vendredi 23 mai 2014

La poésie peut-elle sauver Israël ?


Dans le premier film de Nadav Lapid, Le Policier (2011), on suivait le quotidien d’un groupe de policiers d’élite israéliens confrontés à des terroristes aussi beaux et aussi juifs qu’eux. Avec L’Institutrice, présenté en séance spéciale à la Semaine de la critique, Nadav Lapid pose un regard pessimiste sur l’état de la société israélienne....


 L’histoire de Haganenet (le titre en hébreu) est inspirée d’une expérience autobiographique de Nadav Lapid, qui écrivit enfant des poèmes dont certains sont utilisés dans le film; Nira, une institutrice, décèle chez Yoav, un enfant de cinq ans, des dons extraordinaires pour la poésie. Elle écrit des poèmes elle-même, comme une sorte de jardin secret qui lui permet d’échapper à la banalité de sa vie conjugale, mais elle est subjuguée par le talent précoce de Yoav, au point de devenir obsédée par le jeune prodige qui demeure à ses yeux un enfant opaque et mystérieux. Elle décide de préserver et d’encourager ses prédispositions, envers et contre tous, dans une sorte de croisade désespérée, franchissant la ligne de la raison et de la loi.
Et Nadav Lapid « part en guerre » contre ce qu’est devenu la société israélienne :
Une société hyper matérialiste, narcissique, vulgaire, avec un service militaire obligatoire, souvent traumatisant, qui réduit à néant la sensibilité de la jeunesse avant de l’encourager à se mettre à nu. L’institutrice, comme le personnage de la terroriste dans Le Policier, se croit au-dessus du lot mais elle est aussi atteinte des maux qu’elle veut éradiquer.
Le réalisateur israélien fait coïncider une critique radicale et une mise en scène puissante, et pertinente. En cinéaste moderne, il saisit et interprète les images les plus triviales de notre époque pour les intégrer à son propre système esthétique d’un perfectionnisme sidérant. Il ne s’agit pas seulement de mettre la caméra à hauteur d’enfant dans la cour et la classe de la maternelle. Ces hyper gros plans, ces corps qui vont et viennent devant l’objectif en se heurtant parfois à lui proviennent directement de la vidéo domestique ou des téléphones portables…
Un film révolté qui marquera le cinéma israélien de sa génération.


Source Judaicine