Simon le Juste était l’un des derniers membres de la Grande Assemblée. Il disait: «Le monde tient sur trois choses: l’étude de la Thora, le service pour D.ieu, et la bienfaisance.» (Chapitre 1, Michna 2). Avant de chercher à comprendre les paroles de Simon le juste, et pour mieux mesurer leur portée, il est important de préciser le contexte historique dans lequel ce dernier a vécu...
Il était le dernier des membres de la Grande Assemblée: encore jeune, il faisait déjà partie des membre de ce conseil des Sages, et il vécut après la disparition de ses derniers membres, puis il devint le premier des Tanaïms, maîtres de la Michna (Maïmonide, introduction au «Michné Thora»).
Son action se situe donc à l’époque charnière entre la décadence de l’Empire de Perse et de Médie, et l’avènement de l’Empire macédonien.
Le Talmud nous dévoile qu’il faisait partie des dirigeants spirituels prédisposés depuis toujours par la Providence divine au rôle de conservation de l’entité morale de la communauté d’Israël, face aux exils et à l’oppression des Nations.
C’est ainsi que la Beraïta (paroles des Tanaïms) explique le verset dans Be’houkotaï:
«Et pourtant, même alors quand ils se trouveront relégués dans le pays de leurs ennemis, Je ne les aurai ni dédaignés, ni repoussés au point de les anéantir, de dissoudre Mon alliance avec eux, car Je suis l’Eternel leur D.ieu» (Lévitique 26 44).
Les Tanaïms interprètent chaque partie de ce verset:
«‘Je ne les aurai ni dédaignés’: ‘Il s’agit de la période des Chaldéens, où J’ai fait naître Daniel, Hanania, Michaël et Azaria.’
‘Ni repoussés’: ‘C’est l’époque de l’Empire macédonien où J’ai placé Simon le Juste et les Hasmonéens.’
‘Au point de les anéantir’: ‘Il s’agit de l’époque de Haman, où J’ai placé Mardochée et Esther.’
‘De dissoudre mon alliance avec eux’: C’est l’Empire Perse où J’ai placé la dynastie de Rabbi Yéhouda HaNassi et les maîtres en Thora des générations suivantes.’ (Il semblerait que les éditeurs du Talmud de l’époque aient dû écrire Perse au lieu de Romain, à cause de la censure qui régnait à l’époque, car dans la version de «Ein Yaakov», figure le terme ‘romain’ et non ‘perse’, ce qui correspond à la réalité historique, Ndlr).
‘Car Je suis l’Eternel leur D.ieu’: ‘Il s’agit de la fin des temps, où aucune nation n’aura d’emprise sur eux.’» (Talmud Méguila 11a)
Le Talmud exprime clairement que, tels Mardochée et Esther, Daniel, Hanania, Michaël et Azaria, Simon le Juste a eu une influence marquante sur son époque, influence qui se situe au même niveau que celle des Hasmonéens quelques générations plus tard.
L’influence de Simon
Pourtant, l’action des Hasmonéens est définie par Na’hmanide (Genèse 49 10) comme étant à l’origine de miracles extraordinaires et de la délivrance de toute la communauté d’Israël.
Sans leur démarche, la Thora et les commandements de D.ieu auraient pu être totalement oubliés.
En quoi Simon le Juste a-t-il mérité d’être considéré sur le même plan qu’eux, lui qui n’a pas traversé cette période difficile?
D’après le Talmud (Avoda Zara 9a), la gloire de l’Empire macédonien dura au total cent quatre-vingt ans.
Par ailleurs, nous savons que la situation des Juifs se dégrada seulement à l’époque d’Antiochus Epiphane: seulement alors seront promulgués des décrets empêchant l’étude de la Thora et l’accomplissement des mitsvoth et le Temple sera profané.
Tout cela eut lieu durant les douze dernières années de l’Empire macédonien.
