mercredi 24 avril 2013

L’israélien Goldtech équipera de boîtes noires les missiles produits par Rafael



L’enregistrement des paramètres de vol sur un avion via un système boîte noire (ou FDR pour Flight Data Recorder) est un procédé courant. En revanche, l’utilisation récurrente d’un système comparable sur un missile peut sembler plus difficile à réaliser d’un point de vue technique, étant donné le poids et le volume d’un tel équipement qui peut s’avérer rédhibitoire, en particulier pour un missile léger ou un missile antichar.
C’est pourtant un procédé envisagé aujourd’hui sur une famille de missiles opérationnels grâce à une équipe technique intégrée au sein de l’IDF et à une société israélienne de robotique et de systèmes optoélectroniques, Goldtec Technologies Ltd, qui ont développé conjointement le système REVITAL (acronyme hébreu signifiant acquisition, vidéo et télémétrie) pour équiper le missile Spike MR (Medium Range ou moyenne portée), appelé aussi Gill et produit par la firme Rafael.

Les systèmes d’armes de type missile antichar sont de plus en plus utilisées par les forces armées engagées dans les conflits dits rapprochés ou lors des guerres contre- insurrectionnelles, comme ce fut le cas pour les guerres en Irak et en Afghanistan.
Aujourd’hui, ceux qui sont amenés à employer ce type d’arme recherchent d’abord une probabilité d’interception élevée, une protection maximale du servant qui le met en œuvre sur la plate-forme de tir, et enfin un mode de guidage optimisé, en particulier insensible à des conditions extrêmes d’utilisation (météo défavorable, taux d’humidité élevé, visibilité restreinte) ou insensible à une anomalie du capteur CCD à guidage thermique dont sont munis certains missiles. Les versions à courte portée (typiquement jusqu’à 800m) utilisée par l’infanterie pose également la question du poids de l’ensemble du système qui doit rester raisonnable.
Outre le mode « fire and forget », les versions longue portée (long range ou LR) et moyenne portée d’un missile antichar tel que le Spike peuvent avoir également une capacité de filoguidage par fibre optique, permettant au tireur de corriger la trajectoire du missile grâce aux informations fournis par son capteur thermique, ou de rectifier le tir en cas d’erreur de cible.
Même avec un système de guidage optimisé, le missile antichar n’est pas à l’abri de voir sa trajectoire déviée de sa cible pour une raison qui reste justement à déterminer. Il est alors très difficile, voire impossible, de réaliser un diagnostic des performances du missile qui a conduit à un fonctionnement dégradé, et par la suite à optimiser les conditions de son utilisation par des actions correctrices. De manière à comprendre la cause d’une anomalie, il est possible aujourd’hui d’aménager sur un missile un système enregistreur de données temps réel pour permettre l’enregistrement des paramètres de vol avant impact. Ce système permet par ailleurs l’enregistrement des données vidéo grâce à une camera incorporée dans le missile.

Taille réduite, poids minimal et débriefing rapide des performances
Afin d’analyser une anomalie éventuelle peu après le vol du missile, la mesure des paramètres de vol considérées comme critiques tels que vitesse, accélération, altitude, etc. est indispensable pour comprendre ce qui s’est réellement passé. Se pose alors la question du système d’acquisition et d’enregistrement de ces mesures.



Coupe d’un missile Spike de Rafael, muni d’une charge explosive placée en tandem : une 1ère charge (precursor warhead) pour neutraliser les blindages réactifs (ERA ou Explosive Reactive Armour) et une 2ème (main warhead) pour pénétrer la structure des blindés.
Pour enregistrer les paramètres de la trajectoire empruntée par le missile, on peut penser dans un premier temps à un système enregistreur traditionnel de mesure à distance de type télémétrie RF (radio fréquence). Toutefois, la conception d’un tel système est généralement complexe et difficile car il nécessite l’emploi d’émetteurs, d’antennes, de démodulateurs ou d’abaisseurs de fréquence, à la fois sur le matériel volant et sur la station au sol censée le traquer.
De plus, en raison de sa taille et de son poids, un système de télémétrie RF classique n’est pas envisageable sur un engin de type missile léger sans une dégradation de ses performances de vol eu égard au système de propulsion qui a été dimensionné initialement pour une certaine masse (et pas pour une masse beaucoup plus grande), ou du contrôle de sa trajectoire eu égard à la position initiale de son centre de gravité qui serait alors déplacé de façon significative s’il devait intégrer une charge lourde supplémentaire.
Enfin, la capture de certains régimes de vol échappera totalement au système de télémétrie RF : c’est le cas lors de la mise à feu à l’intérieur du tube de lancement et lors de la phase transitoire de fonctionnement qui suit peu après.



C’est pourquoi une équipe technique de l’IDF et la société Goldtec propose la possibilité d’intégrer au missile un système enregistreur de données sous la forme de circuits intégrés et embarqués à bord du missile. Le système d’enregistrement est totalement indépendant et autonome par rapport au régime de vol, et ne requiert pas une modification particulière de l’architecture du système d’arme qui l’utilise.
Typiquement, lors d’un tir de missile Spike-MR, le système enregistreur proposé pourra donc rassembler tout un ensemble de données pertinentes pour l’analyse du vol, soit en particulier :
– un enregistrement vidéo à l’aide de la caméra qui est logée en tête du missile, pendant toute la durée du vol jusqu’à ce que le missile frappe sa cible, et ceci dans des conditions de jour comme de nuit;
– un relevé des mesures de vitesse et d’altitude du missile à tout moment;
– une sauvegarde des données provenant des différents capteurs installés sur le missile, en particulier celles provenant du capteur CCD
Ainsi, il est plus facile d’accéder aux données critiques du vol afin de savoir exactement ce qui s’est passé lors d’un cas de panne.
La mise au point du système d’enregistrement a nécessité environ deux ans, le développement ayant été mené conjointement entre les équipes de l’IDF, de Goldtec et du fabricant Rafael du missile Spike-MR sur lequel le système enregistreur sera utilisé en premier.
Sa taille réduite et son poids minimal maintiennent les performances actuelles du missile auquel il s’adapte sans difficulté majeure, et sans recours à un matériel particulier ou un personnel qualifié supplémentaire.
Par rapport au système qui était utilisé jusqu’à présent et qui pouvait peser jusqu’à 20 kg (mais utilisé uniquement par le fabricant du missile pour les phases de développement et de qualification), REVITAL fournit donc un gain de poids inégalé et une possibilité d’utilisation permanente sur le champ des opérations, avec un débriefing rapide des performances.
L’enregistrement des paramètres de vol permet donc d’avoir un accès aux paramètres de trajectoire et d’envisager une analyse des dysfonctionnements rencontrés sur la base des mesures du système obtenues en temps réel lors des conditions de fonctionnement réel.
Comme dans le cas des équipes ayant travaillé sur le Spike israélien, d’autres industriels étudient avec attention le choix d’une solution enregistreur de données en temps réel à l’aide de circuits intégrés embarqués. Dans tous les cas, le but recherché est le même, à savoir enregistrer puis analyser des paramètres de vol suite à un problème de fonctionnement quel qu’il soit, de manière à réduire le nombre d’essais pour qualifier le système et le mettre à disposition des forces armées.

Source Siliconwadi.fr