de l’équipe de football de Gaza pour un match de rencontre avec l’équipe d'Hébron en Cisjordanie qui a suscité l’excitation des Palestiniens). Mais en principe, le blocus perdure.
Les chances de voir l'accord sur le cessez-le-feu en question donner suite ne sont pas certaines.
Ce qui est certain en revanche, c'est que les pourparlers qui ont lieu, nuisent considérablement à l’Autorité palestinienne à Ramallah. On peut supposer qu’Israël et le Hamas, en tirent tous les deux une grande satisfaction.


Source I24News