Mais alors, comment se fait-il que pendant une si longue période, alors que les Macédoniens étaient déjà tout-puissants, le peuple juif n’ait pas eu à souffrir vraiment de leur emprise sur la terre d’Israël?
«L’image de cet homme»
Le Talmud (Yoma 69a) nous révèle une première information, qui se rapporte à la première période de l’empire hellène, sous le règne d’Alexandre le Grand:
«Les Koutim, une secte qui pratiquait l’idolâtrie mais prétendait appartenir au peuple juif, ont demandé à Alexandre l’autorisation de détruire le Temple de Jérusalem. Ce dernier la leur accorda.
Lorsque Simon le Juste eut vent de cette terrible catastrophe qui allait s’abattre sur Israël, il se vêtit de ses habits de Grand Prêtre, se fit accompagner des notables d’Israël qui tenaient en main des flambeaux, et sans aucune arme ils avancèrent, dans la pénombre, au devant de l’armée d’Alexandre.
Au lever du jour, les voyant approcher, Alexandre le Grand demanda à son entourage:
‘ - Qui sont ces personnes?
Ce sont les Juifs qui se révoltent contre toi, lui répondit-on.’
A Antiperas, le soleil était déjà levé et le moment de la rencontre était arrivé.
Apercevant Simon le Juste, Alexandre le Grand descendit de son char et se prosterna devant lui.
Les proches de l’empereur s’étonnèrent:
‘ - Un roi aussi puissant que toi se prosterne devant ce Juif?
Lors de mes combats, j’aperçois toujours l’image de cet homme qui avance au devant de mes troupes, répondit-il. Et s’adressant à Simon le Juste et son groupe: - Que désirez-vous?
- As-tu été trompé par des païens qui t’ont conseillé de détruire l’édifice à partir duquel des prières sont adressées à D.ieu pour ton bien-être et la réussite de ton royaume?
- Qui sont ces païens?
- Ce sont les Koutim qui se tiennent devant toi.
- Faites-en ce que vous voulez, leur répondit Alexandre le Grand.’
Ils furent immédiatement exécutés et leurs dépouilles amenés jusqu’au Mont de Guérizim (leur lieu de résidence) et ordre fut donné de raser leurs habitations, de labourer la terre et de l’ensemencer, opérations qu’eux-mêmes voulaient effectuer sur le Mont du Temple.» (Talmud Yoma 69a)
D’après la tradition, Alexandre devint depuis lors le protecteur des Juifs, et se rapprocha de Simon le Juste.
Jusqu’à la disparition de Simon le Juste qui exerça les fonctions de Grand Prêtre pendant quarante ans, des relations plus qu’amicales se développèrent entre les Grecs et le peuple d’Israël.
Ces relations se poursuivirent pratiquement jusqu’à l’avènement d’Antiochus Epiphane.
Le peuple juif connut donc du vivant de Simon le Juste une période heureuse où la Thora était à son apothéose.
Après la mort de Simon le Juste, à l’époque de son disciple Antigonus de So’ho, le niveau moral du peule juif baissa et l’influence hellène prit de l’ampleur jusqu’à aboutir au règne d’Antiochus Epiphane et aux décrets contre la Thora, à l’époque de ‘Hanouka. (cf. Midrach Chir Hachirim Rabba 3 1 – Béréchit Rabba 37 1)
Dans le Dvar Thora de la semaine prochaine, nous tenterons de comprendre le sens du miracle qui faisait qu’Alexandre le grand apercevait l’image de Simon le Juste lors de l’avancée triomphante des armées grecques.
Nous essayerons également de comprendre l’influence extraordinaire de Simon le Juste sur son époque et la portée du message qu’il nous livre dans la Michna.
Message qui permit au peuple juif de traverser le première partie de la domination macédonienne sans subir aucune atteinte ni morale ni physique.
