Réalisateur, Barcha Bauer veut consacrer un documentaire de 52 minutes sur l’histoire de Juifs ayant été recueillis à Celles-sur-Durolle (Puy-de-Dôme) pendant la Seconde Guerre mondiale, avec différents témoignages. Déjà réalisateur de plusieurs films sur la Résistance en Auvergne, c’est un sujet qui ne l’a pas laissé insensible. Alors, Barcha Bauer a décidé de se consacrer à l’histoire d’une soixantaine de personnes de confession juive ayant élu domicile à Celles-sur-Durolle, en 1940.......Détails.......
Une histoire racontée dans le dernier livre de Jean-François Faye et Sylvie Vissa, Celles-sur-Durolle, Histoire et histoires, paru aux éditions des Amis des Bois Noirs, grâce notamment, à Mireille Cukier-Jakubowicz, Luxembourgeoise et descendante de ces exilés, qui cherchait à se mettre sur les traces de ses ancêtres, notamment celles de sa mère.
« Un contexte hors du temps »
« Il y a une base véritable, qui est assez intéressante à mettre en images, et aussi au niveau du contenu, explique Barcha Bauer.
Quand on parle Seconde Guerre mondiale, des arrestations, on parle peu de ceux qui se sont retrouvés en Auvergne et ont vécu une vie quotidienne sans, à peu près, aucun souci.
C’est un documentaire d’enquête pour comprendre la société de l’époque, et de récit d’une vie plutôt agréable dans un contexte de guerre et de délation. »Le titre provisoire est d’ailleurs trouvé : La maison des réfugiés. « Parce que ça a une résonance à plusieurs niveaux, notamment l’accueil. On est plus dans cet esprit-là, estime le réalisateur.
C’est quand même quelque chose d’un peu incroyable que 60 personnes vivent dans un village où il n’y a eu aucune dénonciation, c’est un contexte hors du temps. Personne n’est intervenu, et ça me semble intéressant de présenter cela. »
Une réfugiée de 1940 retrouvée en Israël, témoigne de son passage à Celles
Dans sa quête de témoignages et d’avancements, Barcha Bauer s’est déjà rendu au Luxembourg, en août dernier, deux jours, pour évoquer cette histoire. Au sein du documentaire de 52 minutes, il aimerait faire figurer le témoignage de Marthe Braun, née en 1927 à Bitche dans le Bas-Rhin.
« Elle fut réfugiée à Celles-sur-Durolle, elle fait partie des derniers témoins. Elle habite aujourd’hui en Israël, mais grâce à une amie réalisatrice sur place qui est partie la voir à Jérusalem, j’ai pu obtenir une heure et quart d’interview », sourit Barcha, sur la bonne voie.
D’autres rencontres ont eu lieu, comme celle avec Chantal Jacob, Strasbourgeoise, dont un membre de sa famille est venu à Celles-sur-Durolle durant l’exode forcé. « Je dois aussi contacter d’autres descendants, complète Barcha, mais aussi un couple qui était à l’école avec les enfants juifs, dans le village de Chanier.
J’aimerais avoir Rosie Strauss, mais elle vit dans une fondation orthodoxe à côté de Jérusalem, je ne sais pas si on pourra la faire… » À travers sa réalisation, le professionnel de l’image aimerait répondre à plusieurs questions.
« Que représente aujourd’hui cette maison des réfugiés dans la mémoire collective, dans la mémoire collective juive du secteur, et par rapport à la population de la commune ? »
Le film devrait également recenser beaucoup d’écrits, de correspondances, et des photos.
« Et ça, c’est vraiment très bien, ça donne de la texture. » Le sujet devrait être adapté pour l’écriture pour le mois de juin, pour une sensibilisation des partenaires potentiels, « et on espère avoir des réponses pour le quatrième trimestre 2022. J’espère que France 3 sera co-producteur et diffuseur », termine Barcha Bauer.
Celles-sur-Durolle peut-elle être honorée Juste parmi les nations ?
Autant de personnes juives qui vivent aussi longtemps au même endroit, soit une soixantaine pendant cinq ans, sans être « inquiétées », durant la Seconde Guerre mondiale, pourrait bien être un fait assez rare.
« Oui, la précocité des engagements et le nombre de personnes concernées, ayant habité le long de la route de Lyon en plus, avec du passage, c’est assez rare », confirme Julien Bouchet, historien de l’université de Clermont-Ferrand, et professeur d’histoire au lycée Montdory à Thiers.
Lequel travaille depuis de nombreuses années sur la période, et sur les Justes parmi les nations. Alors, Celles-sur-Durolle pourrait-elle être considérée comme tel ?
Intégrer plutôt un réseau de villes et villages ?
« La reconnaissance passe par un dossier instruit par une institution israélienne, Yad Vashem. C’est une décision mémorielle et politique, explique-t-il. Il faut qu’il y ait un enfant sauvé, que les personnes reconnaissent qu’elles ont été cachées et sauvées, et qu’elles déposent un dossier.
Ce dossier est instruit, et doit réunir plusieurs éléments : qu’il n’y ait pas d’échange d’argent, que la personne qui a aidé ne soit pas juive, et, ce qui crée des litiges, que la personne qui a sauvé a conscience des risques encourus. De fait, le titre de Juste ne peut pas être accolé à Celles-sur-Durolle, car ça doit être lié à un Cellois. »
Julien Bouchet, historien de l'université de Clermont-Ferrand et professeur d'histoire au lycée Montdory de Thiers, est un spécialiste du sujet.
Cependant, il existe une seconde mise en valeur, plus collective et française, qui est le Réseau Villes et Villages des Justes de France.
« Une estampille pas israëlienne, large et accommodante, et il faut qu’il y ait l’attestation d’un sauvetage, complète Julien Bouchet. On devrait présenter tout ça en début d’été prochain peut-être. »
Le maire de la commune, Olivier Chambon, n’est pas contre : « Pourquoi pas recevoir cette distinction.
C’est surtout une demande des familles juives qui ont été cachées sur la commune. C’est plus le bon côté de la chose, car je ne l’aurais pas demandé pour le demander. Ils ont apprécié la situation, plutôt rare à l’époque. »
Source La Montagne
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