Le 19 mai, le pape a reconnu les vertus héroïques du cardinal August Hlond, à la tête de l’Église polonaise pendant la Seconde Guerre mondiale. Depuis, deux organisations juives dénoncent ses propos antisémites et appellent le Vatican à stopper le processus de béatification.......Détails........
Le 19 mai, François a reconnu vénérable le cardinal polonais August Hlond, ouvrant la voie à sa béatification.
Dans une lettre adressée au Vatican, le rabbin David Rosen, directeur des affaires interreligieuses de l’American Jewish Comitte (AJC), affirme qu’elle « sera perçue comme une approbation de l’approche extrêmement négative du cardinal Hlond envers la communauté juive ».
Né en 1881, ce prélat a été primat de Pologne et archevêque de Varsovie. Au sommet de la hiérarchie épiscopale polonaise lors de la Seconde Guerre mondiale, il s’est exilé pendant six ans au Vatican au moment de l’occupation allemande en 1939.
cardinal Hlond
Sa réputation de sainteté vient de son refus de collaborer avec l’Allemagne nazie et de sa protection de l’Église polonaise dans l’après-guerre communiste. Son procès en béatification a été ouvert en 1992.
Trois jours après la signature du décret par le pape en mai 2018, l’AJC déclare sur son site s’opposer fermement à la reconnaissance des vertus héroïques du cardinal.
En cause ? L’antisémitisme de l’homme d’Église, documents à l’appui.
Une lettre pastorale et la non-condamnation d’un pogrom
C’est une lettre pastorale datée du 29 février 1936 qui est d’abord dénoncée par l’AJC. L’historien de la Shoah Marc-André Charguéraud l’avait déjà signalée en 2010.
« Il est vrai que les juifs se battent contre l’Église catholique, qu’ils sont libres penseurs et constituent l’avant-garde de l’athéisme, du bolchevisme et de l’activité révolutionnaire », écrivait ainsi le primat de Pologne à l’aube de l’Holocauste qui ravagera son pays et alors qu’Adolphe Hitler était déjà chancelier du Reich depuis trois ans.
D’autres propos antisémites figurent dans ce texte. « Je mets en garde contre les principes anti-juifs fondamentaux et inconditionnels importés de l’étranger (du Reich) », y ajoutait-il.
Il affirmait dans ce même texte qu’il était préférable de soutenir les commerces polonais en évitant ceux tenus par des juifs mais qu’il était « interdit » de « détruire des boutiques juives et de détruire leurs biens ».
Pogrom de Kielce
Autre chef d’accusation : sa non-condamnation du pogrom survenu après-guerre à Kielce en Pologne.
Le 4 juillet 1946 une foule de 5 000 personnes ont battu à mort 46 juifs, dont les cadavres ont été mutilés.
La Pologne de l’après-guerre est dévorée par des crimes antisémites avec 1 500 à 2000 victimes juives entre 1944 et 1947.
Interrogé par des journalistes après la tuerie de Kielce, le cardinal Hlond a expliqué que les Polonais en voulaient aux juifs qui « occupent les postes les plus importants du gouvernement et on introduit un régime qui était contraire aux intérêts de la majorité ».
Vive condamnation contre demande de contextualization
« Il est vraiment difficile de voir comme vous continuez à clamer que cet homme était un modèle de sainteté quand les données sont autant explicites », a dénoncé le rabbin David Rosen à Associated Press.
Le centre Simon-Wiesenthal, ONG de lutte contre l’antisémitisme, a souligné que la béatification du cardinal « encouragerait plus encore le gouvernement d’extrême droite polonais et son effort de longue haleine à réécrire de manière sélective les activités polonaises pendant cette période tragique ».
Selon Associated Press, Mgr Boguslaw Koziol, le prêtre polonais qui défend le cas du cardinal August Hlond devant la Congrégation des causes des saints, a rétorqué que les critiques étaient « infondées » car les citations étaient livrées hors contexte.
Il reconnaît que certaines idées s’avèrent condamnables.
Contacté par La Croix, l’historien Marc-André Charguérau répond que : « Même recontextualisés, ces propos sont d’une extrême violence, en particulier pour un homme d’Église au statut aussi élevé que celui de primat et de cardinal. »
Ce spécialiste de la Shoah insiste également sur l’exil au Vatican du cardinal Hlond, « un repli », au début de l’occupation allemande en Pologne.
En 2005, un prêtre français, le père Léon Dehon, devait être béatifié par Jean-Paul II.
L’historien Jean-Dominique Durand avait alerté l’épiscopat français de l’existence d’écrits antisémites dont le prêtre était à l’origine.
Source La Croix
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