(ב) שִׁמְעוֹן הַצַּדִּיק הָיָה מִשְּׁיָרֵי כְנֶסֶת הַגְּדוֹלָה. הוּא הָיָה אוֹמֵר, עַל שְׁלשָׁה דְבָרִים הָעוֹלָם עוֹמֵד, עַל הַתּוֹרָה וְעַל הָעֲבוֹדָה וְעַל גְּמִילוּת חֲסָדִים:
Simon le Juste était l’un des derniers membres de la Grande Assemblée. Il disait: «Le monde tient sur trois choses: l’étude de la Thora, le service pour D.ieu, et la bienfaisance.» (Chapitre 1, Michna 2)
Pour comprendre le sens des paroles de Simon le Juste, il nous faut développer certains concepts concernant la création du monde…
Nous continuons cette semaine l’interprétation de cette Michna.
Dans son commentaire (Roua’h ‘Haïm ibid.) et dans son ouvrage Nefech Ha’haïm (4 – 10 11), Rabbi ‘Haïm de Volozhine nous éclaire sur le sens de cette maxime.
Pour mieux comprendre son explication, une petite introduction s’impose.
L’axiome fondamental de la création et de l’existence de l’univers matériel dans lequel nous vivons est le suivant:
La parole divine créée un rayonnement dans les sphères célestes. Ce rayonnement est reconverti, puis retransmis ensuite, étape par étape, à travers d’autres sphères d’un niveau inférieur, jusqu’à notre univers où il se matérialise. C’est donc la parole divine qui crée et permet la vie à chaque instant.
Dans son ouvrage, Rabbi Sim’ha Sissel Broïde zatsal fait une remarque intéressante: autrefois, les esprits cartésiens devaient avoir une foi profonde dans les enseignements de nos maîtres pour accepter le concept que nous venons d’expliquer.
Aujourd’hui, les découvertes de la science moderne ont prouvé que ce que nous considérons comme les différents éléments de la matière ne sont en fait que le résultat de masses d’énergie dont seules des recherches très sophistiquées peuvent dévoiler la teneur et la nature.
Mais l’origine de cette énergie reste encore inconnue.
Nous pouvons donc mieux comprendre ce que nos maîtres nous dévoilent: c’est une véritable chaîne qui relie la réalité que nous palpons à des émanations de sphères supérieures (Sam Dére’h volume 1, p. 309, note n°3).
Chacun son ange
Et c’est selon l’abondance (chéfa) créée dans les sphères supérieures que se forme la profusion et l’équilibre dans notre monde.
L’abondance dans notre univers dépend donc de l’abondance qui vient des sphères célestes, et cela concerne toutes les créatures.
C’est ainsi qu’il faut comprendre, d’après Rabbi ‘Haïm, le mots du Midrach:
«Il n’est pas un seul brin d’herbe qui n’a pas dans les cieux un ange qui le frappe et lui enjoint de pousser» (cf. Na’hmanide Genèse 1 11 – 2 8- 3 22 et Dére’h Hachem du Ram’hal 1 5)
Rabbi ‘Haïm de Volozhine précise plus encore le processus:
Dans Nefech Hah’aïm, il cite le Midrach (Michlé Rabba 9) qui interprète le verset suivant: «La sagesse s’est bâti une maison, elle en a sculpté les sept colonnes» (Proverbes 9 1).
Le Midrach explique qu’il s’agit de la Thora qui a créé tous les univers.
Et Rabbi ‘Haïm de poursuivre: la Thora, c’est la parole divine, et elle est à l’origine de la création de notre univers.
Lorsque Simon le Juste affirme que la Thora est le premier pilier du monde, il reprend l’idée développée par le prophète Jérémie:
«Ainsi parle le Seigneur: ‘Si ce n’était Mon alliance, le jour et la nuit, je n’aurai pas créé les lois du ciel et de la terre’» (Jérémie 33 25).
D’après nos maîtres, dans ce verset, ‘Mon alliance le jour et la nuit’ signifie la Thora, faisant allusion à l’ordre de D.ieu à Josué: «Tu la méditeras jour et nuit» (Josué 1 8)
Dans le Talmud (Pessa’him 68b et Nédarim 32a), Rabbi Eliezer déduit de ce même verset: «Ne serait-ce l’étude de la Thora, le ciel et la terre n’aurait pas eu d’existence.»
