À qui puis-je faire confiance ? C’est la question au cœur de Suspicion, la nouvelle . La question que se posent les cinq sujets britanniques soupçonnés de l’enlèvement, à New York, du fils d’une puissante femme d’affaires américaine. Enfin, à première vue, c’est la question qu’ils se posent. Parce que certains, ou un, ou tous, sont peut-être vraiment coupables. Et que certains, ou un, ou tous, étaient peut-être simplement au mauvais endroit au mauvais moment. Suspicion est donc le nouveau représentant de la vague israélienne qui frappe régulièrement la télévision américaine depuis l’adaptation de Be Tipul (devenu In Treatment) en 2008......Détails & Vidéo.......
Réponse(s) au bout des huit épisodes d’une heure, dont les deux premiers arrivent sur AppleTV+ le 4 février.
Ont entre autres suivi les adaptations, plus ou moins libres, de séries devenues Homeland, Euphoria, Your Honor et, la réussite n’étant pas toujours au rendez-vous, The Beauty and the Baker (annulée après une saison). Et ça continue, The Commune (qui se déroule dans un kibboutz) étant en train d’être « américanisée » par Hilary Weisman Graham (connue pour son travail sur Orange Is the New Black).
Voici qu’arrive Suspicion, basé sur la série False Flag dont le point d’origine, très politique, était l’enlèvement, par des Israéliens, du ministre iranien de la Défense de passage à Moscou. L’œuvre originale a été placée entre les mains de Rob Williams (Killing Eve), qui agit comme auteur principal ; et du réalisateur Chris Long (The Americans), qui a planté sa caméra dans la Grosse Pomme et, surtout, à Londres. La capitale britannique devient ainsi un personnage de la série dont plusieurs moments sont captés par les « yeux » omniprésents de vidéosurveillance (CCTV). À cela s’ajoute l’utilisation fort pratique d’échanges de messages texte — procédé qui peut irriter s’il est surutilisé, ce qui n’est pas le cas ici.
Tout commence dans un chic hôtel new-yorkais. Un jeune homme traîne sa valise dans le couloir qui mène à sa chambre. Il est attaqué par quatre individus qui font fi des caméras de surveillance : ils ont « enfilé » les visages de la reine Élisabeth II, du prince Charles, du prince William et de son épouse Kate Middleton. Ainsi masqués, méconnaissables, ils deviennent quasi instantanément omniprésents dans des médias (sociaux et traditionnels), qui diffusent en boucle le kidnapping.
Parce que cet enlèvement est tout sauf anecdotique : âgé de 21 ans, Leo (Gerran Howell) est le fils de Katherine Newman (Uma Thurman), laquelle est à la tête d’une puissante firme médiatique et est sur le point de devenir ambassadrice des États-Unis au Royaume-Uni.
Réglons ici le cas de la star de Kill Bill : glaciale comme une reine des neiges qui n’aurait pas été « disneyisée », elle est au centre de tout dans le récit… mais peu présente devant la caméra, en particulier dans les deux premiers épisodes. Elle apparaît un peu plus souvent dans les chapitres suivants, mais jamais autant que le laisse croire la campagne de promotion de la série. Sauf que chacune de ses apparitions donne froid dans le dos. Cette femme cache quelque chose. Mais quoi ? Que veulent les kidnappeurs quand ils exigent qu’elle « dise la vérité » sinon son fils sera exécuté ?
Et les mots « Tell the truth » de devenir viraux… L’enquête, menée par les deux agents mal assortis (un classique du genre) que sont l’enquêtrice britannique de la National Crime Agency (Angel Coulby) et le représentant américain du FBI (Noah Emmerich), pointe bientôt en direction de citoyens britanniques qui ont passé une nuit à l’hôtel où a eu lieu le kidnapping. Ils sont rentrés à Londres après n’être restés à New York que quelques heures.Comportement suspect, non ?Surtout pour des citoyens lambda n’ayant pas, à première vue, les moyens d’une telle virée outre-mer. Sauf qu’ils ont tous une bonne raison derrière ce voyage éclair. Affirment-ils. En interrogatoire. Encore sous le choc de leur arrestation.
Ils sont Aadesh Chopra (Kunal Nayyar de The Big Bang Theory), qui vend des tapis à la boutique de son beau-père ; Natalie Thompson (Georgina Campbell), qui se mariera dans quelques heures ; Tara McAllister (Elizabeth Henstridge), qui enseigne à Oxford et se bat avec son ex pour la garde de leur fille ; Sean Tilson (Elyes Gabel), qui maîtrise l’art du déguisement ; et Eddie Walker (Tom Rhys Harries), blondinet très au-dessus de ses affaires, autant pour ses coaccusés que pour les enquêteurs.
Il en va de même de leur façade. Mais les apparences sont trompeuses et les secrets, omniprésents.
Il y a plusieurs aspects fascinants dans l’intrigue sophistiquée et pleine de rebondissements de Suspicion — dont chaque épisode commence et se termine par un rebondissement spectaculaire : la très actuelle question de la surveillance tous azimuts, le rôle des médias sociaux, la surenchère dans les (dés)informations, le pouvoir exercé par des puissances qui jouent dans les coulisses du… pouvoir, justement ; etc.
La série ferre ainsi le spectateur dès ses premières images et déboule sur un rythme palpitant, à la 24(même si l’intrigue se déroule sur une semaine). Elle est portée par des personnages qui ne sont pas ce qu’ils semblent être, à la The Americans. Elle présente un jeu du chat et de la souris à l’échelle internationale, à la Homeland.
Il est d’autant plus dommage que sa finale, sans prendre la forme honnie du « tout ça pour ça », soit pâlotte, en regard de la tension installée et des attentes suscitées. Après avoir sprinté sur la ligne rouge, traversé toutes les nuances de gris et s’être débattu dans les eaux troubles, on débouche sur du bien-pensant qui fleure l’opportunisme. Cela en décevra certains.
Suspicion, Sur AppleTV+ dès le 4 février
Source Le Devoir
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