jeudi 20 juin 2019

Meurtres nazis en Ardèche: Enquête sur un corps sans nom


En retrouvant l’identité d’une victime des Allemands, le journaliste Olivier Bertrand dresse un portrait à hauteur d’homme du maquis de Bir-Hakeim. On pourrait douter qu’une enquête menée soixante-quinze ans après pour redonner son nom à un anonyme tombé dans la tourmente de la Seconde Guerre mondiale puisse aboutir.......Détails.........



Le temps noie les indices et engloutit les vivants. Retrouver qui était cet inconnu à qui le village de Labastide-de-Virac rend hommage chaque année est pourtant l’objet principal des Imprudents, son fil conducteur, son acmé. 
Cet «X» a été enterré avec les habitants du hameau Les Crottes, exterminés pour avoir caché des résistants. 
Ce «petit Oradour-sur-Glane» ardéchois a été perpétré le 3 mars 1944. Il y avait quinze corps, or seize ont été retrouvés, et le seizième a été appelé «l’inconnu des Crottes». 
Sensible à ce mystère dont il entend parler depuis l’enfance car sa famille vient de ce hameau, Olivier Bertrand, ex-journaliste à Libé, cofondateur des Jours, part en campagne dans les deux sens du terme : investigation sur les traces susceptibles de faire sortir un homme de l’oubli et road trip dans plusieurs départements.
Rapidement, l’auteur découvre que son sujet a péri un autre jour que les quinze autres, lors d’un combat entre Allemands et maquisards à 3 kilomètres de là, au Mas de Serret, le 26 février 1944, soit quelque jours avant l’expédition punitive allemande. Peu à peu, il engrange les informations. 
Les menus objets retrouvés sur lui par le médecin légiste : une blague à tabac, un briquet, une pipe, un mouchoir kaki avec les initiales J.P. Son surnom : «Grand Père». 
«J’ouvre un placard dans ma tête, pour ranger soigneusement les premiers éléments, ce premier morceau de puzzle.» 
Au fur et à mesure, il récolte d’autres faits, de rares témoignages de gens qui l’ont croisé et même une photo de lui ; mais il est aussi aiguillé vers de fausses origines, de faux patronymes. La moindre trouvaille un peu fondée le fait sauter de joie dans sa cuisine. 
La mise en scène de sa recherche, avec quelques percées autobiographiques, incarne le dialogue du présent avec un temps de héros et de traîtres. Le livre, écrit-il aussi, lui a permis de découvrir que sa famille était pétainiste.
Cette enquête à hauteur d’individu se double d’une plus large sur le maquis de Bir-Hakeim (en hommage à la bataille des FFL) fondé en 1943 par Jean Capel. Ce groupe de jeunes courageux, déterminés à en découdre avec l’occupant et ses sbires, a multiplié les braquages pour dérober du carburant, des armes, multipliant imprudemment les coups d’éclat, comme le casse du magasin de l’intendance de police de Montpellier. 
L’auteur suit le trajet de leurs camps successifs, leurs débuts à Lestibie (Aveyron), le premier combat tragique à Douch (Hérault), le repli dans les Basses-Pyrénées, le Gard et l’Ardèche… 
Des portraits s’en dégagent, comme le flamboyant Christian de Roquemaurel, autant de sources potentielles sur le gars enseveli aux Crottes. 
Quête touchante et forte, qui fait parler les morts et rectifier les légendes. Sinon, comme pour ce bébé d’un couple de Juifs en fuite, inhumé on ne sait plus où : 
«Il n’y a plus d’iris, plus de fleur, plus d’empreinte dans la terre. Plus rien que ce pincement au ventre, pour cette histoire, engloutie elle aussi, si on ne la raconte plus.»

Source Liberation
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