mercredi 3 avril 2013

Eilat transformé par la Chine en plaque tournante du transport pétrolier ?



A l’heure où Israël a démarré l’exploitation du gisement Tamar au large de Haïfa, les écologistes se posent en garde fou. «Durant ce Pessah, la fête de la liberté (ndlr: la Pâque juive commémore la sortie d’Egypte sous la conduite de Moïse, le passage de l’esclavage à la liberté), nous célébrons aussi l’indépendance d’Israël dans le domaine de l’énergie», s’est écrié dimanche, les yeux brillants de joie, la mine triomphante, Benyamin Netanyahou. Le chef du Gouvernement israélien tenait à marquer l’événement avec emphase et éclat. Son ministre de l’Energie Sylvain Shalom renchérissait aussitôt: «Nous allons connaître une révolution énergétique qui va doper l’économie israélienne.»

Tout le bassin maritime israélien serait tapissé de gisements gaziers et pétroliers – en quantité phénoménale. La compagnie américaine Nobel, qui exploite des plates-formes pétrolières dans le golfe du Mexique, affirme avoir découvert dans les eaux territoriales israéliennes les plus grands gisements de la dernière décennie. Le premier, repéré il y a 4 ans, a reçu le nom de Tamar. Situé à 90 kilomètres au large de la cité portuaire israélienne de Haïfa, le gisement off­shore vient de déverser pour la première fois du gaz naturel, sous les applaudissements des dirigeants israéliens, dans l’oléoduc de 150 km de long aboutissant a un terminal du port d’Ashdod. La plateforme de pompage de Tamar – un monstre d’acier – est haute de 290 mètres et pèse 34 000 tonnes. Elle serait, de source étrangère, sous la protection de vedettes rapides équipées de missiles mer-mer et mer-air.

Grandes puissances
Tamar contiendrait pour 250 milliards de mètres cubes de gaz. De quoi approvisionner le marché israélien jusqu’en 2035. Non loin de Tamar, un autre gisement – baptisé Léviathan – est riche de 450 milliards de mètres cubes de gaz. Et sous le gaz il y aurait de vastes nappes de pétrole. Léviathan déborde les eaux territoriales d’Israël et se prolonge vers le Liban et Chypre. Si un accord est intervenu avec les autorités de Nicosie pour délimiter le tracé des frontières maritimes des deux pays, en revanche avec le ­Liban, toujours en guerre avec ­Israël, un conflit s’annonce en perspective. On prétendait que l’Inde avait acheté l’ensemble de Léviathan, mais aujourd’hui, une autre rumeur prend le dessus: la Turquie serait prête à mettre en place un oléoduc sous-marin en direction de la côte turque.

Pékin lorgne aussi du côté du littoral israélien. Et ce d’autant plus que d’autres recherches d’hydrocarbures en Méditerranée orientale semblent prometteuses. Les Chinois proposent de transformer la station balnéaire d’Eilat sur la mer Rouge en port de taille gigantesque afin de permettre aux méthaniers de transporter le gaz liquéfié vers l’Extrême-Orient. Pékin a déjà lancé un projet de double voie ferrée – une voie commerciale et une voie de passagers – reliant le port d’Ashdod à Eilat, et permettant le transport du gaz liquéfié d’un port à l’autre. Toute la physionomie de la région en serait transformée. Benyamin Netanyahou a donné son accord. La voie ferrée permettrait d’éviter le canal de Suez. Selon des calculs effectués dans les bureaux du Ministère des transports à Pékin, cela abaisserait les coûts de moitié.

Recours en justice
En Israël, les écologistes envisagent de saisir la Cour suprême. Mais ils ne sont pas les seuls à dénoncer le projet: quelques économistes et capitaines d’industrie s’insurgent contre la vente à des étrangers de «l’or noir d’Israël». Ils veulent que cette manne énergétique ne serve qu’aux besoins du pays. Et n’excluent pas un recours devant les instances judiciaires. I


Une Terre sans ressource
La presse israélienne se plaît à rappeler une petite facétie de l’ex-premier ministre Golda Meir: elle avait coutume de dire que Moïse s’était trompé de chemin. Au lieu de conduire les Hébreux vers les ­richesses pétrolières du Moyen-Orient, il leur avait fait traverser un désert inhospitalier pour les conduire ensuite à la lisière d’un territoire dépourvu de la moindre trace d’or noir. Golda Meir s’était trompée. Elle n’était pas la seule. Pendant des décennies les géologues israéliens et américains, se fondant sur les textes bibliques, croyaient que les environs de la mer Morte ­contenaient des réserves de pétrole importantes. Ils devaient déchanter. Jusqu’au jour où un de leurs confrères pointa un doigt vers la mer et dit en toute candeur: «Le pétrole, il est là !»


Source Israel Valley