Fabrice Touil, auteur présumé de l’arnaque à la taxe carbone, a déposé plainte le 26 juillet pour «faux en écriture publique». Dans son viseur : le parquet financier, qui lui aurait prêté une nationalité israélienne pour obtenir son extradition des États-Unis......Détails.......
C’est une rocambolesque inversion des rôles qui s’opère dans le dossier de « l’escroquerie à la taxe carbone ».
Sur le banc des victimes présumées : Fabrice Touil, un joueur de poker professionnel plein aux as.
Ce Parisien de 42 ans est soupçonné, avec deux de ses frères, d’avoir pris part à la fraude massive à la TVA sur le marché des droits à polluer. Sur le banc des suspects : les magistrats du redoutable parquet national financier (PNF), chargés de la lutte contre la délinquance à col blanc.
Selon nos informations, les avocats français et américain de Fabrice Touil ont déposé, le 26 juillet à Paris, une plainte contre X avec constitution de partie civile pour « faux en écriture publique, tentative d’escroquerie au jugement et recel ». Ils visent implicitement les méthodes du PNF, accusé d’avoir pris des libertés avec la procédure pour sévir contre leur client.
La demande d’extradition en cause
Le premier imbroglio remonte à l’été 2015. À l’époque, Fabrice Touil réside aux États-Unis.
Il est considéré comme en fuite et est visé par un mandat d’arrêt international délivré par la justice française.
Un substitut du parquet financier, Emmanuel Chirat, rédige alors une demande d’extradition auprès des autorités américaines.
Dans ce document de 36 pages, le magistrat résume les soupçons pesant sur Touil dans l’enquête sur l’arnaque au C02 : « Fabrice Touil apparaît comme un protagoniste central du mécanisme mis en place par les concepteurs de la fraude en France. […] Il a également eu un rôle de premier plan pour convertir et transformer le produit financier des escroqueries à la TVA (NDLR : via des sociétés off-shore à l’étranger). »
Pour justifier « l’impérieuse nécessité » de l’extradition, le substitut explique que le suspect « dispose d’un passeport israélien ».
« Fabrice Touil pourrait être tenté d’échapper à la justice française en s’installant en Israël, pays pour lequel la procédure d’extradition est particulièrement complexe », fait valoir le magistrat.
«Une présentation fausse des faits»
Problème : le quadragénaire ne possède que la nationalité française. En Israël, il n’est bénéficiaire que d’un simple titre de résident temporaire ! « Cette présentation fausse des faits est manifestement intentionnelle et inspirée par le dessein d’induire en erreur les autorités [américaines] », s’indignent Mes David-Olivier Kaminski, Simon Cohen et Adam Rossman dans leur plainte.
Les avocats fulminent : « Le fait que Fabrice Touil soit de confession juive n’autorise pas à faire un amalgame juridique permettant de lui attribuer une nationalité israélienne qu’il n’a pas. »
Contacté, le PNF reconnaît « une simple erreur matérielle ». « Fabrice Touil avait un passeport français émis en Israël avec une mention d’une adresse de domicile en Israël », explique une source judiciaire, expliquant que l’erreur « n’a eu aucune conséquence sur la procédure. L’intéressé ayant lui même consenti à son extradition ».
Jugé en septembre
À l’été 2016, l’escroc présumé est interpellé aux États-Unis puis remis aux autorités françaises.
Il est mis en examen pour « blanchiment de fraude fiscale » et placé en détention provisoire dans la foulée. L’homme plaide son innocence.
Ses comptes bancaires garnis, son patrimoine immobilier luxueux et ses voitures de prestige ?
Il les justifie par ses gains faramineux aux plus grands tournois de poker mondiaux à Las Vegas, attestations de joueurs de renommée à l’appui. Tout juste reconnaît-il avoir placé de l’argent liquide auprès d’un compensateur qui, en contrepartie, lui aurait fait des virements issus pour partie des bénéfices de la fraude à la taxe carbone.
Il sera jugé en septembre dans cette affaire complexe où le préjudice est estimé à 70 millions d’euros pour le fisc français.
Après quelques mois à Fresnes -et une autre mise en examen dans une affaire de corruption au sein de la prison-, Fabrice Touil est remis en liberté sous un strict contrôle judiciaire. Mais une autre erreur va achever de convaincre ses conseils de porter plainte.
Un rapport de contrôle judiciaire litigieux
Le 5 juillet dernier, il comparaît devant la 32e chambre du palais de justice de Paris pour demander un allègement de son contrôle judiciaire. Peu avant l’audience, ses avocats reçoivent du parquet financier un rapport de police indiquant qu’à la date du 3 juillet, leur client ne s’était toujours pas présenté au commissariat d’Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) pour « pointer », comme l’impose son contrôle judiciaire.
Or, Fabrice Touil s’est bien présenté le 4 juillet devant les policiers ! Ce que confirme la feuille d’émargement versée avec la plainte. Ses avocats contactent en catastrophe, quelques minutes avant l’audience et depuis le palais de justice, le gardien de la paix à l’origine du rapport litigieux.
Celui-ci leur aurait expliqué l’avoir rédigé à la demande d’un substitut du PNF, comme le veut l’usage.
« Un faux intellectuel, dénoncent les conseils de Fabrice Touil. Sans [notre] intervention, l’audience aurait été totalement tronquée puisqu’elle se serait fondée sur des éléments d’irrespect du contrôle judiciaire totalement inexacts. »
Là encore, le PNF plaide la bonne foi : « Les policiers ont réalisé l’après-midi, juste avant l’audience, que les dernières feuilles de pointages manquaient et les ont transmises. »
Une erreur qui aurait pu coûter cher à Fabrice Touil, qui aurait pu retourner en prison en cas de violation de son contrôle judiciaire.
Source Le Parisien
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