Car c’est la Thora qui est à l’origine du monde.
La Thora, dans son état originel, transcende toutes les sphères célestes, car elle est l’expression même de la volonté du Créateur et a été «le plan» de la création du monde.
Au moment de la révélation, pour pouvoir être transmise à l’homme, elle a été exprimée sous une forme accessible par l’esprit humain, conservant cependant sa teneur sacrée.
Rayonnement lointain
C’est ainsi que l’on comprendra les termes employés par nos maîtres pour définir les deux premiers millénaires de la terre, appelés Alpayim Tohu (deux mille ans de néant).
Pendant cette longue période, c’est seulement le rayonnement lointain de la Thora qui permit la vie de l’univers. Du fait de cet éloignement, la vie sur terre était précaire, c’est ce que nos maîtres ont signifié en l’appelant Tohu.
C’est seulement avec la révélation de la Thora aux hommes, que l’on passe à un autre stade: l’effort intellectuel des hommes qui méditent et approfondissent la parole divine, ainsi que les mots de Thora prononcés sur terre créent une lumière qui engendre le chefa (abondance) dans les sphères célestes.
C’est cette abondance qui, tel un «carburant», va être retransmise à notre monde, lui permettant d’exister et de fonctionner.
Rabbi ‘Haïm conclut en affirmant qu’il est clairement sous-entendu dans les paroles du prophète que si un seul instant, la voix de la Thora ne se faisait plus entendre sur aucun point du globe, il ne fait aucun doute que le monde reviendrait à son état initial de Tohu vavohou.
On le voit, la Thora est le pilier qui a permis la création du monde, et permet sa pérennité.
Et depuis sa transmission au peuple juif, c’est son étude qui créé le «carburant» de notre univers.
Nourrir l’humanité
Le deuxième pilier, celui du service divin (avoda) joue un rôle différent (cf. Dvar Thora année 5762 Parachat Vayikra).
C’est ce qu’explique Rabbi ‘Haïm: Le service divin vient rattacher le monde matériel aux sphères célestes, permettant ainsi à l’abondance (chéfa) de nourrir l’humanité.
L’action du service divin au temple complète l’étude de la Thora.
L’étude de la Thora agit directement dans le monde de l’esprit alors que le service divin rattache notre monde matériel au divin.
C’est la raison pour laquelle les offrandes sont constituées de l’ensemble des éléments qui forment notre univers.
Le monde inerte est représenté par le sel le végétal par les farines, l’huile, le vin et les encens; le monde animal par les parties des bêtes déposées sur l’autel.
Ces éléments, déposés et brûlés sur l’autel de D.ieu peuvent ainsi être élevés, et donc rattachés aux sphères célestes. De cette manière, le lien est créé entre le monde matériel et les mondes supérieurs.
Evidemment, au-delà des gestes, les sacrifices exigeaient des kavanoth (intentions de l’acte), auxquels devaient parvenir les prêtres au moment où ils accomplissaient leur rôle.
Les secrets de la création
Cette fonction nécessitait une connaissance des secrets de la création. Ainsi, ils pouvaient relier chaque élément du monde matériel au Créateur.
Depuis la destruction du temple, le monde ne jouit plus du privilège de pouvoir utiliser les sacrifices pour faire fonctionner notre univers.
Nos maîtres nous ont appris que le rôle extraordinaire qu’accomplissaient les Prêtres au Temple a été remplacé par les prières du peuple d’Israël.
Rabbi Eliahou Lopian explicite encore plus le processus décrit par Rabbi ‘Haïm.
L’étude de la Thora est, on l’a vu, le carburant de notre univers.
Mais seule, elle ne suffit pas, car il manque l’élément qui va permettre d’orienter l’Abondance vers le monde matériel.
