Dans notre numéro 600, actuellement en kiosque, nous donnons la parole à l’artiste Bartabas, à l’occasion de son nouveau spectacle Le Cabaret de l’Exil. Un spectacle festif, fraternel et nostalgique. On y célèbre la vie, la mort, la musique et les mots.......Détails & Vidéo........
Cheval magazine : Ce joyeux cabaret équestre, Cabaret de l’exil, représente un retour aux sources ?
Bartabas : Après le confinement, on est heureux de retrouver le public, de revenir à un théâtre fraternel, de partager autour d’un vin chaud.
Ce cabaret se déclinera pendant quatre ans sur la notion d’exil mais au travers de cultures différentes.
Comme il y a trente-sept ans, on retrouve le maître de cérémonie, la forge, les garçons de salle, les oies, le corbillard alambic, l’orgue, les cloches. Les garçons qui accueillent le public de leur singulière manière sont les mêmes qu’il y a trente-cinq ans. Place aux vieux !
CM : Une renaissance qui a pour thème l’exil…
B : L’exil exige courage et ouverture d’esprit. Au fond, on est tous des exilés. Zingaro signifie Tsigane. Nous nous enrichissons au fur et à mesure de nos pérégrinations.
Le cheval est un vecteur pour aller vers cette notion d’exil. Retrouver son odeur, le parfum de corne brûlée, c’est déjà renouer avec nos racines. Les musiques et les chansons rappellent aussi le pays quitté mais jamais oublié.
Au-delà de l’aspect festif du cabaret, on peut être amené à réfléchir. Que reste-il de notre culture disparue ?
CM : Une mariée sur un cheval de trait cachée sous un dais à traîne, un patriarche ventru à toque de fourrure dialoguant avec son cheval en liberté, un petit âne blanc et sa mule à la queue sculptée… Des tableaux de vos anciens spectacles, des images de Chagall… votre spectacle est un vrai jeu de pistes !
B : C’est une suite de visions très construite mais pas dirigiste. Il y a des clés mais on n’est pas obligé de les voir. Il suffit de se laisser emmener.
Plonger dans la culture yiddish et la musique klezmer des communautés juives d’Europe de l’Est. S’imprégner des rituels traditionnels de mariage ou d’enterrement. Écouter les textes à facéties d’Isaac Bashevis Singer portés par le comédien Rafael Goldwaser.
Le yiddish, vecteur de la culture juive, a longtemps été la langue officielle de nulle part, la langue de l’exil par excellence. Elle est aujourd’hui une langue mourante, qui renaîtra peut-être un jour. Cela amène à réfléchir sur la fin d’un monde mais aussi sa renaissance.
CM : Vous semblez plus apaisé, moins sauvage ?
B : Tsar m’a obligé à la douceur. C’est un infirme. Moi aussi, j’ai été accidenté, à l’âge de 17 ans. Un accident de mobylette avec un camion. Je suis longtemps resté à l’hôpital, lui a été immobilisé pendant six mois dans son box. Cela nous rapproche. Son épaule droite est maintenant réparée mais il doit travailler dans une décontraction absolue. Tout comme moi !
C’est un hanovrien croisé oldenbourg que m’a déniché un ancien écuyer du Cadre Noir. Un géant aux yeux doux. A 7 ans, il a beaucoup d’énergie et il se blesse facilement. Il exige de l’attention.
Ce qui m’intéresse, c’est la finesse du travail, la qualité de la relation. Aller vers l’épure en enlevant le spectaculaire, les fioritures. Je ne veux plus ni démontrer, ni étonner, ni persuader.
L’art équestre est un art majeur. Au travers la relation avec les chevaux, il exprime la relation des hommes entre eux.
Source Cheval Magazine
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