vendredi 19 février 2016

Paracha Tetsavé : La portée des actions du Cohen Gadol


Certes, un homme qui souffre même du petit doigt éprouve une certaine petite faiblesse dans tout le corps. Et lorsqu’il soulage ce membre, une fine sensation de bienêtre se diffuse dans tout son corps. Mais lorsque c’est un membre plus essentiel qui est atteint, la faiblesse sera considérablement plus perçue dès le moindre dysfonctionnement, au point même de troubler et d'entraver complètement l’activité des autres membres...



Il en va de même pour la responsabilité mutuelle de tous les membres du peuple. Dans son ensemble, le peuple d’Israël forme une seule entité, composée de nombreux membres, chacun très utile pour le bon fonctionnement de la merveilleuse machine humaine. Même le petit orteil est indispensable pour garder un bon équilibre.
Reste que certains membres ont une fonction plus cruciale que d’autres. Notamment, les dirigeants et les sages d’Israël que la Torah qualifie d'‘yeux d’Israël’, ou de ‘cœur d’Israël’.
En l’occurrence, les actions de ces pièces-clés ont une influence spirituelle bien plus accentuée sur tout le reste du peuple. Nous lirons par ex. dans Vayikra que le Cohen Gadol, le roi et les princes d’Israël, doivent apporter des sacrifices expiatoires particuliers, différents de ceux du reste du peuple lorsqu’ils fautent, car leurs écarts ont une portée bien plus importante et doivent être extirpés en profondeur, en aspergeant notamment le sang du sacrifice dans le sanctuaire et pas sur l’autel uniquement.
Ainsi, la Torah prescrit longuement dans notre Parasha les habits du Cohen Gadol, en requérant de les confectionner avec des intentions très profondes. Chacun de ces vêtements a pour but d’aider le délégué des Bnei Israël à servir Hashem en se soumettant totalement, avec joie, pureté, sincérité.
Il porte par exemple le Tsits –le fronteau– sur lequel sont gravés les mots קוֹדֵש לה' – sanctifié pour Hashem, en pensant constamment à la signification profonde de ces mots, au nom de tout Israël : ‘Je suis entièrement dévoué à Hashem, et Sa volonté est l’essence et l’intention primaire de mes pensées !’ Par son intention, le Cohen Gadol trouve grâce aux yeux d’Hashem, et Hashem éclaire en retour Sa face sur tout le peuple d’Israël.


Quelle transgression ces vêtements expient-ils ?


Nous avons jusque-là expliqué comment les 8 habits du Cohen Gadol permettent d’éveiller la grâce et la miséricorde d’Hashem sur l’ensemble du peuple. Reste à préciser davantage comment ces vêtements parviennent à expier nos fautes.
Commençons par une question pertinente : puisque les habits du Cohen Gadol expient même les graves fautes de l’idolâtrie, l’inceste, le meurtre, la médisance, etc., un juif qui transgressait l’un de ces interdits à l’époque du Beit haMikdash se faisait-il punir ?
La réponse est oui, sans aucun doute ! Pour chaque infraction, la Torah prévoit un châtiment spécifique. Si l’impie ou l’assassin commet son acte devant des témoins, le Sanhédrin doit le condamner à mort. Et en l’absence de témoins, la Guemara [Erkhin 16A] déduit que cet homme se fait tout de même frapper de lèpre, et sera même tué par le ciel. Que signifie alors que ces vêtements expient ces fautes ?
La Guemara et les commentateurs répondent longuement à cette question. Succinctement, il ressort que les vêtements n’effacent pas les fautes qui ont été concrètement transgressées, mais plutôt, tous les dégâts annexes et indirects engendrés par ces infractions. Par ex. la Torah réprimande la volonté de transgresser un interdit, même lorsque, par mal ou bonne chance, l’on manque son coup.
Ou encore, nous rapportions que chaque juif est garant de son prochain, et se doit de l’empêcher de fauter ; si l’on n’ose pas s’interposer, l’on est théoriquement punissable.
Les Tossafot, interprétés par le Netivot Shalom [Tetsavé], expliquent encore que ces 8 vêtements n’expient pas vraiment la transgression proprement dite, mais plutôt, les mauvais traits de caractère qui peuvent théoriquement faire aboutir à de terribles actes. Par ex. nos Maîtres assimilent le fait de faire rougir son prochain au meurtre.
Le Netivot Shalom explique qu’il existe 2 façons de se faire pardonner une faute : en effaçant et corrigeant directement l’acte commis –comme le font les sacrifices–, et en se sanctifiant et s’élevant tellement au point de ne pas laisser le mal avoir d’emprise sur soi.
Et d’ajouter que l’expiation des 8 habits est produite par ce dernier procédé : le Cohen Gadol s’élève tellement lorsqu’il les porte, que sa splendeur et sa soumission devant Hashem purifient le cœur du commun des Bnei Israël, et détruisent forcément les traces d’orgueil, d’effronterie, de désir de bassesse, de jalousie, etc. 
 
Rav Harry Dahan


Source Chiourim