Et les prières seules, aussi intenses qu’elles soient, ne peuvent créer l’abondance, leur rôle étant seulement de lui permettre de parvenir jusqu’à notre monde.
C’est seulement lorsque l’étude de la Thora et le service divin complètent leur action que le monde peut jouir de la bénédiction divine.
Rabbi ‘Haïm ajoute (Nefech Ha’haïm 4 11 et 4 25) une précision importante:
L’état idéal de l’univers, c’est de jouir spirituellement et matériellement du rayonnement divin.
Cet état idéal peut être atteint lorsque le peuple juif dans son ensemble est attaché à l’étude de la Thora ou au soutien de ceux qui étudient.
A certaines périodes de l’histoire du peuple juif, cet objectif a été presque atteint.
Mais lorsque l’intensité et la qualité de l’étude diminuent, le rayonnement qui fait vivre l’univers diminue parallèlement.
Et les conséquences de cette baisse de régime se font sentir dans le spirituel comme dans le matériel.
Ce sont donc des individus, qui à travers leur étude et sa qualité, remplissent le rôle qui aurait dû être celui de toute la communauté.
Chaque personne, qui s’investit dans la Thora et qui étudie sans intérêt personnel (lichma) peut donc être considérée à juste titre comme l’un des piliers du monde.
La semaine prochaine, nous tenterons de comprendre la fin du message de Simon le Juste. Nous expliquerons également comment Alexandre le Grand est devenu l’un des protecteurs et admirateurs d’Israël le plus convaincu de tous les temps, lui qui en a presque été l’oppresseur.
Percevoir l’essentiel
(ב) שִׁמְעוֹן הַצַּדִּיק הָיָה מִשְּׁיָרֵי כְנֶסֶת הַגְּדוֹלָה. הוּא הָיָה אוֹמֵר, עַל שְׁלשָׁה דְבָרִים הָעוֹלָם עוֹמֵד, עַל הַתּוֹרָה וְעַל הָעֲבוֹדָה וְעַל גְּמִילוּת חֲסָדִים:
Simon le Juste était l’un des derniers membres de la Grande Assemblée. Il disait: «Le monde tient sur trois choses: l’étude de la Thora, le service pour D.ieu, et la bienfaisance.» (Chapitre 1, Michna 2)
En terminant cette semaine l’interprétation des paroles de Simon le Juste, nous allons comprendre l’un des mécanismes les plus fondamentaux de notre monde, et certaines données que les experts en géopolitique eux-mêmes ignorent…
Nous nous sommes penchés la semaine dernière, sur les deux premiers piliers sur lesquels repose le monde.
Le troisième pilier est celui de la bienfaisance, appelée en hébreu guemilouth ‘hassadim.
En effet, c’est l’attribut de bonté infinie (‘hessed) du Créateur qui est à l’origine de la création de l’homme et de l’univers.
Depuis la création du monde jusqu’au don de la Thora au Mont Sinaï (matan Thora), l’homme pouvait jouer son rôle dans deux domaines seulement: le service divin et la bienfaisance.
Ces deux actions étaient indépendantes de la Thora puisqu’elle n’avait pas encore été révélée.
Et c’est par une recherche personnelle que l’homme a pu découvrir ces deux domaines d’action, le service divin et la bienfaisance.
D’après nos maîtres, Adam, le premier, fit une offrande à D.ieu.
Plus tard, Abraham découvrit l’attribut de bonté (‘hessed).
C’est en méditant sur la bonté infinie du Créateur qui se manifeste dans chaque élément de la création qu’Abraham prit conscience que cet attribut de ‘hessed était à l’origine de l’univers, et que le devoir premier de l’homme est de s’attacher à cet attribut, se rapprochant ainsi de D.ieu.
La création n’est que l’émanation de cet attribut divin de ‘hessed, car Dieu n’a pas besoin de l’homme.
Olam ‘hessed yibané: le monde n’a été créé que par la bonté de D.ieu (Psaume 89 3).
Et l’homme n’a été créé que pour être le récepteur de la bonté infinie du Créateur.
Abraham, ayant perçu cette réalité, s’est efforcé, tout au long de sa vie, ‘d’imiter’ son Créateur, accomplissant ainsi la mitsva de «Véhal’hta bidra’hav»: tu marcheras dans les voies de l’Eternel.
Cette alliance avec la bonté (brit ha’hessed) reste, jusqu’à nos jours, l’héritage d’Abraham au peuple juif, qui participe ainsi au maintien du monde.
Mais depuis la révélation sinaïtique, c’est la Thora qui fixe les règles du service divin et de la bienfaisance.
Ce qui signifie que depuis la révélation, on ne peut décider seul sous quelle forme accomplir le service divin, et ce que veut dire, concrètement et dans l’absolu, faire le Bien.
Plus encore, ce qui pouvait être conçu comme une avoda (service divin), ou comme un acte de ‘hessed peut, après le don de la Thora, être considéré comme une atteinte à la volonté du Créateur.
Par exemple, sacrifier des offrandes en dehors du Temple, ou en ne se conformant pas aux lois concernant les Korbanoth, sera considéré comme une faute grave, alors que jusque-là, le même acte était une véritable avoda.
De la même manière, accomplir la bienfaisance en allant à l’encontre des interdits de la Thora, fait perdre à cet acte toute sa valeur.
Axiomes fondamentaux
On le comprend aisément, le pilier le plus essentiel est celui de la Thora, sans lequel aucune action ne peut être définie.
C’est la Thora qui définit le Bien et le Mal, qui valide ou invalide chaque action, qui détermine les repères pour que l’homme puisse agir de façon positive dans le monde et participer ainsi à son équilibre.
Prendre conscience de ces vérités fondamentales, et les appliquer demande à l’homme de développer en lui une vision du monde qui dépasse la perception matérielle dont la société nous imprègne.
Jusqu’à l’époque de Simon le Juste, alors que les derniers prophètes de la Grande Assemblée étaient encore présents au sein du peuple juif, ces vérités paraissaient à tous évidentes.
En outre, l’atmosphère de sainteté qui régnait en Israël permettait de les appliquer dans la vie courante.
La baisse des générations (Yéridath hadoroth), déjà flagrante à son époque, a amené Simon le Juste à focaliser son enseignement sur ces axiomes fondamentaux.
Pour mieux comprendre cette situation, il nous faut ajouter une petite mise au point.
Nos maîtres nous ont appris qu’aucune des prouesses militaires décrites dans l’Ecriture, ne peut être expliquée par une force physique particulière des Juifs de l’époque ou par un génie militaire de certains de ses dirigeants.
Que ce soit la conquête de la terre de Canaan, les combats de l’époque des Juges, ceux de Saül et de David, de Salomon jusqu’à Ezéchias, et en dernier lieu les combats menés par les Hasmonéens, toutes ces victoires ne peuvent être attribuées qu’à une seule et même cause: l’intensité de l’étude de la Thora des combattants juifs et de toute la communauté (cf. Targoum Psaume 44 Talmud Sanhédrin 49 – 94 Makoth 10, …)
L’origine de la vie
Et il ne faut pas s’y tromper.
En étudiant et en pratiquant la Thora, ce n’est pas une arme secrète non conventionnelle que les Rois d’Israël et les Hasmonéens ont utilisée dans leurs combats.
Ces victoires sont la conséquence naturelle et inévitable du principe qui est que la Thora est l’origine de l’existence et de la vie de notre univers.
De ce fait, les détenteurs de la Thora, et ceux qui sont attachés à son étude, jouissent d’une aide divine particulière, inhérente au fait qu’ils sont les piliers du monde.
Même si pour camoufler ce miracle, les Rois d’Israël ont pris les armes, et ont accomplis des actions dans le domaine matériel (hichtadlouth), ils savaient parfaitement que le véritable combat se jouait dans des sphères bien supérieures.
Ils savaient que la force de la Thora pouvait faire disparaître tout adversaire, le plus puissant qu’il fut que cette force pouvait faire mentir tous les pronostics qui donnaient le peuple juif perdant, au vu des éléments en présence.
Parfois même, quand l’étude de la Thora atteint son niveau le plus élevé, l’expression de ces lois métaphysiques est encore plus spectaculaire.
C’est ce que le Talmud nous dévoile au sujet de Simon le Juste et d’Alexandre le Grand.
Lorsque la Thora est à son apothéose, il n’est plus nécessaire de créer un semblant de combat, car les ennemis d’Israël font volte-face pour devenir ses plus fidèles protecteurs.
Simon le Juste a réussi à imprégner tout le peuple juif de son message et à l’attacher à la Thora, d’une façon exemplaire.
Lui-même incarnait parfaitement les valeurs qu’il prônait.
D’abord celle de la Thora, en étant le récepteur de toute la Thora transmise par les membres de la Grande Assemblée
Ensuite celle du service divin, car il fut le Grand Prêtre quarante années consécutives (cf. Talmud Yoma 39 au sujet des miracles dans le temple pendant toute cette période, preuve du niveau du service divin qui y était accompli).
Rien d’étonnant, dans ces conditions que, tel un traitement préventif, la maxime de Simon le Juste empêchât toute influence de la civilisation grecque sur le peuple juif.
«Par Mon esprit»
Et le miracle qui fit que durant chaque bataille, Alexandre le Grand aperçoive l’image de Simon le Juste, vêtu de ses habits de Grand Prêtre, allant au devant des troupes hellènes, revêt une signification toute particulière.
En fait, ce qui a été dévoilé à Alexandre n’est que l’image pure et simple de la réalité!
Comme nous l’avons vu, c’est la force de la Thora qui fait vivre l’univers. C’est cette force qui provoque les victoires, non la stratégie ou la puissance militaire.
Et, à l’instar de toute chose, le décret divin qui accorda la puissance à Yavan (les Grecs) à cette période fut exécuté par cette force de la Thora.
Or, Simon le Juste était, à cette époque, le représentant de la Thora sur terre.
Le mérite de Simon le Juste fit qu’Alexandre le Grand perçu cette réalité et comprit ce que représente le pilier de la Thora.
Après la disparition de Simon le Juste, quand malheureusement le peuple juif commença à faiblir dans sa foi, les Grecs purent profiter de cet état, et leur influence fit baisser le niveau d’attachement à la Thora.
C’est alors qu’Antiochus eut le pouvoir de promulguer des décrets pour empêcher l’accomplissement des mitsvoth et l’étude de la Thora.
Et il faudra que les Hasmonéens, seuls détenteurs de la Thora authentique, éveillent les esprits.
Après avoir créé l’adhésion inconditionnelle de leurs adeptes pour la Thora, ils se lancèrent à l’attaque des troupes grecques.
Cette adhésion à la Thora et ce don de soi (méssirouth nefech) sans précédent vont éveiller le koa’h haThora (la force de la Thora): des miracles extraordinaires vont amener la défaite des troupes hellènes, pourtant infiniment plus nombreuses que la poignée d’Hasmonéens.
La force de leur Thora permit de briser l’emprise de la culture grecque. Parallèlement, l’attachement du peuple d’Israël à l’étude de la Thora et au service divin se renforça.
Le rôle de Simon le Juste dans l’histoire d’Israël est donc d’une importance toute aussi grande que celui des Hasmonéens, dont nous commémorons la victoire durant la fête de ‘Hanouka.
Jusqu’à nos jours, son message reste d’une actualité brûlante:
«‘Ni par la puissance, ni par la force, mais par mon esprit’, dit D.ieu, maître des armées» (Zacharie 4 6).
par le Rav Eliahou Elkaïm
Source Chiourim